Abridged version
1 Introduction. Structural pattern
Located to the south of the town of Aı̈n Leuh (Figs.1 and 2B), the region studied has long been included within the southern edge of the tabular Middle Atlas [5]. It is in fact a SW–NE syncline divided into two parts (the Iguer Awragh syncline to the southwest and the Afennourir syncline to the northeast) by the Mermel submeridian strike-slip fault. The area belongs to the Middle Atlas Shear Zone [2,3,13,15,16] and has been poorly studied [2,13,21]. Recently published data [6–8] have shown that the southwestern Middle Atlas was a separate basin during the Early Jurassic. The boundary with the central Middle Atlas was the ‘Boulemane Rise’ [6], where the Toarcian and Aalenian are often totally missing. During the Early Jurassic, and until the Early Bajocian, the southwestern Middle Atlas comprised several kilometric to decakilometric subbasins, bounded by faults or flexures (directional SW–NE and transverse SSW–NNE to north–south). This network is particularly clear in the El Awragh–Afennourir syncline.
2 Stratigraphic data (Al Yabès Beds)
The stratigraphic succession differs sufficiently from those of other parts of the Middle Atlas to be classified as a special lithostratigraphic unit based on the Charif Iguer Awragh profile near Mermel (Figs. 3, n∘ 6, and 4; for correlations, see [9–11]). These Al Yabès Beds are limited by tidal limestones (Tizi Nehassa Formation of the Pliensbachian) at their base and by the Zoophycos marls and limestones (Iwansitn Formation of the Bajocian) at their top.
Member A. Red–purple marls (0 to 60 m in thickness), dated to the Polymorphum Zone [1], but possibly diachronous.
Member B. Yellow bioclastic packstones and wakestones, intensively bioturbed, horizontally laminated, especially in their lower part (distal tempestites and/or distal gravity flows), dated to the Levisoni and Gradata Zones (maximum thickness: 20 m). They disappear at the northeastern end of the Afennourir syncline (Figs. 3, 4, 6, Nos. 15–16) and along its northern flank (n∘ 17). This facies is restricted to the Levisoni Zone at the southwestern end of the Awragh syncline.
Member C. Alternating marls and limestones (20 m) with a rich benthic macrofauna (brachiopods, bivalves, corals) dated to the Gradata–Meneghinii Zones. They have been deposited on a carbonate ramp barred at its top by coral build-ups (12 m maximum). The main coral barrier was situated along the submeridian Mermel line.
Member D. ‘Terebratulids beds’ (12 m). Biomicrites, rich in brachiopods and bivalves, retrograding to the southwest and capped by a ferruginous hard ground. Dated to the Late Meneghinii and to the Aalensis Zones.
Member E. Wavy-bedded biomicrites onlapping onto the highs of the shoals (0 to 70 m). Lower to Middle Aalenian.
Member F. Marls and limestones (0–30 m), with cherts and siliceous fossils. Near the top, they change to horizontally laminated crinoidal limestones. Middle Aalenian to Earliest Bajocian (Discites Zone).
3 Dynamic and palaeostructural evolution
The initial structural network appeared during the Earliest Toarcian (Fig. 2; member A). Two small subsiding sectors (Charij Iguer Awragh and Aguelman Afennourir) were separated by a large submeridian shoal (Fig. 3, between profiles 7 and 13). This geometry changed during the Levisoni Zone (synrift differentiation, Fig. 5) and therefore the Aguelman Afennourir sector became a shoal, which was the probable prolongation of the Jebel Talloun ridge [8]. The rest of the structure was tilted toward the southwest and was divided into several small (kilometric) deepening basins, which were well differentiated from the Late Gradata Zone (Alticarinata Subzone) up to the beginning of the Meneghinii Zone. During the Latest Toarcian, the palaeotopography became more monotonous (Fig. 5, first postrift homogenisation). Therefore, the beds onlapped the shoals, burying the coral reefs.
A new palaeostructural differentiation (late rifting) occurred during the Early Aalenian. The southwestward deepening appears to resume. High-energy laminated crinoidal limestones indicate that shallowing-upward happened during the end of the Aalenian (Bradfordensis and Concavum Zones). The result was a new homogenisation (pause during the late rifting) of the palaeotopography.
4 Conclusion
After the initial differentiation, retrograding beds were accumulated in a progressively deformed trough, which was deepening toward the southwest. Interference between longitudinal and transverse trends caused the development of small subbasins, alternatively deepening or shallowing.
The geometric pattern of the facies and the distribution of the thickness were related to the existence of a structural network inherited from Hercynian events [4,18] and related to the transtensive movements between Iberia and Africa [3,12,16,17,20].
1 Introduction. Position structurale
L'extension entre Europe du Nord-Ouest, Ibérie et Afrique saharienne, amorcée dès le début du Jurassique [22], se poursuit et se diversifie pendant le Toarcien. Les prémices de l'ouverture atlantique provoquent la mise en place de bassins de dimensions variées, qui apparaissent souvent en transtension sur décrochements [16–20]. Le Moyen Atlas marocain offre de nombreux exemples de tels bassins [1,4,6,7,12,13]. L'étude de la région, encore mal connue, du Moyen Atlas occidental [8] (Figs. 1 et 2B) permet d'établir la chronologie des événements paléostructuraux, grâce à une biostratigraphie précise [2]. Notre propos sera ici de suivre les relations entre les principales directions paléotectoniques, en utilisant leur écho sur la sédimentation.
Notre étude concerne un synclinal aligné SW–NE (synclinal de Kissaria– « Afenourine », décrit et nommé par Termier, [21]), séparé en deux tronçons (synclinaux d'Iguer Awragh au sud-ouest et d'Afennourir au nord-est) par le décrochement subméridien de Mermel–Aı̈n Leuh (Fig. 2B). Le synclinal est bordé, au nord, par le causse d'Aı̈n Leuh et, au sud, par la ride anticlinale Ijdrane–Aı̈n Kahla. Ses caractères sédimentaires et structuraux le rattachent à la zone de cisaillement moyen-atlasique [3]. Les études récentes, effectuées plus au sud dans le synclinal de Bakrit (Fig. 2B), ont démontré que cette vaste région, appelée aussi « blocs du Selloum » [7,8], n'était pas un golfe ouvert vers le nord-est et terminant le Moyen Atlas vers le sud-ouest. Pendant le Jurassique inférieur et jusqu'au Bajocien, c'est un ensemble de sous-bassins, séparé du Moyen Atlas central par le « haut-fond de Boulemane » [6] (Fig. 2B), structure subméridienne surimposée à l'accident nord moyen-atlasique [5] et à son prolongement méridional, où il est jalonné par des lacunes, souvent totales, du Toarcien–Aalénien.
Pendant le Jurassique inférieur et jusqu'au Bajocien inférieur, le Moyen Atlas occidental fut compartimenté par l'intersection des failles directionnelles SW–NE (N40° à N80°E), avec des accidents (failles ou flexures) transverses SSW–NNE (N10° à N30°E), parallèles au haut-fond de Boulemane (Fig. 2B, n∘ 5). Cette division en nombreux sous-bassins de dimension kilométrique à décakilométrique est particulièrement évidente dans le synclinal El Awragh–Afennourir, qui fait l'objet du présent article.
2 La succession stratigraphique (Couches d'Al Yabès)
2.1 Description
Pour éviter les confusions dans les corrélations avec des formations diachrones, nous proposons le nom de « formation des Couches d'Al Yabès », d'après le nom de l'oued qui suit le synclinal d'Al Awragh, pour l'ensemble des assises comprises entre les calcaires de plate-forme interne du Pliensbachien et les alternances marno-calcaires à Zoophycos du Bajocien ( « Couches d'Iwansitn » [1]). Elles sont caractérisées par un grand développement des assises bioclastiques (calcaires jaune miel) à la fin du Toarcien inférieur (Zone à Levisoni) et pendant le Toarcien moyen (Zones à Bifrons et à Gradata).
Les épaisseurs subissent des variations notables, aussi bien selon la direction des plis que transversalement. La succession stratigraphique synthétique décrite ici a été établie en prenant comme référence les affleurements situés à l'ouest de la route S.303, à Charij Iguer Awragh, près de Mermel (Figs. 2B, 3, n∘ 6, et 4).
Terme A. Les Couches d'Al Yabès commencent par un ensemble de marnes rouge violacé (terme A ; 60 m), qui disparaissent sur les points hauts des paléostructures. Ce faciès, non fossilifère dans le Moyen Atlas occidental, a livré des faunes du début du Toarcien inférieur (Zone à Polymorphum) [1].
Terme B. Calcaires bioclastiques bioturbés, jaune miel (micrites à bioclastes de type packstone–wakestone) (4 à 20 m). Ils débutent par des entroquites grossières, à laminations horizontales de fort régime (tempestites distales). Les ammonites et les brachiopodes établissent la présence de la Zone à Levisoni, à la base, puis de celle à Bifrons et le sommet au début de la Zone à Gradata (Sous-zone à Gemma). Le terme B disparaı̂t au nord-est (Aguelman Afennourir, coupes 15–16). L'âge change vers le sud-est (Al Yabès sud-ouest et nord-est, coupes 1–2, Fig. 2A et 3), le terme B se place dans la Zone à Levisoni, alors que la Zone à Bifrons correspond à des alternances marnes–calcaires (terme C), dans lesquelles existent des passées bioclastiques, témoins des passages latéraux de faciès (Fig. 3). Des calcaires oolithiques (Zone à Levisoni) jalonnent la zone de transition et couronnent une zone haute localisée au niveau de la coupe 4 (Fig. 3).
Terme C. Alternance de micrites à bioclastes et de marnes calcaires (0 à 20 m), riche en brachiopodes, en bivalves et en madréporaires. De la Zone à Gradata à la Zone à Meneghinii se développe un faciès de rampe carbonatée ouverte. Des biohermes à madréporaires s'installent à la fin de cet épisode le long d'un paléorelief positif, qui est jalonné par l'actuel accident subméridien de Mermel.
Terme D. « Barre à térébratules » (6 à 28 m). Biomicrites, riches en brachiopodes et en bivalves limidés, terminées par une surface ferrugineuse, limite de séquence. Zones à Meneghinii (pars) et à Aalensis. Les principaux récifs atteignent une épaisseur de 12 m et se placent à la limite entre termes C et D, probablement au sein de la Zone à Meneghinii. Les variations d'épaisseur sont accompagnées par des onlaps vers le sud-ouest et l'ouest, où la barre à térébratules perd son individualité ; elle devient plus épaisse et plus marneuse (dispositif rétrogradant).
Terme E. Calcaires bioclastiques en bancs ondulés, riches en bivalves et admettant des passées marneuses (0 à 70 m). Zones à Opalinum et à Murchisonae (Aalénien inférieur et moyen). La stratification présente de nombreux onlaps en biseaux, débordant vers les points hauts du paléorelief. Variations d'épaisseur : 0 à 70 m.
Terme F. Calcaires micritiques à bioclastes à pelletoı̈des, à rares silex et fossiles silicifiés, alternant avec des marnes (0 à 30 m). Ce terme devient plus calcaire et condensé vers le sommet et, latéralement, en direction des hauts-fonds, où il passe à des calcarénites à entroques et à lamines horizontales. Il est daté de l'intervalle Aalénien moyen (Zone à Bradfordensis)–début du Bajocien inférieur (début de la Zone à Discites).
Au-dessus viennent les alternances marnes–calcaires à Zoophycos (Couches d'Iwansitn [1]) puis les Marnes de Boulemane (Bajocien inférieur).
2.2 Interprétation des conditions de dépôt et séquences (Fig. 5)
Terme A. La reprise de sédimentation se fait dans des vasières plus ou moins isolées, où se déposent des marnes versicolores.
Terme B. Le domaine d'Awragh–Afennourir s'ouvre ensuite sur la mer franche et le milieu s'inscrit d'abord dans une plate-forme externe, présentant une morphologie de rampe plus ou moins accidentée le long des hauts-fonds subméridiens, comme celui de Mermel. Cet épisode d'approfondissement–transgression commence dans la Zone à Levisoni, avec le dépôt des calcaires jaune-miel. Il marque le démarrage de l'épisode de rifting toarcien.
Terme C. La succession devient plus marneuse de façon diachrone (dès la Zone à Bifrons au sud-ouest, à partir de la Zone à Gradata dans la région médiane Charij Iguer Awragh). Ce décalage illustre un dispositif rétrogradant, qui se développe au sein de l'intervalle transgressif (Levisoni–Bifrons).
Terme D. Au cours des Zones à Meneghinii et à Aalensis, la tendance générale à la diminution de la profondeur est contrariée par l'onlap des biohermes et des faciès marneux vers les paléoreliefs. À l'extrémité nord-est (Aguelman–Afennourir, coupes 15–16), le début tardif de la sédimentation bioclastique marque une évolution plus proche de celle connue, plus au sud, dans le synclinal de Bakrit (faciès du « Selloum » [6,7,21]).
Terme E. Au début de l'Aalénien se place un nouvel intervalle transgressif, provoqué par une reprise du rifting.
Terme F. Son début coı̈ncide avec le maximum d'approfondissement, avec des niveaux marqueurs à ammonites de la Zone à Bradfordensis. Cette succession de séquences de 3e ordre est perturbée par des oscillations liées à la dynamique locale (Figs. 2, 5 et 6).
2.3 Comparaisons
La partie inférieure (A et B) des Couches d'Al Yabès ressemble fortement aux deux termes des Couches de Mibladène de la partie méridionale du Moyen Atlas central [1], qui se caractérisent cependant par l'arrêt, ou le ralentissement extrême, de la sédimentation au cours du Toarcien supérieur et de l'Aalénien.
Les ressemblances entre les Couches d'Al Yabès et les Couches du Selloum sont importantes, car ces deux formations montrent une succession équivalente de marnes rouges et de calcaires bioclastiques, mais ces derniers débutent de façon diachrone (Zone à Levisoni à Al Yabès ; Zone à Gradata à Selloum). L'existence des biohermes est aussi un caractère distinctif des Couches d'Al Yabès. Le passage entre ces deux types de faciès est connu dans le synclinal d'Afennourir où il semble s'effectuer de part et d'autre d'un paléorelief (Figs. 3 et 6).
Comme l'ont signalé El Arabi et al. [8], ces formations et, surtout, le détail de leurs faciès ressemblent à ceux connus dans le secteur de Midelt–Mibladène. Cette dernière région appartient au Moyen Atlas central (région des Enjil et 4e ride anticlinale [1]) et ne peut être considérée comme appartenant au vrai domaine du Haut Atlas. Les faciès, souvent diachrones, se retrouvent sur les marges et les hauts-fonds de nombreux bassins synrifts atlasiques. Ces variations, dues au jeu différentiel des failles limitant les sous-bassins moyen-atlasiques, justifient une nomenclature adaptée à chaque secteur.
3 La dynamique et la structuration paléotectonique
Les profils stratigraphiques réalisés dans le synclinal d'Awragh–Afennourir (Fig. 3) ont été établis le long de coupes transversales, sur des distances moyennes de 2 km, qui sont le siège de fortes diminutions d'épaisseur, de biseaux et de discordances progressives en onlap, du sud vers le nord. Les cartes isopaques (Figs. 2 et 6) tiennent compte de ces variations ; elles sont établies à partir de coupes sériées effectuées du nord-est (Aguelman Afennourir, coupes 15–17) vers le sud-ouest (Al Yabès, coupes 1 à 3).
La structuration initiale, au début du Toarcien (terme A), s'organise selon deux cuvettes (Charij Iguer Awragh au centre et Aguelman Afennourir au nord-est), séparées par un large seuil, probablement subméridien (Fig. 2), situé entre la faille de Mermel et les coupes de Nertène Cghrira (12–13).
À partir de la Zone à Levisoni, la première différenciation structurale (Fig. 3) se poursuit. La géométrie change notablement. La partie nord-est (Aguelman Afennourir) cesse d'être un petit dépocentre très subsident, mais local, pour s'inscrire dans le prolongement du haut-fond de Jebel Talloun [8]. L'ensemble bascule vers le sud-ouest, en dessinant plusieurs ombilics, subissant un approfondissement différentiel et bien individualisés à partir de la Sous-zone à Alticarinata (partie supérieure de la Zone à Gradata). À la fin du Toarcien, l'homogénéisation se traduit par des onlaps sur les points hauts (série post-rift) ; la paléotopographie devient plus monotone, marquée par l'ennoyage des récifs à madréporaires. La transgressivité géométrique intervient en même temps que diminue la profondeur, ce qui indique un répit momentané des contrôles tectoniques (Fig. 5).
Une paléostructure nouvelle apparaı̂t ensuite au cours de l'Aalénien inférieur. La polarité vers le sud-ouest semble réapparaı̂tre, mais l'érosion ne permet pas de la confirmer à l'extrémité du synclinal d'Awragh. Cette nouvelle paléostructure est cicatrisée à partir de la fin de l'Aalénien moyen et pendant l'Aalénien supérieur par les assises post-rift, qui montrent l'homogénéisation du faciès de forte énergie.
Il faut souligner le jeu particulier de la partie nord-est du synclinal d'Afennourir (Aguelman Afennourir, coupes 15–16). Les marnes rouges du terme A sont épaisses, mais manquent les termes B à C. Le Toarcien supérieur–Aalénien est un sous-faciès de calcaires bioclastiques, caractéristiques de dépôts de haute énergie. Cette évolution est conforme à celle observée dans le synclinal de Bakrit, ce qui amène à estimer que certaines frontières paléostructurales sont transverses (SSW–NNE) par rapport aux structures longitudinales (SW–NE).
Dans le Moyen-Atlas occidental, l'existence de cette double direction donne une mosaı̈que complexe de sous-bassins, fonctionnant épisodiquement comme ombilics en voie d'approfondissement (Toarcien inférieur–moyen et Aalénien inférieur) ou comme dépocentres en voie de comblement (fin du Toarcien ; Aalénien supérieur).
Un tel canevas bidirectionnel évoque les structures développées sur décrochement qui ont été décrites en plusieurs secteurs des Atlas maghrébins [12] pour le Maroc et [9] pour l'Ouest algérien). La différenciation de la Téthys au sein du craton africain s'exagère alors en un « complex patchwork of blocks » [22, p. 63], à l'image de ce qui existe de l'Algérie à l'Italie centrale ( « stade mosaı̈que » [10]). Nos observations concernant la transgressivité locale lors d'une phase post-rift au Toarcien supérieur, au cours d'une période de baisse globale du niveau marin (cf. [10] pour l'Ouest maghrébin ou [14] pour l'Europe moyenne), sont cohérentes avec des transtensions qui se poursuivent pendant l'Aalénien, qui appartient à une phase « synrift » tardive [12].
4 Conclusions
1. La structuration initiale s'effectue au début du Toarcien. La tranche d'eau y est peu épaisse, les dépôts y sont parfois même confinés (présence locale de gypse [7]), la transgressivité géométrique des dépôts montre une nette polarité du sud-ouest vers le nord-est, dans une gouttière instable. La transgression s'effectue en plusieurs étapes, chacune d'entre elles étant bloquée par des paléoreliefs transversaux subméridiens. La conjonction des deux directions paléostructurales (directionnelles et transversales) détermine la différenciation de sous-bassins, dont le jeu alternant en ombilic–dépocentre (approfondissement–comblement) illustre l'interaction entre paléotectonique locale et eustatisme : ainsi, l'approfondissement consécutif à la montée du niveau marin pendant le Toarcien inférieur–moyen est exagéré par la subsidence pendant l'intervalle Levisoni–Speciosum, mais la transgressivité est gênée par les accidents de Aı̈n Leuh–Mermel et par la zone haute d'Aguelman Afennourir. En revanche, l'intervalle Meneghinii–Aalensis est transgressif sur les hauts-fonds, alors qu'il est sédimentologiquement régressif. La complexité nomenclaturale de la lithostratigraphie du Toarcien–Aalénien dépend donc de la diversification paléogéographique. On peut l'opposer à la relative simplicité des successions du Bajocien, quand les conditions deviennent plus homogènes.
2. L'étude du synclinal d'Iguer Awragh–Afennourir apporte ainsi d'utiles précisions sur la structuration initiale du Moyen Atlas. Le découpage en petits sous-bassins décakilométriques implique le basculement de certains compartiments vers le sud-ouest [6], où ils sont limités par des structures subméridiennes. La distribution géométrique des faciès et des épaisseurs (Figs. 2 et 6) est en relation avec l'existence d'un canevas structural complexe hérité des événements hercyniens [19] et développé au cours des mouvements transtensifs qui interviennent alors entre les plaques Afrique et Ibérie [3,4,10–12,16,17]. Ils sont le résultat global d'une extension dominante NW–SE.
3. Le secteur considéré, comparé avec les déformations synchrones de la plate-forme nord–américaine, montre (1) la similitude de contraintes en distension de part et d'autre de ce qui sera la zone d'accrétion qui, au Jurassique supérieur, créera la Téthys dans ses bassins atlantique et ligure ; (2) le rôle majeur du canevas structural hérité de la fin de l'orogenèse hercynienne. L'exemple choisi illustre avec précision la dissymétrie des deux cratons affectés par la distension : les séries sont très riches en dépôts clastiques très subsidents, lardés d'épaisses venues volcaniques sur le craton nord-américain, alors qu'elles sont plus carbonatées ici dans le Moyen Atlas, où la subsidence est plus faible et où, à l'époque considérée, le magmatisme était modeste. Ce secteur entre très clairement dans le cadre des modèles de distension crustale dissymétrique [15].
Remerciements
Notre reconnaissance va à J. Dercourt pour sa lecture critique et constructive de la première version de cette note. M. Dahmani (Service de la Carte géologique, Rabat) nous a facilité le travail sur le terrain. La version anglaise a été corrigée par N. Morton (Birkbeck College, Londres), dont nous avons vivement apprécié les conseils. Nous remercions également les rapporteurs.