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Comptes Rendus

Colloque panafricain/Panafrican colloquium (Dakar 2012)
Le score de risque dystocique (SRD) : un outil d’aide à la décision médicale pour combattre la mortalité maternelle
Comptes Rendus. Biologies, Volume 336 (2013) no. 5-6, pp. 301-304.

Résumés

Le score de risque dystocique (SRD) comprend trois parties : une verticale où le bilan de la femme individualise huit éventualités ; une horizontale, où le bilan de la grossesse identifie sept éventualités, et une centrale de pronostic, subdivisée en trois zones (« dangereuse », « douteuse » et « d’espoir »). Le SRD est positif s’il existe au moins une croix dans la zone dangereuse et/ou deux croix dans la zone douteuse ; autrement, il est négatif. Le test de validation donne de bons résultats (sensibilité = 83,61 % ; spécificité = 90,05 % ; valeur prédictive positive = 72,34 % ; valeur prédictive négative = 94,04 %). L’utilisation du SRD à large échelle permet une identification plus rapide des femmes enceintes à haut risque de dystocie obstétricale. Une orientation à temps de ces dernières vers un centre spécialisé en soins obstétricaux et néonataux contribue à la réduction de la mortalité maternelle et de la mortinatalité.

As a way to prevent maternal mortality and stillbirth, the dystocia risk score includes three components: a left column provides a list of eight characteristics to check for in the woman; an upper horizontal section provides a checklist of possible outcomes of the pregnancy itself: and a rectangular grid indicates the prognosis in three zones: a large red (dangerous), a medium-sized grey (doubtful) and a small blue (hopeful). The DRS is positive if there is at least one cross in the dangerous zone and/or two crosses in the doubtful zone (it indicates that the woman should be referred to a center specialized in obstetric emergency care); elsewhere, the DRS is negative. The validation test gives good results (sensitivity = 83.61%, specificity = 90.05%, positive predictive value = 72.34%, and negative predictive value = 94.04%). Its large-scale use would accelerate the identification of pregnant women with a high risk of dystocia. Their timely referral to specialized emergency obstetrics centers would increase the efficacy of care and reduce the levels of maternal mortality and stillbirth.

Métadonnées
Publié le :
DOI : 10.1016/j.crvi.2013.04.012
Mot clés : Mortalité maternelle, Accouchement, Dystocie, SRD
Keywords: Maternal mortality, Childbirth, Dystocia, DRS

Papa Ndiaye 1 ; Khadim Niang 2 ; Issakha Diallo 3

1 Santé publique, unité de formation et de recherche (UFR2S), université Gaston-Berger (UGB), BP 234, Saint-Louis, Sénégal
2 Santé publique, université Cheikh-Anta-Diop (UCAD), Dakar, Sénégal
3 Management Sciences for Health (MSH), Washington, États-Unis
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Papa Ndiaye; Khadim Niang; Issakha Diallo. Le score de risque dystocique (SRD) : un outil d’aide à la décision médicale pour combattre la mortalité maternelle. Comptes Rendus. Biologies, Volume 336 (2013) no. 5-6, pp. 301-304. doi : 10.1016/j.crvi.2013.04.012. https://comptes-rendus.academie-sciences.fr/biologies/articles/10.1016/j.crvi.2013.04.012/

Version originale du texte intégral

1 Introduction

La mortalité maternelle et la mortinatalité sont à combattre partout avec vigueur, détermination et persévérance. Elles ont ainsi été prises en compte par les objectifs du millénaire pour le développement numéros quatre (réduire la mortalité infantile) et cinq (améliorer la santé maternelle) [1]. Le Sénégal compte 392 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes et 29 mort-nés pour 1000 naissances vivantes [2]. Dans 60 % des cas, la principale cause est une orientation tardive [3]. La recherche de solutions à ce problème a débouché sur un outil de détection rapide des femmes à haut risque de dystocie pour leur réorientation précoce. Il s’agit du score de risque dystocique (SRD).

2 Méthode

Les paramètres biologiques objectifs de dystocie obstétricale ont été retenus à partir d’une revue de la littérature. Ces paramètres ont été ensuite classés selon leur appartenance à la femme ou à l’état de grossesse, par ordre d’importance décroissante. Leur agencement s’est inspiré du tableau de contingence à double entrée et du cadre logique (logical framework) utilisé en planification.

L’outil comprend trois parties : une verticale à gauche, l’autre supérieure et horizontale et, entre les deux, une centrale de pronostic (Fig. 1).

Fig. 1

Outil « score du risque dystocique ».

La partie verticale gauche explore le terrain de la femme, en huit éventualités organisées de haut en bas :

  • • antécédent(s) de césarienne qui fragilise l’utérus ;
  • • boiterie qui déforme le bassin ;
  • • taille (< 150 cm) pourvoyeuse de bassins rétrécis ;
  • • absence d’enfant vivant rendant la grossesse très précieuse ;
  • • jeune âge (< 18 ans) où la maturité est imparfaite ;
  • • âge avancé (> 35 ans) où les complications deviennent plus fréquentes ;
  • • autres problèmes pouvant rendre difficile l’accouchement (crises convulsives, fièvre ≥ 38 °C) ;
  • • absence de problème détectable par les moyens de diagnostic du praticien.

La partie supérieure et horizontale prévoit sept éventualités se rapportant exclusivement à la grossesse, organisées, de gauche à droite :

  • • obstacle à l’accouchement normal (placenta prævia, diaphragme vaginal, fistule vésicovaginale, prolapsus réparé, etc.) ;
  • • procidence (cordon ombilical ou membre) ;
  • • présentation non céphalique (transversale/siège) ;
  • • grande hauteur utérine (> 35 cm) faisant suspecter une gémellité, un hydramnios ou un gros enfant ;
  • • ouverture de la poche des eaux de plus de 12 heures, augmentant le risque d’infection, voire de rupture utérine ;
  • • autres anomalies du processus d’accouchement (liquide amniotique verdâtre, hémorragie, etc.) ;
  • • absence d’anomalies détectables avec les moyens de l’examinateur.

La partie centrale, de pronostic, est subdivisée en trois zones :

  • • une grande zone rouge, « dangereuse » ;
  • • une zone moyenne jaune, « douteuse » ;
  • • une petite zone verte, « d’espoir ».

L’utilisation du SRD consiste à tracer une ligne pour chaque éventualité retrouvée.

Le bilan de la femme permet de tracer une ou plusieurs lignes horizontales parmi les huit proposées pour exprimer l’état de la femme.

Le bilan de la grossesse aboutit également au tracé d’une ou de plusieurs lignes verticales parmi les sept proposées pour exprimer l’état de la grossesse.

Chaque croisement de lignes (verticale et horizontale) matérialise une croix de pronostic.

Le SRD est positif s’il existe au moins une croix dans la grande zone rouge, dite « dangereuse », et/ou deux croix dans la zone moyenne grise, dite « douteuse ».

Un SRD positif signifie que la femme enceinte est « à haut risque de dystocie ». Elle doit alors être orientée dans un centre spécialisé en soins obstétricaux et néonataux d’urgence.

Autrement, le SRD est négatif et l’accouchement peut se faire localement sous surveillance.

Le SRD peut être intégré dans le carnet de consultations prénatales ou édité isolément sous la forme d’une feuille double avec quatre pages : de garde (Fig. 2), d’identification (Fig. 3), de score (Fig. 1) et d’accouchement (Fig. 4).

Fig. 2

Score de risque dystocique édité isolément.

Fig. 3

Informations sur l’accouchement.

Fig. 4

Identification de la femme.

Un test de validation du SRD a été effectué durant six mois (juillet–décembre 1999) au niveau des hôpitaux de district de Ziguinchor, Bignona, Oussouye et Sédhiou, dépourvus de bloc opératoire.

Ce test a été appliqué par des infirmières et des agents sanitaires, sous la direction de sages-femmes.

L’identification des bénéficiaires s’est basée sur un critère d’inclusion (grossesse au troisième trimestre) et deux critères d’exclusion (rétentions d’œuf mort et travail de plus de 24 heures).

Les femmes ayant un SRD négatif ont été libres dans le choix de leur lieu d’accouchement. Toutes les femmes avec un SRD positif ont bénéficié d’une orientation systématique vers le centre hospitalier régional (CHR) de Ziguinchor qui effectuait l’ensemble des interventions chirurgicales pour toute la région.

Les activités ont été coordonnées à travers des réunions mensuelles et deux supervisions trimestrielles des utilisatrices.

3 Résultats

Parmi les 334 femmes incluses, 42,22 % ont eu un SRD positif et 57,78 % un SRD négatif ; 65,87 % ont accouché par voie basse et 34,13 % par césarienne (Tableau 1).

Tableau 1

SRD et mode d’accouchement.

SRD Accouchement par césarienne
Oui Non Total
Positif 102 39 141
Négatif 12 181 193
Total 114 220 334

La sensibilité (SRD positifs parmi les césariennes) était de 89,47 % ; et la spécificité (SRD négatifs parmi les accouchements normaux) de 82,27 %.

La valeur prédictive positive (césariennes parmi les SRD positifs) était de 72,34 %, et la valeur prédictive négative (accouchements normaux parmi les SRD négatifs) de 93,78 %.

4 Discussion

Le score du risque de dystocie (SRD) est un outil simple et d’utilisation très aisée. Les paramètres sont tous objectifs et simples à recueillir. Ils doivent être recherchés surtout dans le dernier tiers de la grossesse, mais particulièrement, et mieux, tout au long du travail de l’accouchement. Le test de validation s’est déroulé au niveau des maternités des quatre hôpitaux de district et du CHR pour des raisons liées à leur plus grande accessibilité. Dans cette phase de test, le SRD a été utilisé dans des maternités dirigées par des sages-femmes qui ont montré une parfaite capacité à l’utiliser correctement.

Le SRD est valide, avec de puissantes valeurs prédictives positive et négative, ainsi qu’une sensibilité et une spécificité élevées.

L’avantage du test est qu’il est réalisable par tout le personnel de santé actif au niveau des maternités et qu’il analyse surtout la combinaison de plusieurs facteurs de risque de dystocie [4–20].

La compréhension des principes et l’application pratique de l’outil ne demandent qu’une petite formation, de durée variable selon la catégorie professionnelle, mais n’excédant pas deux jours.

La collecte des données qui y sont prévues peut être faite par un personnel communautaire instruit, et sa numérisation renforcera la facilité de son utilisation.

L’emploi du SRD permet l’identification plus rapide des cas à référer, leur acheminement à temps à l’hôpital et, conséquemment, une plus grande efficacité de leur prise en charge. Son utilisation à large échelle devrait aboutir à la diminution de la morbidité grave chez la femme (fistule vésicovaginale, rupture utérine) et chez le nouveau-né (souffrance fœtale) et aussi à la réduction de la mortalité maternelle et de la mortinatalité.

5 Conclusion

La lutte contre la mortalité maternelle, dans nos régions et districts sanitaires, exige une recherche perpétuelle de solutions adaptées, efficaces et pérennes. L’amélioration de la couverture sanitaire des populations, en leur assurant des services de qualité, passe nécessairement par ce processus. Ce travail entre dans ce cadre. Il mérite d’être poursuivi pour affiner l’innovation dont le seul but est de contribuer à l’amélioration de la santé des couples mère–enfant et, par conséquent, de celle de la population toute entière.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflits d’intérêts.


Bibliographie

[1] ONU. Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Département de l’information de l’ONU, New York, Rapport DPI/2390 – mai 2005 – 35M: 24–9.

[2] Ministère de l’économie, des finances et du plan du Sénégal Quatrième enquête démographique et de santé à indicateurs multiples (EDS-MICS), ANSD, Calverton, Maryland USA, 2010–2011 (482 p)

[3] P. Ndiaye Programme de lutte contre la mortalité maternelle à la maternité de l’hôpital régional de Ziguinchor. Mémoire CES Santé publique, no 8–102, ISED, Dakar, 1999

[4] E. Alihonou et al. Le gravidogramme (contribution à l’amélioration de la surveillance prénatale) : à propos de 1565 observations, Afrique Med., Volume 21 (1982), pp. 605-615

[5] D. Bouillin et al. Surveillance épidémiologique et couverture chirurgicale des dystocies obstétricales au Sénégal, Sante, Volume 4 (1994), pp. 14-15

[6] M.H. Bouvier-Colle, N. Varnoux, A. Bréart. Facteurs évitables de la mortalité maternelle. Résultats de l’enquête Inserm. www.med.univ-rennes1.fr/cngof/publications/maj_final_15.html.

[7] P. Chabert; M. Callec; B. Mattei Les indications de la césarienne, Prat. Med. Gynecol. Obstet., Volume 37 (1986), pp. 31-38

[8] C. Gay, J.P. Schaal, R. Maillet, C. Colette, La rupture utérine. www.syngof.fr/fmc/rupture.html.

[9] G. Marième Ba Une grossesse d’adolescente comporte de graves risques pour la mère et son enfant, Pop Sahel, Volume 13 (1990), pp. 14-15

[10] F. Diadhiou L’adolescente gère mal sa fécondité, Pop Sahel, Volume 13 (1990), pp. 12-13

[11] A. Diongue Drame d’une maternité précoce, Pop Sahel, Volume 13 (1990), pp. 10-11

[12] C. Gay, J.P. Schaal, R. Maillet, C. Colette, Épaule négligée, procidence d’un membre. www.syngof.fr/fmc/epaule.html.

[13] C. Gay, J.P. Schaal, R. Maillet, C. Colette, La procidence du cordon. www.syngof.fr/fmc/procidence.html.

[14] R. Maillet, J.P. Schaal, C. Collette, La dystocie des épaules. www.synof.fr/fmc/dystocie.html.

[15] R. Merger; J. Levy; J. Melchior Pathologie propre au travail. Précis d’obstétrique, Masson, Paris, 1979 (pp. 285–339)

[16] OMS – Bureau régional de l’Afrique. Santé de la reproduction. Dossier d’information sanitaire de la région africaine de l’OMS, AFR/INF/99.1.

[17] J. Pelle, M. Favier, Le siège : une présentation potentiellement dystocique. Prat. Med. Africaine, Medicafrique 26, pp. 56–75.

[18] J.P. Schaal, D. Riethmuller, Accouchement des grossesses multiples. www.gyneweb. fr/Sources/obstetrique/colmar/98/acct.html.

[19] J.M. Thoulon; F. Puech; G. Boog Accouchement dystocique, Obstétrique, Universités francophones, Ellipses, 1995 (pp. 753–835)

[20] A. Treisser, Macrosomie fœtale. www.med.univ-rennes1.fr/cngof/publications/maj_final_40.html.


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