Abridged version
1 Introduction and geological setting
Several karstic-like features are recognised in the silico-aluminous metamorphic rocks of the southern Cameroon [10–14] (Fig. 1). The area is a 600 to 800 m high plateau deeply eroded by a very active hydrological network. Climate is equatorial, very wet and moderately hot. The geological context consists of two units: (i) the Archaean Ntem Complex [3] with greenstone belts and charnockitic to granitic rocks [7,8], and (ii) the Yaoundé Group with gneisses and micaschists metamorphosed around 620 Ma and thrust above the Ntem complex during the Pan-African orogeny [4]. This paper focuses on the karstic features of the Yaoundé nappe gneisses. Their study shows (1) that these features are either presently generated by the acid rains, or are ancient and previously formed in watered zone and (2) that the structural patterns of the rocks control the alteration and dissolution processes.
2 Karstic features and structural control
A first type of karstic-like features corresponds to surface reliefs as kamenitzas, lapies, and sub-vertical karrens on the hill flanks, to vertical wells or pits, and to sub-horizontal pipes. It is characterised by a present-time water running, invasive vegetation, and the presence of clayey and sandy alteration products. The surface reliefs resulted from selective alteration along structural discontinuities such as fractures, lithological joints, schistosity, foliation and shearing planes. However, the karrens regularly disposed along the steeply slopes of the hills are only due to the rainwater rush down. Numerous wells, 20 to 80-cm averaged wide and about 1-m deep, can be seen on the hilltops and the upper flanks. They are clearly disposed along sub-vertical fractures (Fig. 2), which corresponds to the brittle pattern of the bedrock with three trending directions, mainly N0°–10° and N50°–70°, and secondly N150°–170°. Hill wall pipes are located at sub-horizontal structural joints (Fig. 3). They are characterised by outpouring of water and by the precipitation of a whitish mixture of smectites and opal and of needles of quartz. These features show that a present-time karstification is in progress with infiltration of rainwater into the vertical fractures and exsurgence on the hill flanks along structural joints (schistosity, foliation and shear planes). The widening of the wells and of the pipes, and the precipitation of neogenic minerals at the pipe outlets indicate that dissolution processes are occurring.
A second type of karstic features corresponds to centimetric to metric alveoli and to more or less large caves dug into the cliff wall rocks. These holes are dry and devoid of alteration product deposition. The alveoli are set along the sub-horizontal structural discontinuities (Fig. 4). They are ellipsoidal and show a smooth inner surface (Fig. 5). Elongation of the mouth is parallel to the foliation plane. The internal wideness strongly reduces as a flatten cone shape. The direction of the axes of the cones, i.e. the internal development of the holes, is generally orientated NNE, the same direction than that of the stretch lineation. The same direction is also shown by the axes of the sheath folds (Fig. 6). One can note that the shape of the alveoli resembles that of the sheath folds on the cliff walls (Fig. 7). Some large caves can only be explained by karstic processes [10,11]. It is the case for the cave of Mfula (Fig. 1). In this cave, more than 5000 m3 large, 60 m deep and 10 m high, noticeable dissolution features are observed (Fig. 8). The internal shape, wideness and floor slope, and the development axis are controlled by the structural characteristics of the gneisses. Alveoli and caves being devoid of any water flow and of rock debris or alteration products, they are considered as fossil karstic cavities.
3 Discussion and conclusion
The present-day formation of cavities, as well as the digging of the fossil cavities, is strongly controlled by the structural patterns of the crystalline bedrock. It is observed that the surface alteration and the genesis of cavities are firstly due to the vanishing of the plagioclases [10]. These minerals suffered a rapid hydrolysis by the acid rains of pH 5 that we measured in the Yaoundé area. The removal of the plagioclases facilitates the infiltration of water along structural discontinuities, which leads to progressive enlargement of wells and pipes by dissolution effect. This process is presently working on the hilltops and flanks. It was also working in the deep and flooded substratum by the aquiferous nappe and gave the alveoli and caves (Fig. 9). These karstic objects now appear into sight on the hill flanks, as a consequence of epeirogenic surrection of the Cameroon Line, a volcano-tectonic event that took place in the Miocene. Thus, these objects are fossil and predated the Miocene. The pre-Miocene topographic surface is uplifted at about 1500 m [1,2,6]. Regressive erosion controlled by the fracturing pattern, causes denudation of massive blocks that undergo present-day karstification (Fig. 9). But it is very probable that a more developed karstification is also in progress in the deep aquifer.
1 Introduction et contexte géologique
Dans le Sud du Cameroun, de nombreuses formes comparables à celles rencontrées dans le modelé karstique s'observent au sein des roches cristallines silico-alumineuses [10–14] (Fig. 1). Leur genèse est attribuée essentiellement à de la dissolution bien que le milieu ne soit nullement carbonaté. C'est pour cette raison que nous utilisons le terme de karst [12]. La région fait partie du plateau sud-camerounais d'altitude comprise entre 600 et 800 m et comporte un réseau hydrographique très actif. Entre les vallées se dressent des collines en « demi-oranges », d'une centaine de mètres de hauteur. Le climat est de type équatorial humide, tempéré par l'altitude, avec une température moyenne de 29 °C et une humidité relative élevée toute l'année (80 % en moyenne). Les précipitations sont comprises entre 1600 et 1900 mm. Une importante couverture d'altération latéritique masque une grande partie du substratum rocheux. Cependant, le relief, relativement accidenté, met à nu les formations rocheuses sur les flancs des collines et dans les vallées encaissées. On distingue deux ensembles géologiques : le complexe du Ntem et le groupe de Yaoundé. Le complexe du Ntem [3] appartient à la marge archéenne nord-ouest du craton du Congo. Il comprend des ceintures de roches vertes, encaissées dans des massifs charnockitiques et intrudées par des plutons de tonalites datés entre 2,9 et 2,8 Ga, de granites potassiques, vers 2,6 Ga et de syénites, vers 2,3 Ga [7,8]. La partie nord-ouest de ce complexe a été déformée et métamorphisée par l'événement tectono-magmatique transamazonien vers 2,05 Ga [7–9]. Au nord, ce socle archéen est surmonté par le groupe de Yaoundé, constitué en nappes charriées vers le sud lors de l'orogenèse pan-africaine [4]. Ce groupe rassemble des formations métasédimentaires grésopélitiques, des orthogneiss et des intrusions granitiques datées du Méso- au Néoprotérozoı̈que. L'ensemble a été structuré et métamorphisé vers 620 Ma [5,9]. L'essentiel de la déformation est un grand mouvement tangentiel à vergence sud. Schistosités et foliations sont sub-horizontales et portent une linéation d'étirement d'orientation sensiblement nord-sud (Fig. 1). Le métamorphisme décroı̂t depuis les migmatites et les gneiss à disthène de Yaoundé jusqu'aux micaschistes de la région de Mbalmayo. Dans la région de Yaoundé, le chevauchement vers le sud est matérialisé au sein des gneiss par de nombreux plis en fourreaux et par de grands cisaillements plats, indiquant un déplacement du compartiment supérieur vers le sud.
Cette étude s'intéresse aux formes karstiques apparaissant dans les gneiss de la nappe de Yaoundé. Nous montrons (1) que les formes observées sont, soit actuelles et formées à l'air libre sous l'effet des eaux pluviales, soit fossiles et initialement formées en milieu noyé, et (2) que la structuration du substratum cristallin contrôle les processus d'altération et de dissolution.
2 Formes karstiques et relations structurales
Deux types de formes se distinguent par le fait qu'elles sont ou non empruntées par une circulation hydrique actuelle. Il s'agit, d'une part, de reliefs de surface et de puits verticaux généralement humides et envahis par de la végétation, et, d'autre part, d'alvéoles, de conduits de paroi et de véritables grottes, généralement secs. Nous examinons ici les relations entre ces morphologies et les caractères structuraux des roches.
La première catégorie, associée aux eaux pluviales et d'infiltration, est marquée par la présence de produits d'altération. Des coupelles de dissolution (kamenitzas) et des rigoles ou lapiez métriques à décamétriques se forment sur les surfaces sub-horizontales des gneiss et des micaschistes. Les discontinuités créées par les fractures, les diaclases et la foliation guident l'infiltration de l'eau et déterminent les zones d'altération, contrôlant ainsi la formation des microreliefs. Des cannelures verticales, d'espacement plurimétrique et de profondeur décimétrique, se localisent sur les flancs dénudés des collines. Dues au ruissellement des eaux pluviales, elles suivent la ligne de plus grande pente et ne semblent pas immédiatement liées à la structuration de la roche [10,11]. Sur la plupart des collines au nord de Yaoundé, on observe des puits verticaux, plus ou moins inondés et plus ou moins remplis de produits d'altération sablo-argileux. La profondeur mesurable dépasse le mètre, pour un diamètre d'une cinquantaine de centimètres. Ces puits sont clairement disposés sur des fractures verticales (Fig. 2). En saison des pluies, des sources ou exsurgences apparaissent sur les parois subverticales des collines. Ces exsurgences se localisent au niveau de cavités centimétriques à section allongée, selon des joints subhorizontaux (Fig. 3). En fait, l'infiltration des eaux pluviales se fait au niveau des fractures subverticales de directions majeures N0°–10°E et N50°–70°E et de direction mineure N150°–170°E. La structuration des gneiss montre une foliation et des plans de cisaillement subhorizontaux, qui facilitent la formation des joints de décompression. Ces joints jouent le rôle de drain et les conduits de paroi résultent manifestement de leur élargissement par altération préférentielle et dissolution, la dissolution étant attestée par la précipitation d'opale, de smectites et d'aiguilles de quartz au débouché des conduits. Le développement actuel de ces cavités verticales et horizontales, par circulation des eaux pluviales et dissolution selon des joints structuraux, est responsable de l'évolution des reliefs, en facilitant le décollement de grands blocs de roches sur les flancs des collines. Ainsi se forment de vastes chaos de blocs décamétriques, entre lesquels peuvent exister des grottes secondaires, non karstiques, comme celle de Nkongméyos, près de Yaoundé (Fig. 1) [11].
Une deuxième série de phénomènes karstiques est caractérisée par la rareté ou par l'inexistence de produits d'altération. Ce sont les alvéoles de paroi et les grottes karstiques. Les alvéoles de paroi sont fréquentes dans la région de Yaoundé (Fig. 1). Elles ne sont pratiquement pas colonisées par la végétation et ne servent pas d'exsurgence pour les eaux pluviales infiltrées. Elles s'observent sur les parois subverticales, où elles apparaissent le plus souvent allongées dans les plans de foliation horizontale des gneiss (Fig. 4). L'ouverture, de dimension décimétrique, est ellipsoı̈dale, avec un grand axe parallèle à la foliation, au plus égal à quatre fois le petit axe (Fig. 5). Vers l'intérieur, les dimensions diminuent rapidement. Une étude structurale réalisée sur plusieurs falaises au nord de Yaoundé montre que la plupart des alvéoles s'enfoncent en direction N10°E. C'est précisément la direction de la linéation d'étirement et celle de l'axe d'allongement des plis en fourreaux qui caractérisent le style structural de la nappe des gneiss de Yaoundé (Fig. 6). La forme des alvéoles est la même que celle des plis en fourreaux sur les parois rocheuses (Fig. 7).
Certaines grottes connues dans la région de Yaoundé sont, en fait, des abris sous roche ou des grottes de chaos rocheux. Toutefois, il en existe qui ne peuvent s'expliquer que par une dissolution généralisée du substratum, comme celle de Mfula [10,11]. Cette grotte s'ouvre au flanc d'une falaise d'une colline de gneiss granulitiques, située à 80 km au nord-est de Yaoundé (Fig. 1). Les dimensions sont importantes : plus de 5000 m3. Après un vaste porche ellipsoı̈dal de 20 m de large et 8 m de haut, la cavité se développe sur 60 m de profondeur et 10 m dans sa plus grande hauteur, en laissant plusieurs piliers résiduels (Fig. 8). Elle s'enfonce en direction NNE. Le plancher est en légère pente de 10° vers le sud-est. Sur l'ensemble des parois, on observe de nombreuses alvéoles de dissolution, à section ovale décimétrique à métrique. Une cloche de dissolution d'environ 5 m de diamètre occupe le plafond central. La grotte de Mfula présente les caractéristiques des grottes karstiques développées en roches carbonatées [12]. Actuellement, aucune circulation d'eau ne sort de la grotte, qui est donc une forme fossile. La forme généralement ellipsoı̈dale, avec un grand axe sub-horizontal, la pente du plancher ainsi que les axes l'allongement des alvéoles des parois sont strictement contrôlés par les caractères structuraux des gneiss. Les gneiss montrent en effet une foliation et des plans de cisaillement sub-parallèles, faiblement pentés vers le sud-est, et une linéation d'étirement bien marquée NNE–SSW. Il apparaı̂t donc que la grotte de Mfula, comme quelques autres du Sud-Cameroun (Akok Békoé, Matomb..., Fig. 1), peut s'expliquer par le développement extrême d'alvéoles de paroi. Le creusement de ces cavités a dû se faire en milieu inondé par un aquifère, bien avant l'individualisation des collines dans le paysage. L'absence de résidus solides et les morphologies de type karstique, alvéoles de parois et colonnes, indiquent que la dissolution a joué un rôle prédominant dans la formation de telles cavités [12].
3 Discussion et conclusion
Les formes d'altération actuelles (microreliefs, puits et trous de paroi) résultent de l'action des eaux pluviales et d'infiltration. Des réseaux de cavités se forment au sein des masses rocheuses, qui sont contrôlés par les joints structuraux : diaclases et fractures sub-verticales héritées d'anciens grands décrochements, d'une part, plans de foliation et de cisaillement liés à la mise en place des nappes pan-africaines, d'autre part. On observe que l'altération en surface et le développement des cavités sont liés à la disparition des plagioclases, ce qui conduit à la désagrégation de la roche, plus ou moins rapidement en fonction de l'abondance de ce minéral. L'altération rapide des plagioclases peut s'expliquer par l'acidité des eaux pluviales qui ont un pH moyen de 5 dans la région de Yaoundé, d'après nos mesures.
Les formes karstiques fossiles, grottes et alvéoles de paroi, se sont développées au sein d'un aquifère profond, avant la surrection des reliefs (Fig. 9). Les processus de dissolution dans cet aquifère et la formation des cavités ont été clairement contrôlés par les caractères structuraux. Ainsi, les alvéoles de paroi résultent de la dissolution des plis en fourreaux dont le cœur est essentiellement constitué d'agrégats quartzo-feldspathiques. Elles se développent selon l'axe d'allongement de ces plis, qui correspond à la direction de contrainte structurale majeure. L'aspect lisse de l'intérieur des alvéoles, qui diffère de l'aspect carié des surfaces altérées soumises à l'action des eaux pluviales, montre que la dissolution des différents minéraux s'est produite malgré leurs faibles coefficients de dissolution. La formation de vastes grottes comme celle de Mfula peut s'expliquer par le fait que la roche, un gneiss mafique à grenat et amphibole, est riche en plagioclase, minéral le plus facilement hydrolysable.
Le relief actuel très accidenté du Sud-Cameroun résulte de la surrection de la Ligne du Cameroun, phénomène volcano-tectonique apparu au Miocène. Cette surrection a disséqué la pénéplaine du Crétacé et du Paléogène [1,6]. Cette surface a été portée à 1500 m d'altitude dans le Sud-Cameroun [2]. Les alvéoles et les grottes se seraient développées au sein de la nappe aquifère pré-Miocène, avant d'être exhumées (Fig. 9B) ; ce sont donc des formations anté-Miocène. En revanche, les formes associées à une circulation d'eau, puits et trous de paroi, sont actuelles (Fig. 9C). Il est cependant probable que des processus karstiques analogues à ceux qui ont donné les formes fossiles se produisent actuellement en profondeur, dans la nappe aquifère.