Abridged version
1 Introduction
Bodies of massive limestone (‘Calcaires à Productus’ of the authors) occur in the southeastern part of the Montagne Noire (Mont Peyroux nappe and Cabrières slices). They are embedded in terrigenous flysch deposits and correspond to olistoliths [8]. They are almost totally composed of boundstones, constructed mainly by microbialites and secondarily by corals, bryozoans and sponges, in shallow-water environments. Their sedimentology, stratigraphy and the revision of their age based on rugose corals are the aims of this paper.
2 Litho- and biostratigraphy
Two main lithostratigraphical units are recognised here: the Roque Redonde and the Roc de Murviel Formations.
2.1 Roque Redonde Formation
The Formation is composed by light to dark limestones, locally rich in rugose corals and brachiopods. Its thickness is 110 m at least in the stratotype and about 200 m in the Roc de Murviel section, where the base and the top of the Formation are exposed. Here, the base of the Formation comprises some metres of oolitic grainstone with reworked pebbles of sandstone, quartz and metamorphic quartzite, and bioclastic packstone–grainstone, with corals and productids. It overlies sharply the ‘Calcaires à colonnes’ unit. The top is karstified and rubefied and overlain by the Roc de Murviel Formation. In the Pascales hill, the formation is caped by shales.
The Formation comprises two main facies. The first one (Roc du Cayla facies) is mainly composed by light, massive, microbial boundstones with stromatactis-like cavities, and the second one (Castelsec facies) by light to dark grey, thin-bedded to massive, wackestones to grainstones. Both are associated to form thick build-ups embedded by siliciclastic deposits.
Most of the rugose coral species collected in the formation belong to the genera Siphonodendron, Lithostrotion, Diphyphyllum, Solenodendron, Axophyllum, Pareynia, Clisiophyllum, Dibunophyllum, Haplolasma, Siphonophyllia, Aulokoninckophyllum, Semenoffia, Kizilia, Melanophyllidium, Palaeosmilia, Lonsdaleia, Nemistium, and Palastraea. The occurrence of the three later genera is characteristic of the RC8 Coral Zone, indicating an Uppermost Visean age (Upper Warnantian–Brigantian) [4,15]. This dating is confirmed by the presence of the foraminifera Janischewskina.
2.2 Roc de Murviel Formation
The formation is composed by reddish brown to dark, more or less argillaceous, boundstones, packstones and grainstones. Boundstones can form biostromes or small bioherms. In the type section, the base of the Roc de Murviel Formation includes breccias filling up and overlying a palaeokarstic surface developed at the top of the Roque Redonde Formation. The formation is at least 25 m thick and could be more than 50 m thick; it ends with the increase of the siliciclastic deposits, including shales, sandstones and conglomerates.
The coral fauna occurring in the formation is abundant and diverse. The most common species belong to the genera Axophyllum, Kizillia, Lonsdaleia, Actinocyathus, and to an undescribed colonial heterocoral. Other species belong to Palaeosmilia, Palastraea, Lithostrotion, Siphonodendron, Diphyphyllum, Corwenia, Clisiophyllum, Dibunophyllum, Haplolasma and Gangamophyllum. Some species of this association are known in the Ardengost Limestone in the central Pyrenees [13] dated as Serpukhovian E2 [12,14], reinforcing the Serpukhovian age for the Roc de Murviel Formation, indicated by the advanced stages of evolution shown by several coral species and also by the foraminifera Biseriella parva.
A similar coral assemblage described at Lanet (Mouthoumet Massif, Hautes Corbières) and considered as Upper Visean [17] is therefore dated as Serpukhovian.
3 Conclusion
The development of the bioherms of the Roque Redonde Formation can be correlated with the transgressive system tract of a third-order sequence (sequence 10 of Hance et al. [10]). Their local emersion and karstification can be correlated with the low-stand of the Visean–Serpukhovian boundary [16] and the development of the Roc de Murviel Formation with the transgressive system tract of a Serpukhovian third-order sequence.
The Uppermost Visean and Serpukhovian ages established for the two lithostratigraphical units of the ‘Calcaires à Productus’ extend the ages previously stated on the basis of foraminifer observations [11,18]. The formation of the olistoliths and the nappes including them, due to the Variscan orogeny, was at least as young as the Upper Serpukhovian or the beginning of the Bashkirian. The youngest ‘Calcaires à Productus’ are contemporaneous with those of the Corbières and the central Pyrenees.
1 Introduction
En 1847, de Serres [7] découvre des productidés dans des calcaires du versant sud-est de la Montagne noire, qu'il attribue au Carbonifère. L'âge Viséen supérieur de ces « calcaires à Productus » [9] sera précisé par Bergeron [2] et Böhm [3] à partir des macrofaunes, puis par Mamet [11] et Vachard [18] à partir des foraminifères. Cette datation conduira Engel et al. [8] à considérer que la sédimentation flysch et la mise en place des nappes sur la bordure sud de la Montagne noire sont intervenues dès le Viséen terminal et ont pu se poursuivre jusqu'au Serpukhovien. Hypothèse reprise par Delvolvé et Perret [5], qui, par comparaison avec l'âge des flyschs dans le massif du Mouthoumet (Corbières), les Pyrénées centrales et les Pyrénées occidentales, concluent à une migration progressive de l'orogenèse varisque d'est en ouest, du Viséen supérieur au Westphalien.
La stratigraphie et la révision de l'âge des « calcaires à Productus » à partir des coraux (E.P. et L.B.), leur sédimentologie (M.A.) et la comparaison des faunes coralliennes avec celles qui sont connues dans le Carbonifère inférieur des Corbières et des Pyrénées constituent l'objet de cet article.
2 Litho- et biostratigraphie des « calcaires à Productus »
2.1 Distribution géologique
Les « calcaires à Productus » (Fig. 1) affleurent dans la nappe du mont Peyroux et dans les écailles de Cabrières [8], où ils constituent des unités calcaires plus ou moins lenticulaires, souvent noyées dans des sédiments siliciclastiques (complexe schisto-gréseux de Böhm [3]). Leurs dimensions varient depuis celles de débris de quelques centimètres à peine (en raison de leur transport et de leur fragmentation), jusqu'à celles de petits massifs de quelques centaines de mètres, qui forment parfois des reliefs imposants par érosion différentielle de leur encaissant. Toutes ces unités calcaires sont allochtones, ayant glissé par gravité dans le bassin lors de la tectonogenèse varisque [8], sous forme d'olistolithes isolés ou au sein de lambeaux plus grands, comprenant également leur encaissant originel. Dans ces lambeaux, fortement tectonisés, nous avons établi le contexte sédimentaire et la stratigraphie des « calcaires à Productus » et mis en évidence deux formations d'âges différents : celle de Roque Redonde et celle du roc de Murviel.
2.2 La formation de Roque Redonde
2.2.1 Lithostratigraphie et sédimentologie
L'essentiel de la formation de Roque Redonde (Figs. 2 et 3) est constitué par des calcaires clairs à gris, habituellement massifs, localement riches en coraux et en brachiopodes. Sa lithologie est bien exposée dans une ancienne carrière entamant la petite colline de Roque Redonde, au sud de Vailhan (Fig. 1), que nous choisissons comme stratotype ; elle y a une épaisseur d'au moins 110 m.
Elle comprend deux faciès principaux : celui du roc du Cayla et celui de Castelsec.
- – Le faciès du roc du Cayla correspond à des calcaires clairs, massifs, construits (boundstones microbiens), renfermant des cavités de type stromatactis. Il constitue l'essentiel de la formation, au sein de laquelle il forme des biostromes métriques à plurimétriques ou des unités épaisses de plusieurs dizaines de mètres, dont la morphologie n'a pu être établie. La macrofaune est en général peu abondante et restreinte à certains niveaux. Elle comprend essentiellement des coraux, souvent en position de vie, enchâssés dans les constructions microbiennes, et des brachiopodes. L'analyse des microfaciès montre principalement des microbialithes encroûtant des bryozoaires et des algues calcaires. Ce faciès est très développé et bien exposé dans l'ancienne carrière qui entame le roc du Cayla et au roc de Murviel (Fig. 1).
- – Le faciès de Castelsec correspond à des calcaires gris, parfois très foncés, massifs ou en bancs décimétriques à plurimétriques, bioclastiques (grainstones à wackestones), souvent riches en coraux, brachiopodes, foraminifères, algues calcaires et oncolithes algaires. Il est bien développé dans une ancienne carrière située à 200 m au sud-est du hameau de Castelsec, à Roque Redonde et à Japhet (Fig. 1). Il est interstratifié dans les calcaires construits du faciès du roc du Cayla ou, comme dans la coupe de Japhet, constitue la transition latérale de ces derniers avec les faciès argileux périphériques.
La coupe de Roque Redonde ne montre ni la base, ni le sommet de la formation du même nom, qui sont cependant visibles au roc de Murviel. Dans cette coupe, la formation surmonte directement des calcaires biodétritiques granoclassés de l'unité des « calcaires à colonnes » [6,8], tandis que sa base est formée de quelques mètres de calcaire oolithique (grainstone) à grains de quartz et graviers de quartzite métamorphique et de grès, ainsi que de calcaire bioclastique (packstone et grainstone) à grands productidés et coraux appartenant à des espèces qui sont présentes plus haut. Son sommet est rubéfié et marqué par un paléokarst dont les cavités sont visibles jusqu'à quelques mètres de profondeur ; ce paléokarst est rempli et surmonté par des dépôts bréchiques de la base de la formation du roc de Murviel. L'épaisseur totale de la formation est ici d'environ 200 m.
Dans la partie sud de la colline des Pascales (Fig. 1), des boundstones microbiens de la formation de Roque Redonde (en position renversée) sont recouverts par des shales. La présence, à la base de ces shales, de quelques niveaux riches en coraux, identiques à ceux qui sont présents dans les calcaires sous-jacents, montre qu'ils sont subcontemporains de la formation, qu'ils ont recouverte de façon tranchée, mettant ainsi fin à son développement. Ils sont, par conséquent, en relation directe avec les calcaires et sont distincts des shales, qui renferment les olistolithes et qui leur sont postérieurs.
En dehors de la coupe du roc de Murviel, la présence fréquente, au sein du flysch, d'olistolithes composés uniquement par la formation de Roque Redonde (par exemple à Roque Redonde, à Castelsec et au roc du Cayla) suggère que certaines bioconstructions ont pu se développer directement sur un substrat pélitique, leur contact avec ce dernier n'étant plus identifiable après la mise en place des olistolithes.
La mauvaise qualité des affleurements de la Montagne noire ne permet cependant pas d'apporter plus de précisions sur la géométrie des bioconstructions et sur leurs relations latérales avec le contexte sédimentaire non carbonaté.
2.2.2 Biostratigraphie
Les coraux ont été systématiquement prélevés dans la presque totalité des affleurements de la formation de Roque Redonde. Ils constituent une association relativement homogène, tant d'un point de vue stratigraphique que géographique, dans laquelle la majorité des espèces appartient aux genres Siphonodendron (principalement S. pauciradiale), Lithostrotion (L. decipiens), Diphyphyllum, Solenodendron, Axophyllum, Pareynia, Clisiophyllum, Dibunophyllum, Haplolasma, Siphonophyllia, Aulokoninckophyllum, Semenoffia, Kizilia, Melanophyllidium, Palaeosmilia, Lonsdaleia, Nemistium et Palastraea (P. cf. regia et P. cf. carbonaria). La présence de ces trois derniers genres est caractéristique de la zone à coraux RC8 [4,15], qui correspond au Warnantien supérieur de la Belgique (équivalent à l'Étage brigantien en Angleterre). Nombre des espèces qui composent cette riche faune corallienne n'ont jamais été décrites et ne sont pas connues en dehors de la Montagne noire [1]. La présence de Janischewskina (détermination par D. Vachard) confirme l'appartenance des assemblages de foraminifères à la sous-zone Cf6δ, qui correspond également au Warnantien supérieur–Brigantien. L'attribution de tous les calcaires de la formation à la zone RC8 leur confère, par conséquent, un âge plus jeune, puisqu'ils étaient considérés par Vachard [18], d'après les foraminifères, comme essentiellement « V3b », c'est-à-dire d'âge Warnantien inférieur (étage Asbien en Angleterre) et, dans quelques affleurements seulement, comme « V3c » (Warnantien supérieur–Brigantien).
2.3 La formation du roc de Murviel
2.3.1 Lithostratigraphie et sédimentologie
La formation du roc de Murviel (Figs. 2 et 3) est composée de calcaires bioclastiques et construits, bruns rougeâtres à très foncés, plus ou moins argileux, très riches en coraux et en productidés. Elle peut renfermer des intercalations argilo-gréseuses. Les calcaires construits sont des boundstones microbiens (microbialithes) riches en coraux et bryozoaires, avec lesquels ils forment des biostromes pouvant atteindre 2 m d'épaisseur ou de petits biohermes de quelques mètres d'épaisseur. Dans le stratotype (roc de Murviel), la formation commence par une brèche sédimentaire à éléments de calcaires remaniés de la formation de Roque Redonde, qui comblent les irrégularités du paléokarst développé au sommet de celle-ci. Elle se poursuit par des biostromes microbiens riches en coraux, alternant avec des niveaux calco-argileux qui sont très mal exposés. Son épaisseur y est d'au moins 25 m. À La Serre, où elle affleure 400 m à l'est de la ferme de la Rouquette, son épaisseur a été estimée à 50 mètres, mais n'a pas pu être mesurée précisément, en raison de la mauvaise qualité de la coupe.
La formation du roc de Murviel est recouverte en concordance par des sédiments siliciclastiques généralement gréseux et renfermant des restes de plantes, qui mettent fin à la sédimentation carbonatée carbonifère dans la Montagne noire.
2.3.2 Biostratigraphie
Les coraux sont abondants et diversifiés dans la formation, fréquemment en position de vie et enchâssés dans les microbialithes, avec lesquelles ils montrent une croissance parallèle. Les espèces les plus communes appartiennent aux genres Axophyllum, Kizillia, Lonsdaleia, Actinocyathus et à un genre colonial non décrit d'hétérocoralliaire ; les autres appartiennent aux genres Palaeosmilia, Palastraea, Lithostrotion, Siphonodendron, Diphyphyllum, Corwenia, Clisiophyllum, Dibunophyllum, Haplolasma et Gangamophyllum. La plupart de ces genres sont déjà présents dans la formation de Roque Redonde, mais nombre de leurs espèces sont distinctes et présentent des spécialisations qui ne sont pas connues dans le Viséen et qui permettent de les considérer comme un assemblage faunistique plus jeune que ceux de la zone RC8 ( « zone RC9 »).
Tous les coraux qui ont été décrits par Perret et Semenoff-Tian-Chansky [13] dans les Calcaires d'Ardengost (Pyrénées centrales), et notamment l'hétérocoralliaire colonial, qui a été attribué avec doute, par ces auteurs, à une espèce coloniale de tétracoralliaire ( ?Lithostrotion cf. tareense) sont présents ici. Ces calcaires ont été datés de la zone E2 du Serpukhovien [12,14] sur la base des microflores algaires et de foraminifères. Ces faits conduisent à considérer la faune corallienne de la formation de roc de Murviel comme contemporaine de celle des calcaires d'Ardengost. Cet âge Serpukhovien est confirmé par la présence de Biseriella parva (détermination par Vachard), qui indique la zone Cf7.
Semenoff-Tian-Chansky et Ovtracht [17] ont décrit des coraux dans des calcaires à Lanet (massif du Mouthoumet, hautes Corbières), qui les ont conduits à dater ces calcaires du sommet du Viséen. Ces coraux, d'assemblage identique à celui de la formation du roc de Murviel, permettent de réattribuer le Calcaire de Lanet au Serpukhovien (Fig. 3).
3 Interprétation et conclusion
Les calcaires des formations de Roque Redonde et du roc de Murviel sont respectivement constitués de bioconstructions microbiennes biohermales et biostromales-biohermales.
Ces constructions se sont développées sur une plate-forme dominée par une sédimentation siliciclastique (principalement pélitique), qui se marque de façon très sensible au sein de la formation du roc de Murviel, dans laquelle peuvent s'intercaler des niveaux argilo-gréseux.
Dans la coupe du roc de Murviel, qui expose la coupe la plus complète, le développement de la phase de construction (formation de Roque Redonde) sur des calcaires graveleux, puis bioclastiques, surmontant directement les « calcaires à colonnes » peut être interprété comme correspondant à une phase transgressive d'âge Warnantien supérieur (la « séquence 10 » de Hance et al. [10]). Le recouvrement de certains biohermes par des pélites avant la fin du Viséen (Pascales) traduit leur envasement, au moins partiel, peut-être à la suite d'une remontée eustatique trop rapide. L'émersion responsable de la karstification du sommet de la formation de Roque Redonde, suivie par le dépôt des sédiments de la formation du Roc de Murviel, traduisent respectivement une chute du niveau marin, qui peut être corrélée avec le bas-niveau mis en évidence à la limite Viséen–Serpukhovien en Angleterre [16], puis une nouvelle phase transgressive, d'âge Serpukhovien.
Le recouvrement de la formation du roc de Murviel par des sédiments siliciclastiques, souvent gréseux, à restes de plantes, pourrait correspondre à un épisode régressif, en relation avec la tectonogenèse varisque.
Par conséquent, ce n'est que pendant ou après cette dernière phase, c'est-à-dire à la fin du Serpukhovien ou au début du Bashkirien et non pas à la fin du Viséen, comme considéré précédemment, que les édifices ont glissé dans le bassin sous forme d'olistolithes ou ont été repris dans les nappes.
Remerciements
Les auteurs remercient M.-F. Perret (Toulouse), H.-G. Herbig (Cologne, Allemagne), F. Neuweiler (Liège, Belgique/Göttingen, Allemagne) et E. Minwegen (Cologne, Allemagne) pour l'aide apportée sur le terrain ou lors de discussions, ainsi que D. Vachard pour ses déterminations de foraminifères. Cette recherche a été financée en partie pour l'un des auteurs (M.A.) par le fonds He 1610/11 de la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG).