Abridged English version
1 Introduction
Our analyses are based on well and seismic data and combined with surface outcrop mapping in northeastern Tunisia. The study zone includes the plain of Kairouan–Sahel and the eastern segment of the north–south fold axis. The north–south axis is a major structural lineament that separates during geologic times two independent domains filled differently, the central Tunisia Atlas [3] and the Sahel block [1,2,4,5,13,14]. The Sahel is a plain domain with cropping series of Late Miocene–Quaternary. In subsurface, it seems to be a young continental margin [7]. To the northwest, the zone is dominated by the Bou Dabbous–Ousselat range made essentially by Eocene series [9]. It corresponds to a deep and subsident domain during this time [9]. To the east, the zone is limited by the Mediterranean Sea.
In this part of Tunisia, the Zaghouan thrust fault is still considered until now as the most eastward thrust front of the Atlas belt range. This interpretation, which prevailed for long time, is only based on outcrop data. The Zaghouan fault [3,13] shows a general decollement level on Triassic evaporites.
2 Major results
This recently-discovered thrust front seems to occur on a weakness tectonic zone, materialized by north–south to NNE–SSW (Fig. 1) listric (Fig. 2) flower faults anchored on the pre-Triassic basement (Fig. 3). The thrust front is also coupled to diapiric structures intruded along the inherited faults (Fig. 4).
In the northern part of the study area, the front thrust is expressed by a large anticline, limited by a thrust listric fault (Fig. 2). The thrust front, in the Draa Souatir north anticline, shows back-thrusting faults to the west, sealed by the Oligocene (Fig. 2). This indicates a pre-existing reverse faulting and thrusting in pre-Oligocene times. On the other hand, we note increasing thickness of Late Eocene–Oligocene series toward the eastern border of the thrust fault F1 (Fig. 2). This is in relation to a synsedimentary activity of these faults during this time, with synsedimentary thrusting creating fore deep basin to the east. This configuration was essentially acquired during Late Eocene, corresponding to the Pyrenean folding phase.
To the south, the thrust front is complicated by Triassic diapirism (Fig. 3). In fact, the Draa Souatir–Kondar eastward-verging anticline is intruded by an asymmetrical diapir. The anticline is thrusted on the eastern fore deep basin, which is a quite-subsident realm (Fig. 3). To the east, the anticline is thrusted by anchored subvertical faults, with decollement on the Triassic level (Fig. 3).
The thrust fault continues to the south, becoming highly complicated by thrust fault structures on the western edge of the Ktifa north anticline (Fig. 4) with imbricated strata that appear to be thrust northeastward. This decollement and structural stacking is localized on a weak salt zone, with a decollement level on Triassic evaporites. To the east, the diapiric structure is thrusted on the eastern fore deep basin of Kelbia (Fig. 4). Deformation is particularly intense in this fault zone.
In the northern part of this thrust, were recognized important thrusts in the Hammam Zriba [9] locality (Fig. 1b) and west of Enfidha (Fig. 1b) [8,10]. Thrusting was also recognized in the north–south axis [12], south of the Chérichira–Kondar thrust.
The comparison of the horizontal throw of the Zaghouan thrust fault (10 km) [6] with that of Chérichira–Kondar thrust, which varies from 1 to 4 km from north to south, suggests that the Zaghouan thrust is the prominent thrust. So, we consider that the thrust front of Chérichira–Kondar is an accommodation zone of the compressional deformation and thrusting in the front of the Zaghouan thrust.
3 Conclusions
We have identified a new thrust front of the Atlasic belt range of Tunisia; we propose to name it ‘thrust of Chérichira–Kondar’. This thrust front is well expressed by back thrusting and thrust anticline structures injected by Triassic rocks that facilitate decollement and thrusting.
So the thrust front of the Atlas is to be translated to the east orthogonally to that of Zaghouan. The newly highlighted thrust front is parallel to the previous thrust front. The zone bounding this front to east is a fore deep basin since Late Eocene, period during which we think that the inherited fault of Chérichira–Kondar started as a blind thrust.
1 Introduction
L'accident de Zaghouan est considéré depuis plus d'un demi-siècle comme étant le front de chevauchement le plus oriental de l'Atlas tunisien [4,5,9,13,14]. Cette interprétation est uniquement fondée sur des données cartographiques de terrain. Cet accident relie les Jebels Ressas, au nord-est, et Zaress, au sud, suivant une direction NNE–SSW. Il est injecté d'une lame de Trias salifère. Au niveau de la ville de Zaghouan, le chevauchement implique le Jurassique et l'Éocène [5,13].
À l'est de cette limite paléogéographique [5,13] et tectonique se trouve la plaine orientale de Tunisie, considérée comme faisant partie d'un domaine stable résultant de l'évolution structurale tertiaire de la Tunisie [5,13]. Des travaux de géophysique [2,7] dans la partie méridionale de la plaine du Sahel ont montré que le Sahel se présente comme un domaine structural, compliqué notamment par le diapirisme triasique.
Dans ce travail, nous avons analysé des profils sismiques récents, acquis et traités en 1999. Les profils coïncident avec des lignes tirées sur la bordure orientale de la chaîne atlasique à l'est du J. Ousselat-Bou Dabbous (Fig. 1) et dans la partie nord de la plaine de Kairouan–Sahel.
Nous présentons l'analyse et les résultats de trois lignes sismiques interprétées : L1, L2, L3 (Fig. 1b), les profils L1 et L2 étant convertis en profondeur.
2 Présentation et analyse des lignes sismiques
2.1 Ligne L1
Le profil montre une importante structure anticlinale (Fig. 2) : il s'agit de l'anticlinal nord de Draa Souatir. Ce dernier est limité par deux failles chevauchantes, l'une vers l'est (F1), l'autre vers l'ouest (F2 : rétro-chevauchement), à allure listrique en profondeur, présentant une configuration antithétique–synthétique (Fig. 2). La faille F1 représente le chevauchement de style alpin le plus oriental de la Tunisie.
Le profil montre, au niveau de l'anticlinal, une zone sourde, à réflecteurs sismiques chaotiques, indiquant une concentration de la déformation sur la retombée est de la faille F1 (Fig. 2). Le dispositif montre aussi des rétro-chevauchements, dont quelques-uns sont scellés dans l'Oligocène (Fig. 2).
La faille F2, dont le jeu correspond à un rétro-chevauchement, est scellée par l'Oligocène (Fig. 2). Son rejet inverse diminue du bas vers le haut (Fig. 2) ; il est déterminé comme post-Yprésien, syn-Lutétien et ante-Oligocène. Elle semble par ailleurs jouer le rôle de flexure syn-oligocène, bien exprimé par l'épaississement des réflecteurs de l'Oligocène (Fig. 2). L'ensemble de ces constatations plaide en faveur de l'existence d'une tectonique synsédimentaire paléogène de type transpressif.
Par ailleurs, le dispositif antiforme chevauchant de la structure nord de Draa Souatir est affecté par une faille F3, qui effondre sa partie axiale (Fig. 2). Le jeu normal de F3, délimitant d'anciens horsts et grabens, est synsédimentaire, depuis au moins le Crétacé supérieur. En effet, les séries du Crétacé terminal–Paléogène sont basculées vers l'est (Fig. 2), et leurs épaisseurs augmentent dans la direction de l'est. Cette géométrie signifie qu'au cours du Paléogène, la faille F3 limitait un demi-graben basculé vers l'est.
Les variations des épaisseurs des réflecteurs des séries, de part et d'autre de ce dispositif chevauchant, attestent son activité synsédimentaire au cours du Paléogène.
2.2 Ligne L2
La ligne sismique L2 (Fig. 1) parallèle à la ligne L1, à une vingtaine de kilomètres au sud, permet de suivre la continuité du chevauchement vers le sud. Elle montre un dispositif antiforme dissymétrique et chevauchant, injecté de matériel salifère triasique ; cette structure coïncide à l'affleurement avec l'anticlinal de Draa Souatir–Kondar (Fig. 3). Sur le profil, cette dissymétrie est liée à un rétro-chevauchement vers l'ouest, au niveau de Draa Souatir (Fig. 3).
Cette structure est bordée par deux gouttières synclinales subsidentes depuis le Jurassique. Trois failles chevauchantes sont exprimées (Fig. 3), la plus orientale constituant le front de chevauchement. Les deux failles à l'ouest délimitent une lame de Trias injecté et fonctionnent comme des niveaux de décollement (Fig. 3).
2.3 Ligne L3
À une quinzaine de kilomètres au sud de L2, elle recoupe l'anticlinal de Ktifa nord. Celui-ci correspond à un dispositif antiforme dissymétrique, à cœur triasique dédoublé, dilacéré par un ensemble de failles inverses superposées, assurant son épaississement et son chevauchement sur les séries très peu fracturées du bassin de Kelbia (Fig. 4). Au toit de cette structure, le forage pétrolier Kfb n'a pas rencontré les séries du Paléogène–Néogène, très bien développées par ailleurs dans le synclinal de Kelbia.
Les structures de Ktifa et de Kelbia sont séparées par un couloir tectonique injecté par du matériel salifère triasique (Fig. 4).
Vers l'ouest, le dispositif antiforme se résout en un complexe de surfaces de cisaillement à vergence est, répliques d'un décollement par faille sur le Trias (Fig. 4). Ce complexe induit des dédoublements de séries, reconnus dans le forage pétrolier KFb.
3 Interprétations et discussion
L'analyse des lignes sismiques présentées ci-dessus met en évidence un front de chevauchement typique à l'est de l'axe nord–sud. Ce front correspond vraisemblablement à une zone de discontinuités profondes matérialisées par des failles chevauchantes enracinées dans le substratum ante-triasique, auxquelles leur géométrie curviplanaire a conféré un rôle de butoir tectonique, sur lequel s'est écrasée une portion de la chaîne alpine. Il implique le Trias salifère comme niveau de décollement. Ces anciennes structures, soumises aux contraintes compressives majeures, de direction NW–SE, notamment celles du Miocène supérieur (phase atlasique), ont subi des déformations plicatives et cassantes, marquées par des chevauchements à vergence est, des rétro-chevauchements à vergence ouest, des structures d'éjection et des plis–failles. Par ailleurs, la mise en corrélation des profils permet de déterminer un gradient de déformation croissante du nord vers le sud, matérialisé par des dédoublements et un écaillage au niveau de Ktifa, dans la partie méridionale du front.
Au nord, la zone de Kondar–Souatir correspond, au moins depuis le Paléogène, à une zone d'inversion tectonique, exprimée par le scellement de failles inverses par les séries paléogènes. Par ailleurs, à partir de l'anticlinal nord de Draa Souatir et en direction de l'est, des variations des épaisseurs des séries de l'Eocène supérieur–Oligocène témoignent de l'activité synsédimentaire de la faille bordière chevauchante F1 (Fig. 2), limitant une structure haute vers l'ouest et un bassin fonctionnant en bassin flexural vers l'est. Cette structure synsédimentaire, bien exprimée au cours de l'Eocène supérieur, fossilise la phase de plissement pyrénéenne.
Ainsi, le front de chevauchement mis en évidence rappelle bien le style du chevauchement du Zaghouan, à savoir décollement sur le Trias et structures écaillées. De direction NNE–SSW à nord–sud, sub-parallèle à l'accident de Zaghouan, il constitue le prolongement, vers le NNE, de la faille de Chérichira et prend naissance au niveau du nœud tectonique de même nom [1,3]. Au sud, le front passe par Ktifa et longe Draa Souatir, tout en bordant vers l'ouest la sebkha de Kelbia, en remontant au nord dans la plaine d'Enfidha (Fig. 1b). Il est interrompu au nord par le fossé d'effondrement de Bou Ficha (Fig. 1b). Nous proposons de le nommer chevauchement de Chérichira–Kondar.
Ce chevauchement constitue à l'affleurement le dernier de la chaîne atlasique en direction de l'est.
Il nous semble opportun de rappeler qu'une interprétation faisant valoir une tectonique de chevauchement a été évoquée à l'affleurement, dans la région de Hammam Zriba, plus au nord, dans la continuité de l'accident de Chérichira–Kondar, pour expliquer le contact entre les calcaires campaniens et jurassiques [11]. Dans la même région, des contacts chevauchants ont été signalés entre les assises argileuses de l'Éocène supérieur, surmontant les grès oligocènes [8]. Ces contacts pourraient se raccorder en profondeur à l'accident de Chérichira–Kondar.
Plus au sud, au niveau de l'axe nord–sud, une tectonique de chevauchement a été signalée, dans laquelle le niveau de décollement est assuré par le Trias salifère [12]. De même, un contact chevauchant a été reconnu sur la retombée est du Jebel Chérahil (Fig. 1b) le long de son flanc oriental [14].
Par ailleurs, les profils présentés et interprétés dans cette note indiquent un héritage structural, exprimé par des variations des épaisseurs des séries, particulièrement celles du Crétacé–Paléogène. En effet, la ligne géosismique L2 (Fig. 3) montre une tectonique extensive le long de la faille de Kondar, matérialisée par deux blocs basculés : Sbikha-Draa Souatir à l'ouest et Kondar-Hergla à l'est. Dans ces blocs, les séries du Crétacé supérieur–Paléogène se déposent en éventail, avec migration spatiale de la subsidence (Fig. 3). Cette tectonique extensive faciliterait aussi la migration de la série salifère le long de la faille de Kondar. Ces constatations concordent avec les données de surface, obtenues à l'ouest d'Enfidha (Fig. 1), où a été également mise en évidence une tectonique synsédimentaire du Crétacé inférieur, de part et d'autre du même couloir nord–sud, accompagnée par des manifestations triasiques précoces [10].
Les rejets verticaux inverses de certaines failles de ce dispositif chevauchant, visibles en sismique, sont de l'ordre de 2000 m. Mais les valeurs réelles de ces rejets sont plus importantes, compte tenu de leurs anciens jeux normaux, annulés et inversés. Cette inversion tectonique est matérialisée par les rejeux inverses, l'expulsion verticale et le déjètement à déversement qui accompagnent la déformation transpressive et la compensation du raccourcissement horizontal.
4 Relations possibles avec le couloir tectonique de Chérichira–Monastir et le chevauchement de Zaghouan
L'identification des horizons ainsi que de leurs rejets permet d'estimer la flèche de déplacement horizontal à 3–4 km au sud, au niveau de Ktifa, et à 1 km au maximum, au nord de Draa Souatir. Ces valeurs indiquent un accroissement de la flèche de déplacement horizontal et de la déformation transpressive vers le SSW, sous l'influence du mouvement décrochant dextre du méga-couloir tectonique de Chérichira–Monastir (Fig. 1b), assorti de blocage du cisaillement au toit des lames du Trias salifère et de dédoublement de séries, dans la zone de Ktifa (Fig. 4).
Par ailleurs, les valeurs de déplacement horizontal sont inférieures à celles du chevauchement de Zaghouan, de l'ordre de la dizaine de kilomètres [6]. Ceci nous amène à considérer que le chevauchement de Chérichira–Kondar pourrait correspondre à un chevauchement secondaire par rapport au chevauchement principal de Zaghouan et se grefferait sur ce dernier en profondeur. Il marquerait une zone d'amortissement de la déformation au front du chevauchement principal de Zaghouan. Ce mégatiroir tectonique, greffé sur le couloir tectonique de Chérichira–Monastir, témoigne, dans sa partie nord, au niveau de Draa Souatir, d'une déformation compressive, exprimée essentiellement par flexion, rebroussement et crochonnement des niveaux réflecteurs.
5 Conclusions générales
Le nouveau front de chevauchement de la chaîne atlasique de Tunisie est localisé à une quarantaine de kilomètres plus à l'est de l'accident de Zaghouan, qui était jusqu'à présent admis comme front de cette chaîne. Il s'agit d'un accident de direction NNE–SSW à nord–sud, reliant Chérichira au sud, à Enfidha au nord, sur plus de 100 km. Nous préconisons de l'appeler chevauchement de Chérichira–Kondar. Il représente une zone d'amortissement de la déformation au front du chevauchement principal de Zaghouan, en avant de la dorsale tunisienne. Il est limité, au sud, par le décrochement dextre de Chérichira–Monastir et, au nord, par le graben de Bou Ficha. Cette faille constitue donc un trait structural et paléogéographique majeur dans la géologie de la Tunisie nord-orientale.
Acknowledgments
Les auteurs remercient vivement les rapporteurs pour leurs corrections et suggestions qui ont permis d'améliorer la qualité de la note, entre autres J.-C. Horrenberger, ainsi que M. Soussi pour ses remarques constructives et pertinentes, qui ont enrichi la note.