Abridged English version
The Tadla basin is a vast synclinal located in central Morocco. It spreads in ENE–WSW direction between the phosphatic plateau and the High Atlas of Béni-Mellal (Fig. 1). This basin was the seat of a large number of oil and water prospecting studies. The purpose of the present work is to characterize the structure of this basin using gravity method. Interpretation of the available gravity data will be given. Geologically, this basin is filled with a thick sedimentary series resting on a Palaeozoic basement [1]. This series is constituted from bottom to top by (1) a Triassic to Jurassic formation that outcrops in the High Atlas at the southeastern part of the study area, (2) a Cretaceous to Eocene marine sedimentary sequence, and (3) a Neogene to Quaternary unconformable cover formed by continental detritic sediments.
The available gravity data used in this study is a Bouguer anomaly map () published by the geological survey of Morocco [13] (Fig. 2). In order to better achieve the interpretation of these data, a residual map was computed (Fig. 3) and its filtering in the frequency domain has been carried out. Thus, the Fourier transform was used to calculate the horizontal gradient and upward continuation of the gravity signal. These procedures have been undertaken in order to delineate the contacts between blocks of contrasted densities and to analyse their dip. Indeed, these contacts correspond to the maxima of the horizontal gradient [3,5,6,9,11,12] and the examination of these maxima for different upward continuation levels gives information on the contact's dip [2,11].
The analysis of the residual anomaly map reveals the existence of several gravity anomalies that are well correlated with the geological and structural features of the study area. In the northwestern part of this area, the plateau of phosphates is characterized by low variations of the residual anomaly. This can be explained by the sub-tabular character of the Meso-Cenozoic cover that constitutes the plateau. The negative anomalies (An4, An5, An7 and An8) that surround this domain may correspond to local thickenings of the sedimentary series, probably caused by depressions of the Palaeozoic basement. The positive anomalies Ap1, Ap2 and Ap5 coincide respectively with outcrops of the denser Hercynian basement in the old massifs of the Jebilet, the Rehamna, and central Morocco. The anomaly Ap4 is located in the western continuation of an anticlinal axis that begins in the central Morocco's massif (Fig. 1). This should correspond to a basement structural height that marks the northern border of the Tadla basin.
In the central part of the study area, the Tadla basin, represented by a dotted background, is characterized by a southward progressive diminution of residual anomaly values. This can be explained by the increase of the sedimentary series thickness toward the High Atlas border, as testified by the drilling data (Fig. 4) [4,14].
The superposition of the horizontal gradient maxima established from the residual gravity map and from its upward continuations at different altitudes allows us to determine the different contacts and to give information about their dip (Fig. 5). The statistical treatment of lineaments interpreted as faults shows three families of directions: N60, N95, and N130 (Fig. 6). The analysis of the geological map of the study area (Fig. 1) and the geological map of Morocco around the Tadla basin allows us to realize that, except the direction N95 that exists very locally, the first direction (N60) and the last one (N130) are largely known in this region.
Fig. 6 shows that the Tadla basin (dotted background) appears to be essentially affected by the N60 family of accidents. However, in its southern half located at the south of the Oum R'Bia River, the N130 faults become predominant. This structuring difference between the two halves of the Tadla basin may explain the groundwater salinity distinction observed on both sides of the Oum R'Bia River. Indeed, the salinity data show that the groundwater mineralization is lower at the south of this river.
Moreover, the elaborated structural map of the study area shows a faults system formed by an important network of accidents organized into two main families: N60 and N130 (Fig. 6). This document is very useful for the future groundwater research in the Tadla basin.
1 Introduction
Le bassin de Tadla représente une vaste aire agricole où les eaux souterraines sont soumises à une exploitation intense, afin de subvenir aux besoins de plus en plus accrus de l'irrigation, de l'usage industriel des sucreries installées dans la région et de l'usage domestique de la population. Lors des deux dernières décennies, la succession de plusieurs années de sécheresse sous un climat semi-aride a aggravé la situation, en provoquant un accroissement de l'activité de pompage des eaux souterraines. Ceci a induit une baisse du niveau piézométrique et, par conséquent, un assèchement de nombreux points d'eaux habituels. Les eaux souterraines sont devenues ainsi de plus en plus rares et beaucoup de forages de reconnaissance de ces eaux se sont révélés négatifs, à cause de l'insuffisance des connaissances de l'hydrogéologie régionale.
Dans ces conditions, une intensification des investigations sur l'ensemble du bassin, notamment par les méthodes indirectes telles que les techniques géophysiques, devient nécessaire, en vue de définir les zones productives non encore identifiées.
C'est dans ce contexte que nous avons entrepris la présente étude, qui est basée sur le traitement et l'interprétation des données gravimétriques. Son principal objectif est de mettre en évidence des éléments structuraux susceptibles de contribuer à une meilleure connaissance de l'hydrogéologie de la zone et, par conséquent, de rationaliser les futures campagnes de prospection hydrogéologique en les orientant vers les zones les plus favorables.
2 Contexte géologique
La plaine de Tadla est une vaste dépression de direction ENE–WSW, qui s'étend entre le plateau des phosphates, au nord, et la chaîne du Haut Atlas, au sud, sur une longueur de 125 km et une largeur moyenne de 50 km. Elle est limitée, à l'est, par les reliefs des pays de Zaian, et se prolonge, vers l'ouest, par la plaine de la Bahira (Fig. 1).
De point de vue géologique, le bassin de Tadla se rattache à la Meseta marocaine méridionale et, plus particulièrement, à la zone synclinale « Bahira–Tadla ». Il se présente comme une cuvette synclinale remplie par une série sédimentaire dont l'âge s'étend du Permo-Trias au Quaternaire. Dans l'ensemble du bassin, les recouvrements quaternaires masquent totalement les terrains sous-jacents, si bien que les informations géologiques disponibles [1,14] proviennent de quelques forages profonds. Les résultats de ces forages révèlent l'existence de quatre grands ensembles lithostratigraphiques :
- – un socle paléozoïque épais, du Cambrien au Carbonifère ;
- – des formations triasiques et jurassiques, localisées sur la bordure méridionale du bassin ;
- – des dépôts transgressifs marins crétacés à éocènes ;
- – un comblement néogène et quaternaire discordant, principalement continental.
De point de vue hydrogéologique, on distingue deux nappes principales [8] :
- – (1) la nappe phréatique, qui chemine dans un complexe plio-quaternaire composé essentiellement de calcaires francs, de marno-calcaires et d'argiles. Dans cette nappe, l'écoulement des eaux souterraines s'effectue globalement du nord-est vers le sud-ouest. Le faciès chimique de l'eau est de type chloruré sodique, avec des teneurs en résidu sec pratiquement toujours supérieures à 2 g l−1 ;
- – (2) la nappe profonde, logée dans les calcaires et calcaires dolomitiques du Turonien. Son mur est constitué par les marnes, les argiles et les anhydrites du Cénomanien et infra-cénomanien. Les eaux de cette nappe ont un faciès bicarbonaté calco-magnésien et sont caractérisées par un résidu sec compris entre 0,5 et 2 g l−1. Cette nappe est, par endroits, exploitée pour renforcer l'irrigation et l'alimentation en eau potable de certaines agglomérations urbaines de la plaine de Tadla.
3 Données et méthodes
Lors de cette étude, nous avons utilisé les données gravimétriques disponibles publiées par le service géologique du Maroc [13] sous forme d'une carte de l'anomalie de Bouguer (), afin d'en proposer une nouvelle interprétation basée sur l'analyse des contacts géologiques. La carte du bassin de Tadla a été établie à partir de 3312 points de mesure, réalisés en 1961 par la Compagnie de prospection géophysique nord-africaine (CPGNA) pour le compte de la direction des mines et de la géologie du Maroc (Fig. 2). Comme on peut le constater, la carte de l'anomalie de Bouguer est affectée par un fort gradient régional. Nous avons commencé par soustraire ce gradient et calculer une carte de l'anomalie résiduelle (Fig. 3). Afin de mieux exploiter ces données et de faire ressortir de nouveaux éléments par rapport à l'information fournie par la carte résiduelle, nous leur avons appliqué une série de traitements mathématiques. Il s'agit d'opérations de filtrage du signal gravimétrique dans le domaine des fréquences. L'intérêt de la transformation des cartes gravimétriques a été évoqué depuis longtemps et plusieurs méthodes de calcul ont été développées [10]. Le succès de l'application de ce traitement a été démontré par de nombreuses études [7,9,11].
ous avons commencé par calculer le gradient horizontal de la carte de l'anomalie résiduelle. Ce traitement est très utile pour la localisation des contacts géologiques, du fait que la limite entre deux blocs de densités différentes correspond au maxima de ce gradient [3,5,6,9,11,12]. En effet, au-dessus d'un contact vertical entre des roches de densités différentes, le champ gravimétrique se manifeste par un changement de niveau marqué par le passage des valeurs faibles au-dessus des roches de faible densité, vers des valeurs plus élevées à l'aplomb des roches de forte densité. Le point d'inflexion marquant le passage entre les deux zones se situe à la verticale du contact entre les deux types de roches. Cette caractéristique des anomalies gravimétriques peut être utilisée pour localiser les changements abrupts de densité. Les maxima locaux des gradients horizontaux constituent des rides étroites au-dessus des contacts géologiques marqués par des contrastes de densité.
Par ailleurs, afin d'analyser les pendages des contacts et des structures mis en évidence, nous avons procédé au calcul du prolongement vers le haut de la carte de l'anomalie résiduelle à plusieurs altitudes (0,5, 1, 2 et 4 km). Les maxima locaux du gradient horizontal ont ensuite été localisés pour chaque niveau. La migration de ces maxima, lorsque l'altitude du prolongement augmente, indique le sens du pendage. Pour une structure verticale, l'ensemble des maxima se superposent [2,11].
4 Résultats
L'examen de la carte d'anomalie résiduelle révèle l'existence de plusieurs anomalies positives (Ap1 à Ap7) soulignées par les traits épais discontinus et négatives (An1 à An8) (Fig. 3). Ces anomalies sont bien corrélées aux grands traits structuraux du secteur étudié. Leur confrontation aux données géologiques nous permet de faire les observations suivantes :
- – au nord-ouest de la zone d'étude, le plateau des phosphates est caractérisé par un relief gravimétrique assez calme, avec de faibles variations de l'anomalie résiduelle (entre −2 et ). Comme son nom l'indique, ce domaine est formé par une couverture méso-cénozoïque sub-tabulaire, ce qui explique les faibles variations du champ de pesanteur constatées. Le plateau des phosphates est toutefois encadré par de petites anomalies négatives (An4, An5, An7 et An8), qu'on pourrait expliquer par des épaississements locaux du remplissage sédimentaire, qui seraient engendrés par des dépressions du toit du socle paléozoïque ;
- – les anomalies positives Ap1, Ap2 et Ap5 coïncident respectivement avec des affleurements du socle hercynien (plus dense) dans les massifs anciens des Jebilets, des Rehamna et du Maroc central ;
- – l'anomalie Ap4, qui se situe dans le prolongement occidental d'un axe anticlinal qui commence dans le massif du Maroc central (Fig. 1), devrait correspondre à une ride de socle, qui marque la limite nord du bassin de Tadla ;
- – au centre de la carte, le bassin de Tadla, représenté par une trame en pointillés, est caractérisé par une diminution progressive des valeurs de l'anomalie résiduelle du nord vers le sud. Ceci reflète l'augmentation de l'épaisseur de la couverture sédimentaire lorsqu'on se rapproche de la bordure du Haut Atlas. Ce résultat corrobore ceux des études géologiques et hydrogéologiques antérieures, qui concluent que le système aquifère du bassin de Tadla s'épaissit du nord vers le sud, comme le montre la Fig. 4 [4,14]. L'alignement des trois anomalies négatives An1, An2 et An3, qui se situent près de la limite méridionale du bassin, matérialise l'axe de celui-ci, c'est-à-dire la zone où la série sédimentaire est la plus épaisse ;
- – l'axe gravimétrique positif Ap3, qui relie les anomalies Ap1 et Ap2, correspondrait à une zone de faible profondeur du socle, qui devrait jouer un rôle important sur le plan hydrogéologique. En effet, cette ride de socle, allongée transversalement au bassin, représenterait une barrière, qui devrait engendrer une compartimentation du système aquifère de Tadla et dont la ligne de crête devrait matérialiser une ligne de partage des eaux souterraines ;
- – au sud-est du secteur étudié, le domaine du Haut Atlas, qui nous intéresse moins dans la présente étude, montre un relief gravimétrique assez agité, du fait des hétérogénéités de densité provoquées par la déformation intense qui affecte la série jurassique.
Par ailleurs, la superposition des maxima du gradient horizontal déterminés sur la carte de l'anomalie résiduelle et sur ses prolongements vers le haut à différentes altitudes permet de déterminer les différents contacts et de mettre en évidence leur pendage (Fig. 5). La représentation sous forme de rosace des linéaments, interprétés comme des failles, montre que ces derniers sont organisés en trois familles, de directions N60, N95 et N130 (Fig. 6). L'analyse de la carte géologique de la zone d'étude (Fig. 1) et celle du Maroc au 1/1 000 000 autour du bassin de Tadla permet de se rendre compte que, mise à part la direction N95, qui n'existe que très localement, la première direction (N60) et la dernière (N130) sont très largement représentées à l'échelle de la région. La plus importante est la N60, qui est la direction structurale majeure de la chaîne atlasique et aussi celle de l'allongement du bassin de Tadla, dont la géométrie a certes été façonnée par l'édification de cette chaîne.
Sur la Fig. 6, le bassin de Tadla apparaît essentiellement affecté par les accidents N60. La direction N130 prédomine dans sa moitié méridionale située au sud de l'oued Oum R'Bia. Par ailleurs, l'examen des données de la salinité des eaux souterraines (disponibles uniquement sur un secteur restreint au centre du bassin) révèle l'existence de deux domaines distincts, situés de part et d'autre de l'oued Oum R'Bia. En effet, la salinité des eaux est nettement plus élevée au nord de l'oued qu'au sud de celui-ci. Cette différence de minéralisation des eaux s'expliquerait par la prédominance, dans la moitié sud du bassin, des structures N130, qui faciliteraient le drainage des eaux souterraines depuis la chaîne montagneuse du Haut Atlas vers la partie méridionale du bassin, où se produisent une dilution, et donc une baisse de la salinité des eaux locales.
Signalons finalement que, dans le bassin de Tadla, la géologie de surface est complètement aveugle à cause du recouvrement quaternaire qui masque totalement toutes les structures et formations antérieures. La présente étude a permis de mettre en évidence un réseau de structures représentant des discontinuités lithologiques (failles, zones fissurées, contacts géologiques, etc.). De telles discontinuités constituent des zones de circulation préférentielles des eaux souterraines et représentent donc des cibles favorables à l'implantation des sondages de reconnaissance des ces eaux.
5 Conclusion
Au terme de ce travail, un schéma structural de la zone d'étude a été élaboré (Fig. 6). Celui-ci met en évidence le système de failles responsable de la structuration de cette zone. Il montre un important réseau de structures, organisé selon deux principales familles d'accidents de directions N60 et N130. Sur le plan hydrogéologique, la présente étude confirme l'épaississement, du nord vers le sud, du système aquifère de Tadla et permet d'expliquer le contraste de la salinité des eaux souterraines observé de part et d'autre de l'oued Oum R'Bia. Elle révèle également que ce système aquifère est compartimenté, du fait de l'existence d'une ride de socle nord–sud le partageant en deux domaines. Enfin, la carte structurale établie constitue un document de base susceptible d'aider au choix des sites d'implantation des sondages de reconnaissance des eaux souterraines.
Remerciements
Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet NATO (EST CLG 980288) entre l'université de Barcelone (Espagne) et l'université Cadi-Ayyad (Maroc) et de l'Action intégrée MA/02/45 liant l'université Paris-6 à celles d'Oujda et de Marrakech.