Entre les 40 millions de jeunes et d'adultes et le million de personnes âgées ayant perdu leur autonomie (dont la plupart pour des troubles mentaux), il existe un groupe de 15 à 20 millions de personnes vieillissantes potentiellement capables de mener une vie normale, de travailler, de vaquer à leurs occupations, mais qui présentent des infirmités initialement peu profondes, mais qui s'aggravent progressivement et les mettent en marge de la société, alors qu'avec quelques mesures simples et peu coûteuses, elles pourraient vivre normalement.
Mettre en lumière quelques unes de ces mesures est le but de ce document.
1 Dans le domaine de la mobilité
Il est indispensable que les personnes vieillissantes conservent une capacité de déplacement, de contact et de participation active à la vie sociale.
1.1 Transports en commun
1.1.1 Gares ferroviaires
1. Dans les gares, même récemment modernisées, il existe des escaliers et peu de plans inclinés. Il existe parfois des ascenseurs, mais ceux-ci sont souvent réservés aux personnes titulaires d'une carte d'handicapé, ce qui révèle une méconnaissance du problème des personnes vieillissantes.
Ainsi, dans les gares, les annonces sur panneaux lumineux sont en caractères si petits et si mal contrastés que les personnes vieillissantes sont souvent incapables de les lire, tandis que les annonces verbales sont incompréhensibles pour les personnes ayant des difficultés d'audition, c'est-à-dire plus de la moitié des hommes de plus de 70 ans. Il faudrait que la diction des annonceurs soit améliorée.
D'autre part, les délais entre l'annonce du quai de départ du train et son départ, théoriquement de vingt minutes, sont souvent beaucoup plus courts, d'où de graves difficultés pour les personnes marchant lentement. Un enregistrement automatique de ces délais permettrait de savoir s'ils sont respectés, ce qui est actuellement loin d'être toujours le cas.
Dans les lieux d'attente des gares, il n'y a pas de sièges réservés en priorité aux personnes âgées ; aussi, très souvent, des jeunes restent assis devant les octogénaires debout.
Les poussettes, les petits chariots, les valises à roulettes ont transformé l'existence après 65 ans. Or, ces engins sont inutilisables s'il y a des marches d'escaliers. La construction de tels plans inclinés en complément des escaliers est une mesure intermédiaire urgente. Contrairement à ce que l'on constate dans beaucoup de pays voisins, les plans inclinés sont rares en France dans les gares. Il faudrait que, dans les écoles d'architecture, des cours explicitent les besoins et les difficultés des personnes vieillissantes.
1.1.2 Aéroports
Outre les remarques précédentes qui s'appliquent aux aéroports, signalons que rien n'indique, au moment de l'enregistrement, si l'avion va être accessible par un transbordeur ou s'il faudra descendre un escalier, prendre un bus et remonter l'échelle d'accès à l'avion. Dans ce dernier cas, comme il est impossible à une personne âgée de porter un paquet, si léger fût-il, lors de ces déplacements, celle-ci est, soit amenée à demander systématiquement un fauteuil à roulettes qui serait inutile dans la plupart des cas, soit à se trouver confrontée à de grandes difficultés. Cette absence d'information induit donc des dépenses et des désagréments qu'il serait facile d'éviter.
1.1.3 Stations de métro
Nombre de personnes âgées sont obligés de renoncer au métro, malgré sa commodité, du fait des innombrables escaliers à monter ou à descendre et de l'absence d'un plan distribué par la RATP indiquant les stations équipées d'ascenseurs ou d'escaliers mécaniques et celles n'en disposant pas.
Il faudrait installer partout des plans inclinés et, aussi souvent que possible, des escaliers roulants. Paris est l'une des villes du monde où la proportion de stations équipées d'escaliers mécaniques (ou d'ascenseurs) est l'une des plus faibles. Même Gare de Lyon, qui est une des stations de métro les plus fréquentées, n'en a pas, ce qui oblige beaucoup de voyageurs avec bagages à prendre un taxi, ou à mendier l'aide d'un passant au pied de l'escalier, ce qui leur fait perdre leur dignité ou les amène à renoncer à voyager.
1.2 Domiciles et immeubles d'habitation
Deux endroits sont des pièges mortels ; chacun d'entre eux cause plusieurs milliers de morts par an : les escaliers, s'ils sont sans rampe, et les salles d'eau dont le sol n'est pas antidérapant, avec des douches ou des baignoires sans barre d'appui. Dans les deux cas, des frais très faibles pourraient éviter des chutes qui entraînent d'énormes dépenses pour la Sécurité sociale et de nombreux décès. Les architectes devraient les installer systématiquement, car hélas, même si l'on est jeune quand on emménage, on vieillit ensuite.
1.3 Jardins publics
Les bancs publics qui permettent des étapes de repos ne sont pas assez nombreux en ville. De plus, par souci d'esthétique, les bancs sont souvent dépourvus de dossier, ce qui supprime une possibilité de repos aux personnes âgées. Il n'y a pas de bancs avec accès prioritaire aux personnes âgées.
2 Difficultés d'ordre sensoriel
2.1 Auditoriums, théâtres, salles de concert ou de conférence
À l'étranger, par exemple aux Pays-Bas, la plupart de ces salles sont équipées comme des salles de congrès (pour la traduction simultanée) avec des écouteurs permettant le réglage du son. En tout, en France, il n'y aurait, paraît-il, qu'une douzaine de salles équipées ainsi en permanence (dont l'Opéra, la Comédie-Française, l'Académie de médecine, ou la Cité des sciences de La Villette). Il serait urgent de rendre aux malentendants le plaisir de ces réunions.
L'équipement simple d'un écran de type prompteur (comme à l'Opéra) au dessus de la scène dans les théâtres, rendrait compréhensible aux « moins bien entendant » les textes et leur permettrait l'accès aux propositions culturelles informatives ou distractives.
2.2 La télévision
Beaucoup de personnes de cette génération sont souvent à leur domicile, elles sont heureuses de regarder les programmes télévisés. Entendant moins bien, elles poussent d'abord le son au maximum au détriment des voisins, puis les années s'additionnant, elles ne peuvent plus qu'avoir accès aux films étrangers avec sous-titres. Il serait très utile pour eux que l'on systématise dans les productions de films français ou des séries télévisées un sous-titrage, accessible par une manœuvre sur la télécommande.
2.3 Panneaux indicateurs
Pour ceux qui voient moins, seuls les écrits noirs sur blanc ou blancs sur noir sont bien perçus. Les annonces sur fond coloré ou écrites en couleurs ne peuvent pas être facilement lues.
2.4 Ordinateurs
Il existe des systèmes, que l'on peut adapter aux ordinateurs, qui permettent de se servir aisément de ceux-ci par apprentissage de leur usage, sans la souris pour émettre et par lecteur audio pour recevoir. Une association de bénévoles expérimentés propose de venir à domicile former et équiper les malvoyants à ces aménagements, maintenant ainsi pour eux une vie de communication.
2.5 Audiodescription
Le développement de l'audiodescription est très attendu par les aveugles Il existe de nombreuses collections de livres enregistrés sur cassette (ou un autre dispositif). Existe-t-il un catalogue commun ? Si ces enregistrements étaient numérisés, il serait facile de les envoyer par Internet, ce qui les mettrait à la disposition de toute personne disposant d'un ordinateur. La numérisation systématique (BNF), l'accessibilité des sites Internet relèvent de l'actualité et sont aujourd'hui partiellement mis en œuvre. Il restera à en faciliter l'appropriation par les handicaps visuels. Les questions de protection de la propriété intellectuelle doivent être résolues pour faciliter cet axe.
Il faut insister sur les interactions entre les différents handicaps : accélération des déficits cognitifs par les handicaps auditifs et visuels ; risque de chute, limitation des capacités ambulatoires chez les malvoyants, frustration... . Le retard considérable qui existe en France dans ce domaine, par rapport à beaucoup d'autres pays de l'Union européenne et au Québec, tient à ce que les décideurs sont souvent des quinquagénaires qui mésestiment les problèmes des personnes âgées, tandis que ces derniers sont tenus à l'écart des processus de décision, comme si ces derniers étaient considérés incapables de contribuer utilement à l'élaboration des mesures qui les concernent. Il serait indispensable de remédier à cette situation.