1 Introduction
Limeum pterocarpum (L.) est une plante annuelle appartenant à la famille des Molluginaceae. Au Niger, elle est utilisée en médecine traditionnelle dans le traitement du paludisme et de l'hypertension artérielle. Selon des enquêtes ethno-botaniques réalisées par notre laboratoire [1], L. pterocarpum est actuellement l'une des plantes les plus utilisées dans la lutte contre le paludisme par les populations rurales. Des travaux antérieurs [2] menés sur cette plante avaient permis d'isoler le liméolide, un sesquiterpène de type drimane. Poursuivant notre étude sur le Limeum, nous présentons dans ce travail l'isolement et la caractérisation du d-pinitol, constituant isolé à partir des traitements successifs de l'extrait aqueux de la plante.
2 Matériel et méthodes
Les spectres RMN du proton, du carbone, COSY-45 et 1H–13C ont été enregistrés dans D2O à 300 et 75 MHz, sur un appareil Brucker AM 300 ; le spectre de masse a été enregistré en SM ESI.
2.1 Matériel végétal
La plante a été récoltée en août 2002 aux alentours de la ville de Niamey. Elle a été identifiée au département de biologie de la faculté des sciences de l'université Abdou Moumouni de Niame, où un échantillon d'herbier est déposé sous le numéro 3655.
2.2 Extraction et fractionnement
La plante entière a été séchée et broyée finement. La poudre sèche obtenue (300 g) a été extraite à l'eau par lixiviation. La solution aqueuse obtenue est d'abord extraite par le chlorure de méthylène, puis par l'acétate d'éthyle. La nouvelle phase aqueuse est évaporée à sec (12,24 g) et le résidu est repris avec du méthanol. La partie insoluble (6,24 g) est séparée de la solution méthanolique qui est, à son tour, évaporée à sec (6 g). Une chromatographie sur colonne de gel de silice, avec d'abord du chlorure de méthylène, puis avec des pourcentages croissants de méthanol au chlorure de méthylène, a permis d'isoler de cet extrait une poudre blanche, pesant 1,80 g.
3 Résultats et discussion
L'analyse des spectres RMN a fourni les données regroupées dans le Tableau 1.
Données RMN 1H et 13C du d-pinitol
Position | δ1H (ppm) | Multiplicité | Intensité | J (Hz) | δ 13C (ppm) |
2 | 3,91 | dd | 1H | 9,7 | 69,75 |
5 | 3,86 | dd | 1H | 2,7 ; 9,8 | 70,45 |
4 | 3,74 | t | 1H | 9,8 | 72,05 |
1 ou 6 | 4,10 | m | 2H | — | 71,55 ou 71,35 |
3 | 3,43 | t | 1H | 9,7 | 82,70 |
O–Me | 3,69 | s | 3H | - | 59,64 |
Ces valeurs sont comparables à celles déjà publiées [3–5] et correspondent au d-3-O-méthyl-chiro-inositol (C7H14O6), encore appelé d-pinitol 1, un « inositol ».
Le spectre de masse en SM ESI présente un pic intense à 217, correspondant à (M+Na), soit un poids moléculaire de 194, qui est celui du pinitol. Le point de fusion Fp = 189 °C et [α]D23 = +65°, c = 0,1 dans H2O sont conformes aux données publiées sur le d-pinitol [3].
Les inositols appartiennent à une classe de composés connus pour leur activités biologiques intéressantes [6]. Le pinitol a été découvert par Marcellin Berthelot en 1855 dans la résine de Pinus lambertiana Dougl. [7] : sa structure a été établie en 1952 par dégradation en un dérivé de l'acide d-(–)-tartrique [8]. Utilisé comme complément alimentaire, il a des propriétés hypoglycémiantes [9]. Isolé de très nombreuses plantes récemment encore, il a montré également une activité antihelmintique (écorces de tronc de Piliostigma thonningii (Ceasalpiniaceae)) [10] et un effet antiinflammatoire (feuilles d'Abies pindrow (Pinaceae)) [11]. Par ailleurs, le pinitol ne présente pas de toxicité chez des sujets résistants à l'insuline [12].
L'acétylation d'une partie aliquote de 1 par le mélange anhydride acétique/pyridine a fourni un dérivé pentaacétylé, lui-même déjà décrit [13].
4 Conclusion
Le d-pinitol ne présentant pas de toxicité chez des sujets résistant à l'insuline, sa présence dans L. pterocarpum au taux de 0,6 % par kg permet, à juste titre, de retenir cette plante dans la future pharmacopée nigérienne et d'éventuellement la conseiller utilement aux guérisseurs traditionnels pour le traitement du diabète.
Remerciements
Ce travail est dédié à la mémoire de Ibrahim Mahaman qui en avait commencé l'étude. Les auteurs remercient l'équipe C. Poupat et A. Ahond pour leurs conseils et expriment toute leur reconnaissance à l'Institut de chimie des substances naturelles (ICSN) du CNRS/Gif-sur-Yvette (France) pour son soutien financier.