La note de Robin Lacassin et al. s'interroge sur le risque sismique dans la région de Lambesc, où un important tremblement de terre s'est produit en 1909. À ce propos, les auteurs proposent trois éléments nouveaux, à savoir :
- • la découverte d'escarpements frais, correspondant à des ruptures nées au cours du séisme de 1909 ;
- • l'éventualité que l'origine de ces escarpements corresponde à la réactivation d'une ancienne faille de chevauchement (nommée Trévaresse Thrust), qui aurait accompagné la formation d'un pli situé au front de la petite chaı̂ne de la Trévaresse, caractérisé par une phase de plissement d'âge Miocène supérieur qui se serait probablement produite vers 8 Ma, et certainement avant 5,8 Ma [1] ; le plissement affecte des calcaires lacustres oligocènes, recouverts par des dépôts marins du Miocène ;
- • l'hypothèse que le Trévaresse Thrust correspond à une rampe de chevauchement à pendage nord, s'enfonçant sous l'anticlinal de la Trévaresse.
Après un examen de terrain, il est évident qu'aucune de ces trois propositions ne peut être retenue. Le commentaire concerne la géologie structurale et la géomorphologie.
Sur la géométrie du pli frontal de la Trévaresse
Les auteurs ne fournissent aucune coupe de ce pli. Il s'agit pourtant d'un préalable très important, dont dépend toute l'argumentation présentée. Ont-ils vraiment construit le pli en se servant de nombreux affleurements où le pendage des strates peut être observé (et en particulier au bord de la route de Rognes) ?
Aucune observation ne permet actuellement de supposer que le pli est compliqué à son front par une rampe de chevauchement qui arrive jusqu'en surface. Le Trévaresse Thrust n'est pas visible, là où il a été figuré dans la zone 3 de la Fig. 5.
La carte géologique au d'Aix-en-Provence [3] ainsi que des travaux pétroliers [2] montrent qu'aucune faille ne figure dans la zone évoquée ci-dessus.
Le grand chevauchement dessiné sur la Fig. 4, dans la partie orientale de la chaı̂ne de la Trévaresse (en particulier au nord de Couteron) n'existe pas. À l'emplacement du chevauchement figuré, on peut voir de magnifiques exemples de surfaces de la base du Miocène, taraudées par des lithophages connus depuis longtemps [2,4].
Sur les arguments topographiques utilisés pour contraindre la géométrie d'un Trévaresse Thrust « actif »
Les auteurs se sont beaucoup intéressés à la pente des reliefs du flanc sud de la Trévaresse. Ils y ont mesuré avec grand soin des pentes, plus ou moins raides, allant jusqu'à 12°7′. Ceci les a amenés à individualiser deux ressauts, qu'ils ont appelés flexures (de la topographie). L'une atteint 60 m de hauteur ; elle est bordée, en contrebas, par une flexure plus petite, de 10 à 20 m.
Ces deux variations de pente ont été interprétées de façon exclusivement tectonique. Il s'agirait, en effet, d'escarpements dus à des ruptures sismiques récentes. Le plus petit correspondrait à l'émergence en surface du Trévaresse Thrust. Le ressaut convexe supérieur, correspondrait pour sa part à un escarpement cumulé de petits escarpements, raides et frais, hauts de quelques dizaines de centimètres, qui pourraient correspondre à des restes de structures superficielles nées lors du séisme de 1909. On aurait donc des escarpements restés frais depuis 1909.
Cette interprétation ne repose que sur la mesure de profils de pentes, sans que soit pris en compte le rôle que jouent la lithologie et le pendage des strates. On se trouve pourtant en présence de faciès qui ont une résistance à l'érosion très contrastée, depuis des calcaires durs, formant des reliefs et des marnes sableuses très tendres, qui correspondent à des creux.
Dans ces conditions, l'interprétation des variations de pente en terme de « tectonique active » est irréaliste.
Le scarplet qui a été présenté sur la photo de la Fig. 5, n'est manifestement pas d'origine tectonique. Comme il s'agit du seul argument de terrain présenté dans la publication, j'invite les spécialistes à le visiter (il n'a pas été localisé et se trouve à 900 m à l'ouest de la route de Rognes). On est là en contrebas des travaux réalisés en 1860 pour le creusement du canal du Verdon ; cette origine est tout simplement anthropique. Il existe beaucoup d'autres exemples de ce type.
Dans cet article, les séismo-tectoniciens ont mesuré l'inclinaison de quelques pentes ; or, les reliefs de la région sont avant tout dus à l'érosion différentielle. La Trévaresse est en relief, parce qu'elle correspond à des calcaires redressés ; l'avant-pays est plat, parce qu'il correspond à des marnes subhorizontales, faciles à déblayer. Ce mécanisme fréquent, dans le Sud de la France, n'a pas été envisagé par les auteurs. Et le modèle de tectonique active précisé ne repose sur aucun fait significatif.
Il aurait été utile d'entreprendre une étude géomorphologique des surfaces qui caractérisent la région [1] et d'examiner les formations rouges et les conglomérats surmontant le Miocène marin dans le bassin de Puyricard, qui borde au sud les reliefs de la partie orientale de la Trévaresse [2,4].