La caractérisation des failles actives en Europe occidentale se heurte à d'importants problèmes méthodologiques : comment reconnaı̂tre des indices incontestables d'activité sur des failles a priori lentes dans des régions fortement anthropisées ou à couvert végétal dense ? L'étude des sources possibles des quelques grands séismes historiques est évidemment primordiale pour tester différentes approches et en évaluer les apports respectifs.
Rappelons tout d'abord quelques faits incontournables. Un séisme de magnitude voisine de 6 a frappé en 1909 la région située entre Lambesc, Rognes, Saint Cannat et Venelles. Un séisme de cette magnitude se produit toujours sur une faille. La magnitude est reliée à la taille (surface) du segment de faille qui a rompu par des lois d'échelle empiriques, simples mais robustes (par exemple, [9,12]). Ainsi, le séisme de 1909 (M∼6) requiert une rupture d'au moins 100 km2 (par exemple un plan de 10×10 km). Il convient donc de rechercher une faille sismogène de cette taille. L'essentiel de notre article [5] concernait ce problème, grâce à une synthèse et une discussion de toutes les données macrosismiques, géologiques et morphologiques à l'échelle appropriée. L'ensemble des données disponibles ne laisse guère de doute sur le fait que le séisme s'est produit sous le chaı̂non de la Trévaresse (pli anticlinal dans les calcaires oligocènes), et que la faille activée est très probablement une rampe de chevauchement plongeant sous ce chaı̂non.
Dans son commentaire, Maurice Mattauer estime : qu'il n'y a pas de chevauchement à pendage nord sous l'anticlinal de la Trévaresse ; que les escarpements décamétriques situés au front du pli ne résultent donc pas de l'activité de cette faille ; que les petits escarpements raides (scarplets) ne sont pas d'origine tectonique mais anthropique. Ces différents problèmes étaient déjà discutés dans notre article sur la base de données de terrain, mais le commentaire de M. Mattauer nous donne l'occasion de préciser brièvement certains points.
La coupe géologique de la Fig. 1a montre, au niveau de l'escarpement sud de la Trévaresse, une flexure géologique (kink) très localisée, de longueur d'onde au plus hectométrique, avec des bancs subverticaux ou renversés. Cette structure est observée tout au long du chaı̂non, à la base de la voussure topographique. Un tel kink localisé ne peut que correspondre à un pli de propagation (fault propagation fold [4,10]), situé au-dessus d'une faille inverse à pendage nord. Contrairement à ce qu'affirme Maurice Mattauer, cette faille est représentée sur les cartes géologiques (cartes

(a) Coupe géologique synthétique regroupant les observations faites le long de la D543 (Fig. 4 in [5]) et dans le domaine du Jas de Collavery (segment Collavery du pli de la Trévaresse). (b) Coupe schématique du front sud de la Trévaresse au nord-est de Couteron (travaux de terrassement 250 m à l'est du Ravin de la Brillanne), interprétation proposée en encart. Coupes sans exagération verticale.
Cette discussion révèle simplement, une fois de plus, les difficultés que soulève l'étude des failles potentiellement actives en France : peu ou pas de sismicité, failles lentes, structures « anciennes » réactivées, forte anthropisation. Il n'en demeure pas moins que l'évaluation de l'aléa sismique sur le territoire national, si délicate qu'elle soit, est une exigence sociale majeure. Proposer et publier des hypothèses testables par des approches modernes nous semble plus utile que d'éluder le problème sans apporter d'idées ou de données nouvelles.