Abridged English version
A trachytic tephra, with the aspect of a horizontal pink layer of thin ashes, 3.5 cm thick, was found at around 2 m below the soil surface in the sediments that fill the ancient lake of Sarliève. The lake was emptied for the last time (the site has not always been under water) during the 17th century, and is dry since. The tephra overlaps sediments that contain another layer of characteristic trachyandesitic volcanic ashes, locally known as CF1, which have been previously attributed to the volcano La Nugère, dated to years [4].
In the present work, the trachytic Sarliève tephra was dated using the quartz-inclusion TL technique [11,19,22]. The mean age result, 16±4 ka , is older than the age evaluated for CF1. However, the large error limits allow us to assume, for stratigraphical consistency, that the eruption took place not long before around 12–14 ka ago.
In any case, the Sarliève trachytic tephra is too old for originating from one of the hitherto dated trachytic volcanoes, Chopine, Vasset, Kilian, Puy de Dôme, the ashes of which have already been locally recognised [23].
The singularity of the Sarliève trachytic tephra is also shown by mineralogy, including refractive index analysis (Fig. 3) and heavy mineral analysis. Inter-comparison was performed between various trachytic lavas sampled either on volcanoes or in distant tephra layers. None of the seven trachytic volcanoes of the Chaı̂ne des Puys shows evident compatibility with the Sarliève tephra. One can finally assess that this trachyte should be considered as a new tephrostratigraphic marker, around 12–14 ka old, the origin of which still has to be determined.
In the course of the comparisons between the different lavas, was included a trachytic tephra, CF7, that can be observed in a widespread area, either in the Limagne plain or on the Chaı̂ne-des-Puys plateau [24,25]. CF7, which is characterized by small lumps of trachyte, is always found in the most recent strata of the sediments, in some occurrences, above the ashes from the volcano Pariou, which was hitherto considered as the youngest volcano of the north of the Chaı̂ne des Puys [6]. Three scattered 14C ages correlated with CF7 resulted in an averaged age of around 9 ka [23,24]. CF7 had been tentatively attributed to the Clierzou volcano, the age of which is still ignored, situated in the centre of the chain [4,23]. However, in the present work, significant differences were observed. Particularly, the refractive index analysis (Fig. 3) shows incompatibility between both lavas. On the other hand, tephrostratigraphy indicated that the Pariou is younger than the Clierzou [6]. Thus, the above observations allow us to assess that the Puy de Clierzou volcano is not at the origin of CF7.
On the other hand, refractive index analysis shows clear similarities between the lavas of Vasset, Kilian and CF7 (Fig. 3). The visual aspect of the three volcanic products also suggests strong relation: they all comprise lumps of either grey, dense lava (d∼2.5) or grey, yellowish ‘mossy’ lava (d∼1.5), that exhibit phenocrysts of feldspars and brown amphibole.
We then come to the final assumption that CF7 belongs to the ashes spread by the more recent of the two, Kilian or Vasset. This improves the position of CF7 as a stratigraphical marker at around 9300 ka and has implications on the knowledge of the eruptive dynamics of these volcanoes.
1 Le téphra de Sarliève
Un téphra a été repéré à deux mètres de profondeur, au cœur des sédiments lacustres de Sarliève [24] (Fig. 1). C'est un lit de cendres (3,5 cm) rose pastel à composition de trachyte (Tableau 1). Il est situé au-dessus (2 à 2,5 m) d'une retombée connue, CF1, attribuée au puy de la Nugère (20 km au nord-ouest). L'âge de CF1 est ans (moyenne, d'après [21,24,26]). Le téphra trachytique ressemble (aspect, stratigraphie) à celui de la rue Sous-les-Vignes à Clermont-Ferrand, (ci-après : CF5), situé vers la transition Boréal/Atlantique et rapporté au cratère Kilian ou au puy de Vasset [25] (tous deux situés 17 km à l'ouest), âgés respectivement de 9180±140 et 9280±280 ans (compilations à paraı̂tre dans [4]). Toutefois, CF5 a une composition plus acide (rhyolite) [25].
Composition du téphra de Sarliève et de la lave du Grand Sarcouy (m : roche massive ; b : brèche datée) ; analyses roche totale, valeurs normalisées à 100% (perte au feu Pérignat=3,4% ; Sarcouy b=0,4%)
Major elements composition of the Sarliève tephra and of the lava from Grand Sarcouy (m: massive lava; b: breccia that was dated)
Élément | MnO | MgO | CaO | Référence analyse | |||||||
Sarliève | 64,38 | 16,96 | 3,06 | 0,13 | 1,19 | 3,73 | 5,16 | 4,73 | 0,50 | 0,14 | CRPG 0104890 |
Sarcouy (m) | 64,71 | 17,1 | 3,01 | 0,22 | 0,67 | 1,8 | 6,58 | 4,82 | 0,42 | 0,15 | [12] |
Sarcouy (b) | 65,0 | 17,9 | 3,1 | 0,21 | 0,73 | 1,79 | 6,05 | 4,67 | 0,43 | 0,2 | CRPG 0302391 |
2 Datation directe par la thermoluminescence (TL) du quartz
Le matériau contient du quartz, minéral qui possède de bonnes propriétés TL. Il s'y présente sous deux formes, qui ont pu être imparfaitement séparées l'une de l'autre par densité : une forme limpide, la plus dense, et une forme d'aspect opalescent, contenant des impuretés. L'évaluation de la « paléodose », dose d'irradiation reçue depuis la remise à zéro par chauffage, a été obtenue par la « TL rouge » (mesurée vers 620 nm) [11,19,20,22]. Le pic principal est mieux défini et moins dispersé pour les quartz limpides que pour les autres, avec une forme et un comportement « classiques » [16,20], mais on ne relève pas de différence significative dans les deux paléodoses évaluées.
La dose d'irradiation annuelle (Tableau 2) a été évaluée par analyse des radioéléments (spectrométrie γ), mesure de la radioactivité in situ (scintillateur NaI), calcul du rayonnement cosmique [21] et des facteurs correctifs [9,15,20]. Elle repose sur la base de l'Actuel ; or, elle a varié dans le passé, car les sédiments se sont progressivement accumulés et il y a eu des fluctuations de l'humidité. Le lac de Sarliève, asséché au XVIIe siècle, avait auparavant connu des phases successives de hautes et basses eaux (par exemple, un drainage à l'époque gauloise). L'eau dilue l'irradiation, mais, en outre, elle peut véhiculer des radioéléments en solution ou associés à des particules fines. Ces effets, difficilement quantifiables, sont comptabilisés par un élargissement de l'incertitude (détails dans [5]).
Données de base (roche totale) du téphra de Sarliève pour l'évaluation de la dose d'irradiation annuelle des grains de quartz (100–315 μm), d'après [1]
Dosimetric data that were measured and used for the purpose of TL dating of the Sarliève tephra (after [1])
238U (ppm) | 232Th (ppm) | 226Ra/238U | Dose annuelle γ | Teneur en eau | Dose annuelle cosmique |
in situ () | in situ (% massique) | () | |||
5,7±0,4 | 20,2±0,3 | 1,1 | 1,16±0,06 | 23 % | 0,15±0,03 |
L'âge TL obtenu est 16±4 ka (Cler.325). Pour tenir compte de l'ordre stratigraphique (par rapport à CF1), il faut faire l'hypothèse que l'on se situe dans la partie récente de l'intervalle de confiance : le téphra proviendrait d'une éruption qui s'est produite il y a 12 à 14 000 ans. Cet âge est plus vieux que celui des quatre volcans trachytiques, Kilian, Vasset, Chopine et puy de Dôme, dont des retombées distales sont connues dans la région et dont le plus ancien, le puy de Dôme, a entre 11 000 et 12 000 ans [7,8,14].
3 Comparaisons avec les trachytes connus localement
La radioactivité, mesurée pour les besoins de la datation TL, peut être un élément de comparaison. On a reporté sur la Fig. 2 la teneur en 226Ra et en 232Th pour des trachytes prélevés sur sept volcans de la chaı̂ne des Puys ou bien en position distale. Les résultats semblent rattacher Sarliève au groupe de radioactivité la plus élevée : Sarcouy, Chopine et téphras de Marsat, attribués au Chopine [27].
Sur une lame mince de grand format, le téphra de Sarliève apparaı̂t comme globalement homogène et sans perturbation. Les limites du lit sont nettes. Il s'agit d'une retombée en position primaire. L'observation (×40) permet d'y distinguer deux parties. La partie inférieure (26 mm d'épaisseur), homogène et compacte, avec un microlitage discret, montre une matrice vitreuse transparente, avec des microcristaux leucocrates (feldspaths, apatite et quartz) et de rares microcristaux de biotite, magnétite et clinopyroxène vert. La partie supérieure (8 mm), moins homogène, montre des grains de lave arrondis non vésiculés, riches en microcristaux leucocrates, dans une matrice de minéraux libres et de microfragments laviques. Cette matrice présente une légère carbonatation (microcristallisation de calcite), en accord avec un léger enrichissement en CaO par rapport à un trachyte (Tableau 1). Ce microfaciès est comparable à celui du téphra CF5 (cf. Section 1), avec cependant des différences dans le cortège minéral : le quartz n'apparaı̂t pas dans CF5 ; l'amphibole brune, observée dans CF5, n'est pas présente à Sarliève.
Le cortège des minéraux denses de Sarliève montre la présence quasi exclusive (hormis des opaques non déterminables) du clinopyroxène vert à brun. Le plus souvent sous la forme d'éclats, il présente aussi quelques individus automorphes en prisme, avec une gangue vitreuse (bubble-wall texture [10]). Ce cortège est différent de celui de CF5. En effet, ce dernier est bien dominé par un clinopyroxène vert en éclats (55 %) mais on y trouve également du zircon (16 %), de l'amphibole brune (14 %), de l'apatite (10 %), de l'olivine (4 %) et du clinopyroxène brun (0,7 %) [25]. Les produits du Chopine se distinguent de ceux de Sarliève, notamment par la présence du sphène et par la chimie (rhyolite) [4].
Pour compléter ces analyses, une mesure des indices de réfraction des minéraux transparents a été effectuée (Fig. 3) : le téphra de Sarliève se distingue de tous les autres trachytes, et particulièrement de Vasset et Kilian, auxquels on aurait pu le rattacher avant analyse (par CF5 interposé). La retombée trachytique de Sarliève paraı̂t donc originale par rapport à celles déjà rencontrées ailleurs et par rapport aux volcans connus eux-mêmes.
4 Origine du téphra de Sarliève ?
Des rapprochements existent entre le téphra de Sarliève et le Sarcouy (Tableau 1 et Fig. 2), daté de ans [12,17]. Cette période présente un recouvrement avec celle proposée pour le dépôt du téphra de Sarliève. De plus, le quartz extrait des produits explosifs initiaux du Sarcouy, en vue de leur datation par TL, s'y trouve sous les deux formes distinctes observées à Sarliève. Les indices de réfraction ne sont pas très éloignés les uns des autres (Fig. 3). Ces données nous ont incités à mener plus loin la comparaison.
Plusieurs analyses de minéraux lourds (non opaques, dans la fraction 100–200 μm) des produits proximaux du Sarcouy ont été réalisées : trois sur la lave massive échantillonnée à l'est (anciennes carrières) et au sud (grotte sommitale) du dôme, et deux sur des produits explosifs antérieurs au dôme (anciennes carrières est). La lave massive est très pauvre en lourds (moins de 0,5 ‰ en masse). Avec des variations locales, le cortège est dominé par la biotite, puis par l'amphibole brune (à l'est) ou le zircon (grotte) ; viennent ensuite l'apatite et, enfin, de rares clinopyroxènes verts. Les brèches (1,1 ‰ de lourds) contiennent majoritairement de la biotite, de l'apatite et du zircon, suivis d'un clinopyroxène vert, puis, en très faible proportion, d'olivine, de sphène et d'amphibole brune. La différence lave/brèches témoigne peut être d'une évolution minéralogique au cours de l'histoire éruptive du volcan et, d'une façon certainement très marginale, d'une contamination pendant la phase initiale de débourrage. L'amphibole est donc rare, comme observé par Arnaud [2], mais non totalement absente, ainsi que l'ont écrit plusieurs auteurs depuis Bentor [3], qui avait probablement observé en lame mince, méthode défavorable aux espèces peu abondantes. Ces cortèges sont différents de celui du téphra de Sarliève. Donc, en gardant à l'esprit, d'une part, que les cendres distales sont l'objet d'un vannage se traduisant dans leur chimie globale et leur minéralogie (cf. discussion par Juvigné [13]) et, d'autre part, que les comparaisons minéralogiques lave massive/cendres sont biaisées (entre autres par les effets mécaniques du broyage), on peut conclure que la question de l'origine de ce téphra reste ouverte. Les produits explosifs initiaux du Sarcouy semblent toutefois présenter avec le téphra de Sarliève des incompatibilités moins fortes que les autres produits trachytiques de la chaı̂ne des Puys.
5 Le téphra CF7
Vernet a trouvé, en Limagne et au nord du plateau des Dômes, des nodules de trachyte (CF7), en position stratigraphique plus haute que toutes les retombées connues dans cette région, dont celles du Pariou [23,24]. De plus, au pied même du Pariou, sur sa grande coulée orientale, a été observée une retombée de déferlante composée de produits de même nature que CF7 (mais plus gros, jusqu'à 360 g) [4]. Le téphra CF7, auquel la chronostratigraphie donne un âge de 9000 ans environ, avait été attribué au puy de Clierzou [23,24], hypothèse remise en question aujourd'hui pour les raisons suivantes.
Le Pariou est plus récent que le Clierzou (placages de cendres du premier sur le second [6]). Le Clierzou peut, en outre, être différencié de CF7 sur la base des minéraux transparents (Fig. 3) et d'autres arguments minéralogiques : pour mémoire, le trachyte des grottes-carrières au sud du Clierzou montre deux formes minéralogiques originales non rencontrées dans CF7 : une magnétite en microbilles et un oxyde (FeTi) présentant une cristallisation lacunaire « en lanterne », abondant, qui pourrait en faire un marqueur de ce volcan.
A contrario, l'analyse des indices de réfraction montre une parenté certaine entre Kilian, Vasset et CF7. Cette parenté est aussi inspirée par l'aspect du matériau, qui présente deux formes : trachyte gris, dense (d∼2,5), ou trachyte vésiculé (d∼1,5) gris–jaune, à phénocristaux de plagioclase et amphibole, et par sa chimie. On ne sait pas distinguer les laves du Kilian de celles du Vasset [18] ; sur le plateau des Dômes, l'ensemble Vasset–Kilian–CF7 reste donc indifférencié. En revanche, en Limagne, CF7 peut se trouver dans une même coupe que CF5 ; il est alors au-dessus. On proposera donc l'hypothèse qu'il y a 9200–9300 ans, après la dernière éruption du Pariou, un volcan, Vasset ou Kilian, a répandu des produits explosifs, dont fait partie CF7, sur une aire très vaste. On dispose ainsi d'un très bon marqueur chronostratigraphique, parallèlement à une information intéressante du point de vue de la volcanologie.
Remerciements
Ce travail a été effectué dans le cadre du GDR du CNRS n° 1122 « Hommes et Volcans avant l'Histoire ». Nous remercions Yoshihiro Ganzawa (Hokkaido University) pour l'aide précieuse qu'il nous a apportée pour l'analyse des indices de réfraction.