Abridged English version
1 Introduction
The Oued Cheguigua Silurian succession outcrops some of 50 km southwest of the Casablanca city in the Oulad Abbou Syncline, which is a part of the Moroccan Coastal Meseta domain (Fig. 1). This succession, which reaches 282 m in thickness, rests on Upper Ordovician siliciclastic deposits and is overlain by Lower Devonian carbonates [4,9,18,23]. The Silurian deposits at Oulad Abbou were subject to mapping and structural and lithostratigraphical studies [7,9,10,12]. The aim of this work is to present for the first time the results of a detailed sedimentological study that leads to several conclusions concerning the sedimentary facies and environments, the nature and provenance of the sediments and the sedimentation control.
2 Sedimentary facies and environments
Facies analysis allows to recognize 11 sedimentary facies that are related to a tide-dominated littoral (Fig. 2):
- – facies A is recognized in calcareous beds; it corresponds to cryptalgal carbonate;
- – facies B is composed of alternating carbonate and claystone beds exhibiting wavy bedding;
- – facies C corresponds to alternating carbonate and claystones exhibiting reactivation surfaces and mud couplets;
- – facies D is composed of calcareous beds exhibiting mud drapes, reactivation surfaces, asymmetrical megaripples and soft sediment deformations;
- – facies E consists of calcareous beds exhibiting mud drapes, tidal bundles and asymmetrical current ripples;
- – facies F consists of calcareous beds with mud drapes, sigmoidal cross stratifications, asymmetrical current ripples and megaripples;
- – facies G is composed of calcareous beds exhibiting mud drapes, reactivation surfaces and wavy bedding;
- – facies H consists of calcareous beds exhibiting herring-bone cross stratifications and reactivation surfaces;
- – facies I consists of calcareous beds exhibiting mud drapes, reactivation surfaces, flaser-bedding and asymmetrical current ripples;
- – facies J consists of strongly bioturbated alternating carbonate and claystone beds exhibiting asymmetrical current ripples;
- – facies K is composed of alternating siltstone and claystone beds exhibiting linsen-bedding.
Facies A and facies K indicate deposition in supratidal environments [16,24]; facies I and facies J are related to intertidal environments [2,6,13,25,29,32] and facies B–H reflect deposition in infratidal environments.
3 Nature and source of the Silurian rocks
Petrographical analysis shows that the sediments of Oued Cheguiga succession are mainly siliciclastic, mixed siliciclastic and carbonate, with some intercalation of volcaniclastites and volcanic rocks (Fig. 2).
- – The siliciclastic sediments consist of mudstones and siltstones; they are composed of detrital quartz that may be monocrystalline with undulating extinction or polycrystalline (polygonized quartz, slightly sutured grains and chert), altered micas (muscovite, chlorite, biotite), and pyrite within argillaceous matrix. They reflect inheritance from pan-African shield.
- – The mixed siliciclastic/carbonate deposits consist of sandy and muddy micrite composed of a siliciclastic phase that shows the same mineralogical composition as the siliciclastic sediments and a carbonate phase composed of bioclasts and a micritic matrix. The carbonate components indicate the functioning of a carbonate source during the low influx of terrigenous sediments.
- – The volcaniclastites correspond to vitritic tuff composed of siliciclastic and carbonate components and plagioclase within recristallized glass.
- – The volcanic rocks correspond to microlitic basalt composed of plagioclase feldspar, and pyroxene within glass. Geochemical analysis [14] of these basalts indicates an alkaline intraplate continental volcanism related to distensive tectonics.
4 Sequential stratigraphy and sedimentation control
The study of the vertical stacking of the sedimentary facies (Fig. 2) allows to recognize a succession of shallowing upward peritidal sequences of metric to decametric thickness [1]. These sequences reflects an evolution from an infratidal to an intertidal and finally to supratidal environment (Fig. 2B). They recorded low-amplitude and high-frequency sea-level variations of 10–100 kyr duration in the context of high seal level related to the melting of the Upper Ordovician ice sheet. The built-up of these rhythmic sequences is related to distensive tectonics that allowed the development of an isolated platform. This tectonic was recorded also by basaltic flows [14] and soft sediment deformations.
5 Conclusion
The Silurian deposits of the Oued Cheguigua succession represent an example of stacked upward-shallowing peritidal sequences. They accumulated in tide dominated littoral environments (infratidal, intertidal and supratidal) alimented from siliciclastic, carbonate and volcanic sources under glacio-eustatism and distensive tectonics controls. The effect of glacio-eustatism is recorded by general high sea level and the distensive tectonic is responsible of low-amplitude and high-frequency sea-level variations of 10–100 kyr duration that controlled the stacking pattern, volcanic flow and soft sediment deformations. This tectonic event represents the crustal extension contemporaneous with the dislocation of the northwest Gondwana platform [31] that began at the base of the Lower Palaeozoic [5] and continued during the Middle Cambrian [19,27], the Ordovician [3,20], and the Silurian [21].
1 Introduction
La succession silurienne de l'oued Cheguigua affleure dans le synclinal d'Oulad Abbou, à l'ouest de Settat. Elle appartient à la marge occidentale du Môle côtier, qui correspond à un vaste édifice hercynien [26] (Fig. 1) formé de terrains paléozoı̈ques d'âge Cambrien à Dévonien supérieur [18,22,33], où la déformation se matérialise par des plis d'orientation subméridienne et d'amplitude plurikilométrique.
Les terrains siluriens du synclinal d'Oulad Abbou ont été datés sur la base d'importantes récoltes fossilifères [4,18,23]. Ces terrains ont également fait l'objet d'études qui ont permis d'en préciser la stratigraphie et la structuration [8,9] et de les corréler aux successions siluriennes du Maroc [7,10,12]. Cependant, ils n'ont jamais été étudiés sur le plan sédimentologique. L'objectif de ce travail est de présenter pour la première fois les résultats d'une étude sédimentologique détaillée, basée sur l'analyse stratonomique et l'étude pétrographique qui a permis de reconstituer les faciès et les environnements sédimentaires, les constituants minéralogiques et les sources d'apport, ainsi que le contrôle de la sédimentation.
La coupe de l'oued Cheguigua choisie pour ce travail présente les meilleurs affleurements siluriens de la région. Cette succession, dont l'épaisseur atteint 282 m, repose par l'intermédiaire d'une zone couverte d'éboulis (lacune d'observation) sur des quartzites grossiers microconglomératiques qui rappellent les faciès glacio-marins de l'Ordovicien supérieur et qui ont livré des brachiopodes mal conservés rapportés au Caradoc [9]. Elle est surmontée par des calcaires bioclastiques datés de la base du Dévonien [4,18,23] (Fig. 2).
2 Faciès et milieux de dépôt
L'analyse stratonomique de cette succession a permis de mettre en évidence plusieurs types de faciès qui se rapportent à des environnements littoraux, fortement influencés par l'action des marées (Fig. 2A).
- – Le faciès A a été mis en évidence à 60 m de la base de la coupe et il est formé par l'amalgame de bancs de calcaires. Ces bancs, qui ont des limites basale et sommitale nettes, sont constitués par des laminites algaires ondulées à l'échelle centimétrique à décimétrique, qui montrent des variations latérales d'épaisseur. Les laminites algaires résultent du piégeage de sédiments ou de leur précipitation par l'activité des algues bleues (cyanophycées) dans un milieu supratidal [16,24].
- – Le faciès B a été identifié à 15 m au-dessus du faciès A. Il correspond à une alternance d'interbancs centimétriques d'argilites et de bancs décimétriques de calcaires. Les bancs dont l'épaisseur varie latéralement montrent des rides asymétriques de courant au niveau de la surface sommitale. Ils sont constitués par l'amalgame de strates centimétriques à limites ondulées, entièrement formées par des rides centimétriques de courants unidirectionnels de sens opposés. Ce faciès sédimentaire correspond au wavy bedding ; il est rapporté à un milieu infratidal à intertidal [25].
- – Le faciès C caractérise la base de la coupe et il se présente sous forme de bancs décimétriques à métriques de calcaires et d'interbancs pélitiques centimétriques à nombreuses surfaces de réactivation ou réduits à l'état de joints secs. La surface basale des bancs est très érosive, leur surface sommitale est ondulée à l'échelle décimétrique et leur litage interne s'exprime par des doublets d'argile ou mud couplets, qui traduisent le cycle journalier des marées [2].
- – Le faciès D apparaı̂t au-dessus du faciès B sous forme de bancs métriques de calcaires, souvent affectés par une importante déformation synsédimentaire. Les interbancs correspondent à des drapages d'argiles. Les bancs sont souvent massifs et montrent de nombreuses surfaces de réactivation ; ils ont une limite basale nette et érosive et une surface sommitale modelée par des mégarides généralement asymétriques. Ce type de faciès est connu dans les milieux actuels infratidaux [6].
- – Le faciès E caractérise le sommet de la coupe. Il se présente sous forme de bancs métriques de calcaires amalgamés, dont la surface sommitale est modelée par des rides de courant unidirectionnel. Leur litage interne s'exprime par des faisceaux centimétriques de lamines obliques, séparés par des drapages d'argiles. Ce type de litage correspond aux tidal bundles ; il est rapporté à un milieu infratidal à intertidal [13,29].
- – Le faciès F a été mis en évidence dans les niveaux datés du Budnanien inférieur. Il est constitué par des bancs décimétriques à métriques de calcaires et des interbancs qui se présentent sous forme de joints secs ou de drapages d'argile. Les bancs ont des limites basales érosives et un litage interne oblique de type sigmoı̈dal. Leur surface sommitale est parfois modelée, soit par une superposition de rides asymétriques de courant unidirectionnel, soit par des mégarides. Ce faciès traduit une sédimentation contrôlée par l'action des marées [32].
- – Le faciès G apparaı̂t essentiellement vers la base de la coupe. Il est constitué par l'alternance de bancs décimétriques à pluridécimétriques de calcaires et d'interbancs sous forme de joints secs ou de drapages argileux. Les bancs dont l'épaisseur varie latéralement, peuvent être massifs, mais dans la plupart des cas, ils présentent une stratification oblique parfois ondulée et des surfaces de réactivation. Ce faciès traduit une sédimentation dans un milieu infratidal [11].
- – Le faciès H a été reconnu à différents niveaux de la coupe. Il est formé par des bancs de calcaires dont les limites sont nettes et érosives, avec des gouttières et des sillons à la base et des interbancs réduits à l'état de joints secs. Le litage interne des bancs s'exprime par une superposition de faisceaux de lamines obliques de sens opposés, séparées par de nombreuses surfaces de réactivation. Ce faciès correspond au phénomène de herringbone cross-stratification, qui traduit une sédimentation en milieu infratidal de haute énergie [15,17].
Le faciès I caractérise la base de la coupe et les niveaux datés du Ludfordien et du Budnanien inférieur. Il se présente sous forme de bancs décimétriques de calcaires lenticulaires amalgamés à limite basale nette et érosive. Les bancs montrent de nombreuses surfaces de réactivation et des drapages argileux. Leur surface sommitale est ondulée à l'échelle décimétrique et montre une superposition de rides centimétriques de courant unidirectionnel. Ce faciès correspond au phénomène de flaser-bedding et il est interprété sur la base de son association avec le faciès B comme le résultat d'une dynamique de marée en milieu intertidal [30].
- – Le faciès J a été reconnu vers le sommet de la coupe et dans les niveaux datés du Gorstien supérieur et du Budnanien inférieur. Il est constitué par une alternance décimétrique de bancs de calcaires et d'interbancs argileux. La structure interne des bancs a été complètement désorganisée par une importante bioturbation et leur surface sommitale est souvent modelée par des rides centimétriques de courant unidirectionnel. Ce faciès est interprété comme un dépôt de marée en milieu littoral, sur la base de son association avec les autres faciès.
- – Le faciès K caractérise la partie médiane de la coupe. Il est constitué par l'intercalation d'interbancs d'argilites et de bancs silteux de forme lenticulaire et d'épaisseur millimétrique à centimétrique. Les bancs présentent un litage oblique de courant unidirectionnel et une surface sommitale modelée par des rides. Ce faciès correspond au phénomène de linsen-bedding et traduit une sédimentation en milieu littoral soumis à l'action des marées.
3 Nature des dépôts et sources d'apport
L'étude pétrographique a permis de reconnaı̂tre plusieurs pétrofaciès qui peuvent être rapportés à quatre grands types de roches : des dépôts silicoclastiques, des sédiments mixtes (carbontés/silicoclastiques), des volcanoclastites et des roches volcaniques (Fig. 2A).
Les dépôts silicoclastiques correspondent à des argilites silteuses texturalement immatures, reconnues dans le faciès K et dont la composition minéralogique montre des quartz à extinction roulante et à lamelles de glissement intracristallines, des micas de type muscovites, biotites chloritisées et chlorites en forme de barillet ou déformées en accordéon et de la pyrite hématitiée. Ce pétrofaciès pourrait résulter de l'érosion d'une roche mère à composantes sédimentaires, métamorphiques et cristallines, qui serait probablement le socle panafricain et les termes anciens de sa couverture.
Les sédiments mixtes (carbonatés/silicoclastiques) reconnus dans la majeure partie des faciès correspondent à des calcaires sableux ou silteux composés d'une phase de liaison micritique, de quartz monocristallin de taille comprise entre 120 et 250 μm à extinction roulante et à lamelles de glissement intracristallines, des filaments d'algues et des débris d'organismes de nature et de taille variables. Ces dépôts témoignent du développement d'une sédimentation carbonatée lors d'une période de diminution des apports silicoclastiques.
Les dépôts volcanoclastiques sont des tufs vitreux, constitués par des fragments bioclastiques (algues, entroques, lamellibranches et brachiopodes), des grains de quartz monocristallin de taille variable, des lattes de plagioclases et une mésostase (50 à 60 % de la roche totale) correspondant à un verre volcanique recristallisé en clinochlore.
Les coulées volcaniques reconnues à la base de la coupe au sein des faciès C, G et I correspondent à un basalte de texture microlitique à porphyrique, riche en lattes de plagioclases qui présentent un phénomène d'ouralitisation. L'analyse géochimique de ces basaltes [14], a montré qu'il s'agissait d'un magma de type alcalin d'intraplaque continental, lié à un régime distensif subséquent à un amincissement crustal.
4 Organisation séquentielle et contrôle de la sédimentation
L'étude de l'évolution verticale des faciès sédimentaires a permis de reconnaı̂tre des séquences péritidales régressives (Fig. 2B) d'épaisseur métrique à décamétrique, qui traduisent le passage d'un milieu infratidal à un milieu intertidal puis supratidal (séquence 2), ou le passage d'un milieu infratidal à un milieu intertidal (séquence 1 ou 3). Chaque séquence enregistre l'accrétion latérale et verticale d'un tidal flat quand le niveau marin augmente [28]. Ces séquences enregistrent donc des variations eustatiques de faible amplitude et de haute fréquence, de quatrième à cinquième ordre et de durée comprise entre 10 et 100 ka [1], dans un régime transgressif général lié à la fonte des glaciers à partir du Llandovery supérieur. Ce type de séquence pourrait être lié, soit à l'eustatisme, soit à la tectonique ; dans le cas présent une origine tectonique semble plus plausible, comme cela est attesté par (1) la fragmentation de la plate-forme silicoclastique ordovicienne et la création d'une plate-forme carbonatée isolée à l'abri des apports silicoclastiques, (2) une activité volcanique attestée par l'existence d'un basalte à la base et de volcanoclastites vers le sommet de la coupe et (3) l'instabilité du tréfonds, matérialisée par des déformations synsédimentaires. Par ailleurs, cette tectonique distensive s'inscrit bien dans le cadre géodynamique global de la plate-forme nord-gondwanienne, qui a connu d'autres événements distensifs, comme celui de l'Ordovicien terminal [21].
5 Conclusion
Les faciès sédimentaires reconnus le long de la coupe de l'oued Cheguigua traduisent une sédimentation dans un milieu littoral soumis à l'action des marées et alimenté par des sources silicoclastique, carbonatée et volcanique.
L'étude de l'évolution verticale de ces faciès met en évidence un enchaı̂nement répétitif de plusieurs séquences péritidales régressives, dont la mise en place traduit un contrôle prépondérant par la tectonique distensive. En effet, le contrôle par le glacio-eustatisme ne se traduit que par : (1) la lacune de la base du Silurien, qui pourrait correspondre à une phase d'avancée du glacier, comme cela a été mis en évidence dans l'Anti-Atlas à la limite Ordovicien–Silurien [21] et (2) par un régime transgressif général lié à la fonte des glaciers à partir du Llandovery supérieur.
Les pulsations de tectonique distensive de l'Ordovicien du Maroc [3,20], qui font suite à celles déjà annoncées au Cambrien moyen [19,27], ou même avant [5], se sont poursuivies jusqu'au Silurien, induisant ainsi une fragmentation de la plate-forme nord-gondwanienne [31]. Dans la région étudiée, cette tectonique serait responsable (1) de la création d'une plate-forme carbonatée isolée à l'abri des apports silicoclastiques, (2) d'une activité volcanique, attestée par l'existence d'un basalte alcalin d'intraplaque continental [14] et de niveaux volcanoclastiques, et (3) de l'instabilité du tréfonds, matérialisée par des déformations synsédimentaires.
Remerciements
Les auteurs remercient A. Piqué et S. Willefert, qui ont évalué ce manuscrit.