Abridged English version
A number of studies have been devoted to reconstructing the thermal evolution of the Paris Basin, most of which were based on fluid inclusion studies (e.g., [4,12]). Many thermal studies based on organic markers have been restricted to the Toarcian shales, which represent the main source rock facies for the petroleum accumulations in the Paris Basin [7,9,14,17,24]. This publication summarizes the results of a study of the thermal history of the central area of the Paris Basin, which consists of a thermal reconstruction modelling using the PetroMod 1D software (IES Gmbh) together with isomerisation ratios for the C31 hopane as well as transformation ratios calculated from Rock–Eval pyrolysis measurements. The isomerisation and transformation ratios were determined on samples from 13 wells located between Paris and Saint-Dizier (Fig. 1).
The samples were ground and sieved (315-μm mesh) before being extracted with dichloromethane. Saturated and aromatic hydrocarbons from the extracts were separated on a silica microcolumn. Saturated hydrocarbons were subsequently analysed by gas chromatography-mass spectrometry (GC-MS). The C31 hopane isomerisation ratios determined from GC–MS traces on 35 samples from 11 wells range between 0.26 and 0.49 for the Callovo-Oxfordian samples, and between 0.49 and 0.61 for the Toarcian samples (Figs. 3 and 4). The spatial distribution of these values is similar to that of previously published Rock–Eval values [8]. These values increase from the eastern part of the basin towards its centre, corresponding to an increase in organic matter maturity. The transformation ratios were determined for Toarcian shale samples from three wells using Rock–Eval data communicated by the ‘Institut français du pétrole’ (IFP) together with initial hydrogen index (HI) values given in [8]. Using this procedure, the calculated TR values were found to vary between 19 and 23%.
The C31 hopane isomerisation ratios and transformation ratios were selected as they can be applied to the maturation range of the organic matter of the Toarcian and Callovo-Oxfordian sediments (i.e. diagenesis-catagenesis). The evolution of the isomerisation ratio with increasing maturity was simulated using as kinetic parameters an activation energy of 40.1 kcal mol−1 and a pre-exponential factor of . Associated changes in the transformation ratios were simulated using kinetic parameters derived from thermal degradation studies of Lower Toarcian organic matter [1]. Calibration of the model is based on a comparison between calculated and measured values for the two thermal markers.
The boundary conditions represented by the time- and spatial dependence of surface heat flow at the bottom of the basin were computed according to a method described in [16]. They correspond to the exponential decay curves shown in Fig. 2. Surface temperatures were considered warmer during the Mesozoic (ca. 25 °C), before decreasing during the Cenozoic to attain their present-day value of 12 °C, in agreement with the paleolatitude evolution of the Paris Basin [15].
The maximum burial temperatures computed from our model range between 75 and 95 °C for the Callovo-Oxfordian samples, and from 90 and 115 °C for the Toarcian shales (Fig. 6). The precision on these paleotemperature values is estimated to be about 10 °C considering the combined uncertainties on the measurements and model calibration. By extending this thermal reconstruction model to other formations, a comparison can be made between maximum temperatures of burial estimated using thermal indicators and the corresponding temperatures independently obtained from fluid inclusion studies (Table 1). Such a comparison clearly shows a good agreement between both methods.
Comparaison entre les températures maximales d'enfouissement déterminées par les rapports d'isomérisation S/R des C31 hopane et les températures déterminées par d'autres auteurs. Voir la Fig. 6a pour la localisation des zones A, B et C. Hett.–Sin. = Hettangien–Sinémurien
Comparison between maximum palaeotemperatures of burial calculated from C31 hopane S/R isomerisation ratios (this study) and maximum palaeotemperatures of burial inferred from other markers. See Fig. 6a for the location of areas A, B and C. Hett.–Sin. = Hettangian–Sinemurian
Zone | Formation | Cette étude | Autre étude | Réf. |
A | Keuper | 120–130 | 120 | [5] |
A | Formation de Chaunoy | 120–130 | 140 | [25] |
B | Hett.–Sin. | 110–120 | 120 | [9] |
Toarcien | 120–130 | 130 | ||
C | Hett.–Sin. | 105–115 | 110–115 | [11] |
Rhétien |
Compared to present-day temperatures measured or calculated assuming a thermal gradient of 34 °C km−1, it appears that the calculated maximum temperatures of burial are 20 to 35 °C higher than their present-day counterparts going from the centre towards the east of the study area. This temperature difference can be partly attributed to the change in surface temperature (ca. 13 °C) between the Cretaceous and today. An additional explanation is required to account for the remaining difference of 10 to 20 °C. Several hypotheses have already been proposed, including (i) an underestimation of the erosion during the Late Cretaceous (assuming the maximum depth of burial was reached at the Late Cretaceous–Lower Tertiary boundary); (ii) a thermal anomaly due to a major geodynamic event (e.g., the opening of the Atlantic Ocean) [2], and/or (iii) heat transfer by advection in the basin [9]. Assuming that no thermal anomaly occurred during the evolution of the Paris Basin [16,21], as much as 400 to 600 m of erosion thickness are required for the eastern part of the study area, whereas only 100 to 300 m are required for the centre of the basin.
1 Introduction
La reconstruction de l'histoire thermique d'un bassin sédimentaire peut être réalisée grâce à divers marqueurs inorganiques et organiques de thermicité. Le choix de ces marqueurs est dicté par divers paramètres, tels que l'histoire de l'enfouissement du bassin et le degré de maturité de la matière organique. Ainsi, les inclusions fluides ont été utilisées pour reconstruire la thermicité du bassin de Paris [5,11]. La plupart des études utilisant les marqueurs moléculaires se sont limitées au Toarcien inférieur en raison de son caractère pétroligène [7,9,14,17,24]. Cependant, aucune comparaison n'a été tentée entre les températures maximales d'enfouissement déduites des marqueurs organiques et celles issues des marqueurs inorganiques.
Le but de cette étude est de compléter la connaissance de l'histoire thermique du Toarcien inférieur et du Callovo-Oxfordien du bassin de Paris, grâce à une modélisation 1D fondée sur deux types de marqueurs organiques : les taux de transformation de la matière organique (MO) déterminés par la pyrolyse Rock–Eval et les rapports d'isomérisation moléculaire des C31 hopane. L'épaisseur de la couverture crétacée érodée vers le centre du bassin a également été estimée.
2 Zone d'étude, échantillonnage et méthodes d'analyse
Trente-cinq échantillons, prélevés dans le Toarcien inférieur et le Callovo-Oxfordien entre Paris et Saint-Dizier (Fig. 1), ont été broyés (), puis extraits au dichlorométhane. L'extrait organique a été fractionné en hydrocarbures aliphatiques, aromatiques, et composés lourds (asphaltènes + résines) par chromatographie liquide sur colonne de silice. Les hydrocarbures aliphatiques ont été analysés par couplage chromatographie en phase gazeuse–spectrométrie de masse, en sélectionnant l'ion caractéristique des hopanes ( 191) pour le calcul des rapports d'isomérisation .
3 Modélisation thermique
3.1 Calcul de la subsidence totale
Les courbes de subsidence totale (non corrigées des bathymétries) ont été calculées à partir de la base de données établie par [13] lorsque ces données étaient disponibles, ou à partir de données de forages. La méthode de backstripping est identique à celle proposée par [22], en utilisant des lois de porosité adaptées [16].
3.2 Paramètres et conditions aux limites du modèle
L'histoire thermique de chaque puits a été modélisée avec le logiciel PetroMod 1D (IES Gmbh) et les paramètres physiques (conductivités thermiques) ont été calibrés sur des données tirées de la littérature [6,9].
À la base du bassin, l'évolution temporelle du flux de chaleur surfacique a été calculée pour les différents puits, en utilisant la méthode d'inversion développée par [16]. Les courbes montrent une décroissance exponentielle depuis le Permien jusqu'à l'Actuel (Fig. 2).
Les températures de surface intégrées dans le modèle sont considérées au premier ordre comme élevées (environ 25 °C) au Mésozoïque, puis décroissantes à partir du Crétacé supérieur, pour atteindre des valeurs actuelles autour de 12 °C, en accord avec la migration latitudinale du bassin [15].
3.3 Choix des paramètres organiques de calibration
Le rapport d'isomérisation du C31 hopane et le taux de transformation de la MO ont été choisis en raison du domaine de maturité de la MO du bassin de Paris (i.e. diagenèse–fenêtre à huile). De plus, l'origine bactérienne du C31 hopane permet de s'affranchir d'éventuels problèmes de sources et de type de matière organique. Le rapport C31 hopane évolue durant la diagenèse, jusqu'à atteindre une valeur d'équilibre généralement estimée à 0,61 [18]. Les paramètres cinétiques (énergie d'activation : 40,1 kcal mol−1 et facteur pré-exponentiel : ) [18] ont été utilisés pour calculer le rapport d'isomérisation. Le taux de transformation théorique a été calculé à partir des paramètres cinétiques de dégradation thermique de la MO du Toarcien inférieur [1]. La calibration du modèle a été réalisée en comparant les valeurs simulées par le modèle et les valeurs mesurées pour ces deux marqueurs de thermicité.
4 Résultats et discussion
4.1 Rapports d'isomérisation des C31 hopane et taux de transformation de la MO
La Fig. 3 montre que les rapports d'isomérisation mesurés du C31 hopane sont plus importants pour le Toarcien inférieur que pour le Callovo-Oxfordien, et qu'ils augmentent avec l'enfouissement sédimentaire. Les valeurs obtenues au centre du bassin indiquent que la MO du Toarcien inférieur a atteint la fenêtre à huile (valeur à l'équilibre). Pour le Callovo-Oxfordien, les valeurs n'ont pas encore atteint la valeur à l'équilibre et sont situées au début de la fenêtre à huile. Ces valeurs, reportées sur les cartes (Fig. 4), mettent en évidence l'évolution de la maturité de la matière organique de la bordure du bassin vers le centre, en accord avec les valeurs de Rock–Eval [8].
Les taux de transformation mesurés pour le Toarcien inférieur ont été déterminés en utilisant la formule établie par [20] à partir des données de pyrolyse Rock–Eval, communiquées par l'Institut français du pétrole. Les indices d'hydrogène initiaux sont issus de [8]. Les taux de transformation mesurés, de l'ordre de 0,19 à 0,23, sont représentatifs de la fenêtre à huile, car ils correspondent à des Rock–Eval compris entre 437 et 442 °C, respectivement (Fig. 4).
4.2 Températures maximales d'enfouissement et estimation de l'érosion
Les températures maximales d'enfouissement des différentes formations ont été déterminées par ajustement des marqueurs organiques calculés sur les valeurs mesurées (Fig. 5). Les températures déterminées par le modèle sont cohérentes pour les deux marqueurs de thermicité, et varient (de l'est vers le centre) de 75 à 95 °C pour le Callovo-Oxfordien et de 90 à 115 °C pour le Toarcien inférieur (Fig. 6). L'incertitude sur les différentes températures simulées est estimée à 10 °C, compte tenu des incertitudes de mesure et de calibration. Les températures maximales d'enfouissement moyennes déduites de l'étude de la MO sont comparables à celles déterminées par les inclusions fluides [4,5,11,12] ou par les résultats de la modélisation 2D [9] (Tableau 1).
Nous avons comparé les températures modélisées avec les températures actuelles déterminées au sein des formations. Ces dernières sont estimées, soit d'après les profils de température disponibles [6,9], soit en se basant sur un gradient thermique actuel de l'ordre de 34 °C km−1. Les écarts entre températures maximales d'enfouissement simulées et températures actuelles peuvent atteindre 20 à 25 °C vers le centre du bassin et jusqu'à 35 °C dans la partie orientale de la zone étudiée. Une partie de ces écarts de température (13 °C) est directement expliquée par la différence de températures de surface entre l'Actuel (12 °C) et le Crétacé supérieur (25 °C). Des hypothèses supplémentaires doivent être avancées pour expliquer les 10 à 20 °C d'écarts thermiques restants : (i) un dépôt important de craie, qui aurait été érodée fin Crétacé–début Tertiaire, (ii) une anomalie thermique consécutive, soit à un évènement géodynamique majeur (par exemple, l'ouverture de l'océan Atlantique), soit à un phénomène hydrothermal majeur, ou encore (iii) un transfert de chaleur par advection dans le bassin de Paris [9,10].
La modélisation 1D ne permet pas de prendre en compte l'advection associée à la circulation des fluides. Cependant, il a été montré que l'essentiel du transfert de chaleur serait conductif durant le Mésozoïque et que les circulations de fluides ont débuté lors du basculement du bassin consécutif à la compression alpine [10]. La prise en compte d'un transfert de chaleur uniquement par conduction, dans la présente étude, n'est pas aberrante.
Il a été montré que les évènements géodynamiques n'avaient pas eu d'effet sur les variations du flux de chaleur basal au Mésozoïque [16,21]. Par ailleurs, des températures de l'ordre de 220 à 250 °C, attribuées à une activité hydrothermale datée de 190 Ma, ont été mesurées dans les formations du Rhétien [2]. Cependant, ces circulations de fluides chauds semblent être limitées, puisque d'autres études [4,5,10,11,23,26] n'ont mis en évidence que des circulations de fluides à plus basse température. De plus, ces circulations auraient eu lieu alors que les formations étaient à peine ou pas déposées [2], ce qui semble exclure l'hypothèse d'une évolution de la matière organique provoquée par des circulations de fluides très chauds.
L'hypothèse la plus probable reste un effet lié à la couverture crétacée. Sur la base du taux de transformation de la matière organique, l'érosion post-crétacée a été considérée comme négligeable dans le centre du bassin [9]. Cependant, il a été montré que la phase intense de déformation d'âge Crétacé supérieur aurait induit une érosion importante [3,13,19]. Pour les températures maximales calculées et compte tenu des conditions aux limites imposées au modèle, notamment en ce qui concerne le flux de chaleur, l'épaisseur de couverture érodée varie de 100 à 300 m vers le centre du bassin et pourrait atteindre 400 à 600 m pour les puits les plus à l'est. Cette phase d'érosion serait donc à l'origine des températures maximales d'enfouissement déterminées dans cette étude.
5 Conclusion
Cette approche modélisatrice, basée sur l'utilisation de marqueurs organiques (rapport d'isomérisation des C31 hopane et taux de transformation) permet d'améliorer la connaissance de l'histoire thermique du bassin de Paris.
Les résultats donnent des températures maximales d'enfouissement s'échelonnant (du centre vers l'est) entre 115 °C et 90 °C pour le Toarcien et de 95 à 75 °C pour le Callovo-Oxfordien. Ces températures sont cohérentes avec celles déterminées par les inclusions fluides. Cette thermicité s'explique par une température de surface au Crétacé supérieur élevée (environ 25 °C) [25] et par les dépôts de craie érodés au Crétacé/Tertiaire. Compte tenu des conditions aux limites imposées au modèle, l'érosion est estimée entre 400 à 600 m pour la partie est de la zone étudiée, et de l'ordre de 100 à 300 m dans le centre du bassin de Paris.
Remerciements
La société Gaz de France est remerciée pour son soutien financier. Les auteurs remercient l'équipe d'IES pour leur aide technique. Le Service de conservation des gisements d'hydrocarbures (ministère de l'Industrie) est également remercié pour avoir fourni les échantillons utilisés dans cette étude. L'Institut français du pétrole est remercié pour les données de pyrolyse Rock–Eval utilisées au cours de cette étude. Les auteurs remercient les deux reviewers pour leurs remarques, qui ont contribué à améliorer cette note.