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Comptes Rendus

Géosciences de surface (Hydrologie–Hydrogéologie)
Extension spatiale de la salinisation des ressources en eau et modèle conceptuel des sources salées dans la plaine des Triffa (Maroc nord-oriental)
[Spatial extension of salinization in groundwater and conceptual model of the brackish springs in the Triffa plain (northeastern Morocco)]
Comptes Rendus. Géoscience, Volume 338 (2006) no. 11, pp. 768-774.

Abstracts

La plaine des Triffa a connu une longue période de sécheresse, qui a abouti à une intense exploitation des ressources hydriques et, par conséquent, à une dégradation importante de la qualité des eaux et à une chute considérable du niveau piézométrique. L'extension géographique de cette salinisation et son origine ont été déterminées par l'application des sondages géo-électriques verticaux de type Schlumberger et par une mesure directe de la conductivité de l'eau dans les puits et les sources sur le terrain, suivie d'une analyse chimique. Un modèle conceptuel des sources salées de la plaine a été établi.

The succession of drought years and excessive abstraction in the plain of Triffa caused deterioration in water quality and endangers future exploitation of groundwater resources. A combination of geophysical surveys, including electrical resistivity and hydrochemical data has been used to identify the geographical extension of salinization and identify its origin. Electrical conductivity measurements are used to show the history of salinization in space and time. In this paper, a first conceptual model of the brackish springs has been established.

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DOI: 10.1016/j.crte.2006.07.007
Mot clés : Résistivité, Salinisation, Modèle, Conductivité, Hydrochimie, Triffa, Maroc
Keywords: Resistivity, Salinization, Model, Conductivity, Hydrochemistry, Triffa, Morocco

Mimoun Boughriba 1; Abderrahmane Melloul 1; Yassine Zarhloule 1; Abdelillah Ouardi 2

1 Laboratoire de géologie appliquée, hydrogéologie et environnement, UFR « Géosciences des ressources naturelles », faculté des sciences, BP 524, Oujda, Maroc
2 Agence du bassin hydraulique de Moulouya, Oujda, Maroc
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Mimoun Boughriba; Abderrahmane Melloul; Yassine Zarhloule; Abdelillah Ouardi. Extension spatiale de la salinisation des ressources en eau et modèle conceptuel des sources salées dans la plaine des Triffa (Maroc nord-oriental). Comptes Rendus. Géoscience, Volume 338 (2006) no. 11, pp. 768-774. doi : 10.1016/j.crte.2006.07.007. https://comptes-rendus.academie-sciences.fr/geoscience/articles/10.1016/j.crte.2006.07.007/

Version originale du texte intégral

Abridged English version

The study area, of about 40 000 ha, is situated in northeastern Morocco, along the Algerian border. Morphologically, it consists of two parts, separated by the flexure of Hassi Smia. The climate is arid and the precipitations vary from 200 to 300 mm yr−1. The Ain Chebbak and Ain Zebda springs indicate an important salinization of the aquifer (6 g l−1, Fig. 1). On the other hand, the salinity is about 0.92 g l−1 in the upstream of the plain.

Fig. 1

Carte de localisation de la zone d'étude.

Location map of the study area.

The main purpose of the present study is to determine the spatial extension of the salinization and also to identify the origins and the mechanisms governing its contamination using the chemical compositions in conjunction with geophysical and hydrogeological data.

In the south of the flexure, groundwater mainly occurs in the Plio-Quaternary detrital aquifer, the transmissivity value is in the range 10−25×10−3 m2s−1. In the north of the flexure, the lacustrine sediments constitute a major sedimentary aquifer, the average transmissivity being in the order of 1.6×10−4 m2s−1.

Fig. 3 shows a piezometric map interpolated from wells in the Triffa plain. Groundwater is recharged by vertically infiltrating meteoric water in the basin and laterally penetrating fracture water along the Beni Snassen mountain front. The general direction of the groundwater flow is SE–NW, with some deviations in the agricultural area, apparently caused by irrigation return flow.

Fig. 3

Carte piézométrique (mars 2000).

Piezometric map (March 2000).

Vertical electrical soundings (VES) have been carried out in the frame of this study, using the Schlumberger electrode array with a maximum current electrode spacing of AB/2=200 m.

Fig. 4 shows a calibration of the geo-electrical model on the geological and hydrogeological data. The low resistivity values (3 to 8 Ω m) in the north of the flexure represent lacustrine sediment saturated with brackish or salt water. The resistivity values increase in the south of the flexure (12 to 20 Ω m), indicating the presence of silt with limestone saturated with freshwater.

Fig. 4

Calage du modèle géo-électrique avec les logs lithologique et hydrogéologique.

Integrated geoelectrical interpretation of subsurface formations.

The map (Fig. 5) reflects the variation in electrical properties in the saturated zone, which shows that the area characterised by resistivities lower than 10 Ω m (A, B and C) comprises brackish- or saline-water-saturated formations. The zones characterised by resistivities higher than 12 Ω m (D, E and F) represent formations saturated with freshwater and constitute the best aquifer zone in the area. Fig. 6 shows the distribution of the electric conductivity of the aquifer water, confirming the zonation (A, B, C, D, E, and F) obtained by the variation of the resistivity, whereas chemical analysis, giving the type of water, confirms its quality (fresh, brackish, or saline).

Fig. 5

Carte d'isorésistivié de la zone saturée.

Iso-resistivity contour map.

Fig. 6

Carte d'isoconductivité des eaux de la nappe.

Iso-conductivity contour map.

Fig. 7 shows a conceptual model that explains the origin of the salinisation of the Ain Chebbak and Ain Zebda water springs.

Fig. 7

Modèle conceptuel de la salinisation des sources salées.

Conceptual salinization model of the saline springs.

1 Introduction

La salinisation des ressources en eaux souterraines peut avoir une origine double ; naturelle (géologique) et anthropique (activité humaine). En effet, la dissolution d'évaporites, la remobilisation d'eau marine piégée lors d'intrusions marines et le retour à l'aquifère d'eau d'irrigation concentrée en surface par évaporation sont des phénomènes qui contribuent largement à la salinisation des nappes [3,5].

La conductivité électrique des sources de Ain Chebbak et Ain Zebda indique une salinisation importante de l'aquifère (conductivité = 10 000 μs cm−1, salinité = 6 g l−1). En revanche, à l'amont, la conductivité est de l'ordre de 1200 μs cm−1 et la salinité est de l'ordre de 0,92 g l−1.

L'objectif de cette étude est de déterminer l'extension spatiale de cette salinisation et de pouvoir cerner son origine. Pour cela, nous avons utilisé deux méthodes complémentaires. La première est basée sur une mesure indirecte de la résistivité apparente de l'aquifère saturé en eau, par application de sondages géo-électriques verticaux de type Schlumberger. La seconde méthode est basée sur des mesures directes (la conductivité électrique) et une analyse chimique de l'eau échantillonnée pour déterminer les différents faciès d'eau qui peuvent nous indiquer les différents processus responsables de phénomènes de salinisation [8].

2 Cadre hydrogéologique

La plaine des Triffa constitue une vaste dépression subsidente à structure synclinale, limitée, au nord, par les collines d'Ouled Mansour et, au sud, par le massif des Béni-Snassen. Les oueds Moulouya et Kiss forment ses frontières respectives à l'ouest et à l'est (Fig. 1). Le synclinal est constitué de formations géologiques allant du Secondaire au Quaternaire ; les formations secondaires et tertiaires affleurent sur les bordures nord et sud de la plaine, formant ainsi une nappe captive profonde, à comportement artésien. Les formations quaternaires occupent la majeure partie de la surface de la plaine, où se localise la nappe phréatique potentielle de la région. La lithostratigraphie locale révèle trois grandes formations. À la base, un substratum imperméable, d'âge Messinien, est formé par une alternance de marnes sableuses verdâtres et jaunâtres et de bancs gréseux, à dépôts évaporitiques : il constitue la falaise morte dans les collines d'Ouled Mansour. Sur ce dernier se déposent des calcaires marneux lacustres fissurés d'âge Villafranchien, suivis de limons rouges à dragées calcaires d'âge Quaternaire, dont l'épaisseur varie considérablement de part et d'autre de la flexure (Fig. 2). En effet, au sud de cette dernière, les dépôts des limons rouges se sont faits d'une façon continue, mais leur épaisseur est très variable : elle peut atteindre des centaines de mètres par endroit. Au nord de la flexure, dans les régions où cette dernière est bien exprimée (pente forte), l'épaisseur des limons rouge ne dépasse guère quelques mètres – elle peut même être nulle –, en revanche, là où la pente de la flexure est relativement faible, elle atteint une dizaine de mètres.

Fig. 2

Profil lithologique AA au niveau de la zone d'étude.

Geological cross section AA in the study area.

Le réservoir de la nappe phréatique est constitué par les deux dernières formations, à savoir les calcaires lacustres et les limons rouges à dragées de calcaires. Ces derniers présentent un bon comportement hydrodynamique, grâce à leurs fortes perméabilité et transmissivité (10−2 à 5×10−3 m2s−1) ; en revanche, les calcaires lacustres montrent une faible perméabilité et une transmissivité de l'ordre de 2×10−4 à 4×10−5 m2s−1.

La carte piézomètrique réalisée (Fig. 3) met en évidence deux grands axes de drainage de la nappe. En effet, le premier axe démarre au pied de Drâa Oulad Mimoun pour arriver à l'ouest de Café Maure l'écoulement se dirige vers le nord, avec un gradient hydraulique relativement fort. En se heurtant à la flexure, l'écoulement de cet axe change d'orientation et prend une direction vers le nord-ouest. Le second axe se trouve à cheval sur les deux zones séparées par la flexure ; il est sensiblement orienté vers le nord-ouest. Il démarre au sud de Café Maure, en passant par Madagh, pour aboutir à la Moulouya ; l'écoulement se fait avec un gradient hydraulique relativement faible. Les axes de drainage ainsi que le gradient hydraulique dépendent largement de l'extension géographique des limons rouges à dragées calcaires et de leur épaisseur. Au sud de Khenoussa, l'écoulement de la nappe se fait selon une direction est–ouest vers les oueds Charrâ et Moulouya, Il résulte de cette divergence d'écoulement une zone mal alimentée, qui se localise au nord de Berkane et au sud de Madagh.

3 Sondages électriques

Cette méthode est basée sur l'application des sondages électriques verticaux (SEV) de type Schlumberger. Elle permet d'obtenir, en fonction de la profondeur, la résistivité apparente d'un certain volume de terrain [1,4]. L'objectif est de cartographier la zone saturée de l'aquifère, étant donné que la résistivité apparente relative à cette zone prendra des valeurs faibles et décroissantes en fonction du degré de salinisation.

Une cinquantaine de sondages électriques ont été réalisés (Fig. 1) dans la plaine des Triffa, de part et d'autre de la flexure de Hassi Smia. Le choix de l'emplacement des sondages était guidé par la répartition des forages et des puits, permettant le calage [6] entre les modèles électriques et les modèles hydrogéologiques (Fig. 4).

Au sud de la flexure, le substratum marneux n'a jamais été atteint par le dispositif utilisé. Lorsque l'épaisseur de l'une des ces cinq couches est relativement faible, elle n'apparaît pas sur le modèle électrique (phénomène de suppression). La valeur de la résistivité apparente de la zone saturée diffère énormément de part et d'autre de la flexure. En effet, au nord de la flexure, sa valeur varie de 3 à 8 Ω m : elle correspond à des calcaires marneux lacustres saturés d'eau saumâtre à salée. En revanche, au sud, elle varie de 12 à 20 Ω m : il s'agit de limons rouges à dragées calcaires, saturés d'eau douce. Mais il existe certains sondages électriques qui indiquent une salinisation au sud de la flexure, comme d'autres qui montrent un adoucissement au nord de la flexure.

La carte d'iso-résistivité (Fig. 5) relative à la partie saturée de l'aquifère, dont la résistivité apparente (sédiment + eau) dépend largement du degré de salinisation de l'eau (eau douce, saumâtre ou salée), a mis en évidence la répartition spatiale de cette salinisation, donc de son extension. En effet, plus la contamination est importante, plus la valeur de la résistivité est faible. La gamme de résistivité caractérisant l'aquifère saturé varie de 4 à 18 Ω m. Plusieurs zones contaminées indiquent des valeurs inférieures à 10 Ω m. Au nord de la flexure, deux zones contaminées se distinguent : les zones A et B, avec une valeur de résistivité qui varie, respectivement, de 5 à 10 Ω m et de 7 à 10 Ω m. La zone C se trouve au nord de la ville de Berkane et au sud de l'axe Madagh–Café Maure, la résistivité variant entre 8 et 10 Ω m. Les zones D, E et F sont non contaminées.

Ce zonage, obtenu par des mesures indirectes, doit être confirmé par les mesures directes sur l'eau de la nappe, pour quantifier le degré de la salinisation de chaque zone.

4 Discussions et conclusion

L'objectif est la mesure directe de la conductivité électrique de l'eau des puits, suivi d'un échantillonnage pour analyse chimique.

4.1 Conductivité électrique

La Fig. 6 révèle aussi l'existence du zonage, détectée précédemment par la prospection géo-électrique (Tableau 1).

Tableau 1

Conductivité électrique des différents zonages détectés

Electrical conductivity of the different zones detected

Zones A B C D E F
Conductivité (μS cm−1) 5000 à 9000 5000 à 6000 5000 à 6000 2000 à 4000 2000 à 4000 3000 à 4000

Les deux sources Ain Zebda et Ain Chebbek constituent les résurgences de la plaine des Triffa ; ce sont les points d'eau qui représentent la plus forte conductivité (9000 à 10 000 μS cm−1), donc une salinité élevée. Les deux sources se trouvent dans une structure tectonique définie par deux failles normales conjuguées (Fig. 7) qui caractérisent la région de la trouée. Les sources se localisent sur la faille normale de direction NE–SW, dont le regard est vers le nord-ouest. Cette direction est identique à celles de l'oued Moulouya et de la ligne du rivage du cap de l'Eau. Cette faille met en contact les formations quaternaires (calcaires lacustres et limons rouges), qui constituent l'aquifère phréatique de la plaine, avec les marnes jaunes à dépôts évaporitiques, qui forment son substratum messinien. Le débit des sources est faible ; l'eau, en montant, lèche ces marnes le long du plan de faille : elle a donc le temps de se charger de plus en plus pour aboutir à une teneur élevée en sels, spécialement des chlorures [2].

Les documents obtenus par la prospection géophysique, couplés à ceux obtenus par les techniques hydrogéologiques, nous ont fourni une cartographie assez précise du phénomène de salinisation de la plaine, ainsi que des renseignements sur son origine. Plusieurs zones, affectées à des degrés divers par la contamination, ont été mises en évidence.

4.2 Analyses chimiques

Le zonage, détecté par la prospection géo-électrique et confirmé par la conductivité électrique de l'eau, est caractérisé par plusieurs types d'eau. En effet, par application de la méthode de Stuyfzand [7], qui est particulièrement adaptée à l'étude du phénomène de salinisation ou du processus inverse, l'adoucissement, le plus grand avantage de cette classification réside dans sa capacité à reconnaître si un échange de cations s'est produit dans l'eau et de quel type d'échange il s'agit. Cette classification est déjà appliquée dans plusieurs pays méditerranéens.

Les eaux sont classées selon quatre critères désignés par des symboles. Les quatre symboles forment un code qui représente un type d'eau :

  • – le premier critère considéré est la concentration (en mg l−1) des chlorures. La détermination de cette dernière représente le premier symbole du code d'un type d'eau (Tableau 2) ;
  • – le deuxième symbole indique la dureté totale (TH) de l'échantillon d'eau, qui est déterminée par les teneurs en calcium et magnésium (Tableau 3). Elle est exprimée en meq l−1. TH (meq l−1) = ([Ca] + [Mg])×5 ;
  • – le troisième symbole renseigne sur la distribution relative des cations et des anions utilisant des diagrammes triangulaires ;
  • – le dernier symbole donne une indication sur la présence et le type d'échange de cations (Tableau 4). La somme de (Na+, K+ et Mg3+), mesurée en meq l−1, est corrigée par rapport à la contribution d'eau de mer, dont le rapport pour une eau d'océan moyenne est : Na+K+MgCl=1,061

Tableau 2

Détermination du premier symbole dans le code d'un type d'eau selon la teneur en chlorures

Determination of the first symbol according to the chloride content

Nom Code Concentration en Cl (mg l−1)
Eau douce ( fresh) F <150
Eau douce–saumâtre ( fresh–brackish) Fb 150–300
Eau saumâtre (brackish) B 300–1000
Eau saumâtre salée (brackish–saline) Bs 1000–10 000
Eau salée (saline) S 10 000–20 000
Eau hypersalée (hyperhaline) H >20 000
Tableau 3

Détermination du deuxième symbole dans le code d'un type d'eau selon la dureté totale des eaux (TH)

Determination of the second according to the content in magnesium and sodium

Nom Code TH (meq l−1)
Eau très douce * <150
Eau douce 0 5 à 10
Eau assez dure 1 10 à 20
Eau dure 2 20 à 40
Eau très dure 3 40 à 80
Eau extrêmement dure 4 80 à 160
Eau extrêmement dure 5 160 à 320
Eau extrêmement dure 6 320 à 640
Eau extrêmement dure 7 640 à 1280
Eau extrêmement dure 8 1280 à 2560
Eau extrêmement dure 9 >2560
Tableau 4

Détermination du code d'échange de cations

Determination of the code of the exchange of cations

Signification Code Conditions (meq l−1)
(Na + K + Mg) en déficit + (Na + K + Mg) corrigé<−(0,5Cl)1/2
(Na + K + Mg) en équilibre 0 −(0,5Cl)1/2⩽(Na+K+Mg) corrigé⩽(0,5Cl)1/2
(Na + K + Mg) en surplus (Na + K + Mg) corrigé>(0,5Cl)1/2

Le Tableau 5 illustre les différents faciès chimiques des eaux du secteur étudié. Les zones A et B sont caractérisées par des eaux saumâtres à salées ; la nappe phréatique se localise principalement dans les calcaires lacustres, dont l'écoulement est relativement lent (perméabilité faible). Plus on s'approche des formations marneuses à dépôts évaporitiques du Messinien, plus le degré de salinisation augmente : cela est dû à l'existence de failles normales, qui mettent en contact ces formations avec celles de l'aquifère (Fig. 7).

Tableau 5

Faciès chimique des eaux du secteur étudié

Chemical facies of the waters in the study area

Zone Type d'eau
A Bs5–NaCl0, Bs6–NaCl–, Bs–5MgCl–
B Bs4–NaCl–, Bs–5NaCl–
C B3–NaCl–, B3–CaCl–
D F2–CaMixte–, Fb–2NaCl–
E F2–CaMixte, B3–NaMixte–
F Fb3–NaCl–, B3–CaCl0, B4–NaCl–

La zone C est caractérisée par des eaux saumâtres : elle est moins affectée par la salinisation. La nappe phréatique se localise dans les limons rouges, qui présentent une puissance relativement importante, mais elle est mal alimentée dans cette zone, à cause d'une divergence de l'écoulement, qui est probablement due à un bombement du substratum marneux. Il faut ajouter à ce facteur l'intense évapotranspiration qui a sévi durant les dernières années de sécheresse, la surexploitation et l'utilisation de certains pesticides.

La zone D est la moins touchée par la contamination : elle montre une eau douce à légèrement saumâtre. Elle coïncide avec des axes de drainage (Fig. 3) ; les puits et les forages de la région montrent des dépôts alluvionnaires (galets, graviers, sables, etc.), témoignant d'une importante chenalisation. La forte perméabilité de ces dépôts assure l'apport quantitatif de l'eau responsable de l'adoucissement de la région : il s'agit d'une zone de recharge.

La zone E présente une eau douce à saumâtre, l'adoucissement de cette région étant dû à la conjugaison de deux facteurs, un écoulement convergent de la nappe au sud de Khenoussa et l'influence de l'oued Charrâa (Fig. 3) ; d'ailleurs, les puits qui se trouvent sur ses rives sont très sensibles à son apport.

La zone F se trouve à cheval sur la flexure englobant le village de Madagh. Elle est caractérisée par une eau douce–saumâtre à saumâtre. L'axe de drainage de la zone D, se heurtant à la flexure, a changé de direction à ce niveau (Fig. 3). Par endroits, les dépôts alluvionnaires se sont cimentés pour former un niveau conglomératique très dur, appelé « nougats » par les agriculteurs de la région ; il joue un rôle d'écran pour la nappe mais, une fois percé, une eau de bonne qualité jaillit.

L'emplacement et la salinisation des deux sources (Ain Chebek et Ain Zebda) s'expliquent largement par le modèle donné sur la Fig. 7. En effet, au niveau de la trouée, la plaine des Triffa s'incruste dans la plaine littorale de Saïdia, à tel point que le bassin topographique de cette dernière ne coïncide pas avec son bassin géologique. Grâce au phénomène de distension, dû au rejet des failles normales conjuguées, les formations de la plaine des Triffa se sont déposées dans la plaine de Saïdia. Cette structure a favorisé l'existence des sources dans cette zone, l'eau, étant en contact du substratum marneux lors de son ascension (débit faible), se chargeant en sels pour atteindre des valeurs de salinité élevées.

Remerciements

Ces travaux ont été menés dans le cadre de deux projets : PARS SDU 74, financé par le Centre national pour la recherche scientifique et technique du Maroc, et Avicenne CTAVI 2073, financé par l'Union européenne.


References

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