Abridged English version
The western part of Cameroon displays an alignment of Tertiary-to-Recent alkaline volcanoes, plutons and grabens extending over more than 1600 km: the Cameroon Line (CL, Fig. 1a) [26]. The CL stretches from the Atlantic oceanic island of Annobon through the Gulf of Guinea and within the African continent. Recently, the CL has been considered as being a huge lithospheric crack tapping a hot deep asthenospheric zone [18].
The present study focuses on mantle-peridotite xenoliths from alkaline basaltic lavas of the Kumba Plain (CL) [27], and presents new petrological data in order to better understand the composition and evolution of the Kumba upper mantle.
The Kumba Plain (Fig. 1b) is a CL graben intercalated between the strato-volcanoes of Mt Cameroon and Mts Rumpi [6]. Volcanic formations of the plain have been emplaced over Panafrican metamorphic formations intruded by granitoids and locally covered by Cretaceous continental sandstones [27]. They commonly enclose mantle peridotite xenoliths.
Major and trace element compositions of minerals were determined by electron microprobe and LA-ICPMS, respectively, at the University Toulouse-3, France (UMR 5563). Bulk-rock major and trace element compositions were determined by X-ray fluorescence (Saint-Étienne Mining School, France) and ICP-MS solution (UMR 5563), respectively. The Kumba mantle peridotites are composed of olivine (58–69 %), orthopyroxene (14–26 %), clinopyroxene (11–17 %) and spinel (1–5 %). They are lherzolites (Fig. 2) and have protogranular and porphyroclastic textures.
Bulk-rock major element compositions point out very low degrees of partial melting and are sometimes in the range of the estimated composition of the primitive mantle. Olivine (Fo90.3–89.4) and orthopyroxene ([Mg]: 90–91) display a narrow compositional range. Spinel Mg# and Cr# vary from 74 to 78 and from 8.85 to 14.10, respectively. Clinopyroxenes ([Mg]: 89–91) have relatively high Cr2O3 (0.65–1.70 wt %) contents. Their Ti (0.01–0.02 afu) and Na (0.06–0.18 afu) contents are different from those of the clinopyroxenes of ophiolite peridotites (Ti: 0.06–0.15; Na: 0.02–0.05). Some clinopyroxenes of the Kumba lherzolites are respectively slightly higher and lower in Ca and Al than those from the Nyos mantle xenoliths (Figs. 3 and 4). However, the Kumba clinopyroxenes are similar to those of some mantle xenolith occurrences from other sectors of the CL [3,5,14,22].
Trace-element compositions display several distinct REE patterns: (1) lherzolites REE patterns (Fig. 5) are homogeneous for MREE and HREE, but differ for LREE with patterns showing either depleted LREE, enriched LREE or flat patterns; (2) clinopyroxene REE patterns (Fig. 5) are enriched in LREE and MREE compared to HREE: [La/Sm]N: 1.34–3.01; [Sm/Yb]N: 1.04–1.73 and [La/Yb]N: 1.47–5.20. Their HREE contents are homogeneous and different from those of clinopyroxenes of the host lavas (Fig. 6), which display a ‘convex’ shape, typical of clinopyroxene equilibrated with alkaline magmas ([La/Sm]N: 1.20–1.29; [Sm/Yb]N: 1.6–1.9 and [La/Yb]N: 1.98–2.34).
Mantle-lherzolite xenoliths from the Kumba Plain were equilibrated within the spinel stability field and are witnesses to the subcontinental CL upper mantle. There are made up of olivine + orthopyroxene + clinopyroxene + spinel without volatile-bearing minerals. They display very homogeneous compositions. Lherzolite and clinopyroxene REE patterns of peridotites have similar shapes (Fig. 5). This implies (i) that there is almost no contamination by host basalts during the rising to the surface, and (ii) that clinopyroxene is the mineral controlling the REE budget. The slight LREE depletion (sample KN08) is attributed to partial melting, while the LREE enrichment (samples KN01 and KN03) reflects cryptic metasomatism [9]. The lack of HREE fractionation indicates that the partial melting occurred in the spinel lherzolite field.
The clinopyroxenes of the Kumba spinel lherzolites have REE patterns different from those of the host lavas (Fig. 6). Consequently, they have not been totally equilibrated with such a type of magmas. That does not imply that they did not experience REE enrichment processes during reactions with similar magmas, but, in that case, percolation of small volumes of magmas and/or chromatographic effects probably occurred [12,20].
The mineralogical, major and trace element characteristics of the studied samples clearly point out that the Kumba upper mantle is essentially lherzolitic in composition and could represent a fertile subcontinental lithospheric mantle only affected by very low degrees of partial melting and cryptic metasomatism.
Finally our data provide the first detailed insight into the upper mantle beneath the Kumba Plain. It appears to be homogeneous and normal by comparison with what occurs beneath other CL localities, especially the one beneath the Nyos volcano, which is heterogeneous [28], and the one beneath the Dibi volcano, defined as ‘abnormal’ [5] because the Dibi mantle peridotites contain spinel and plagioclase. These characteristics may be reliable to the presence of some heterogeneous translithospheric mantle diapirs beneath the CL, and particularly beneath the Nyos Plain [19,27].
1 Introduction
Le Cameroun est parcouru dans sa partie ouest par une chaîne volcanique d’âge Tertiaire à Actuel, qu’on appelle la ligne du Cameroun (Fig. 1(a)). Cette ligne qui jouxte les domaines océaniques et continentaux est large de près de 100 km et s’étire sur près de 1600 km [26]. L’origine de la ligne du Cameroun est très discutée, comme le montrent de nombreuses hypothèses (parfois contradictoires) évoquées pour tenter d’expliquer sa formation et son évolution. Les modèles les plus récents proposent (i) que, sous cette ligne, existe un panache mantellique fossile, accrété sous la lithosphère et remobilisé au cours d’une anomalie thermique récente, contrôlée tectoniquement [10,11,14,16], ou (ii) que cette ligne représente une énorme fissure lithosphérique captant une zone chaude asthénosphérique profonde, surmontée d’une zone froide superficielle [18].
Notre étude porte sur les enclaves de péridotites mantelliques remontées par les laves basaltiques de la plaine de Kumba. Les laves sont sodiques, d’affinité alcaline [27], et semblables à celles des volcans monogéniques de la ligne du Cameroun [23]. Des travaux antérieurs [14] sur deux lherzolites décrivent en partie ces enclaves, mais un échantillonnage plus complet et diversifié nous permet de présenter des résultats originaux sur la nature du manteau à l’aplomb de cette plaine. Ce travail consiste surtout à caractériser la pétrographie, la minéralogie des péridotites, leur chimisme et leur signification en termes de composition et d’évolution du manteau supérieur de la ligne volcanique du Cameroun. Les éléments en traces dans les clinopyroxènes des péridotites sont présentés, afin de les comparer à ceux des clinopyroxènes des laves hôtes, ainsi qu’à ceux des clinopyroxènes des enclaves de péridotites de la plaine volcanique de Nyos, dont le volcanisme est semblable à celui de la plaine de Kumba. Une discussion est présentée quant à la nature et la spécificité de ces enclaves par rapport à quelques gisements de référence de la ligne du Cameroun [3,5,14] et, plus particulièrement, par rapport à celui de Nyos [29].
2 Cadre géologique et gisements
La plaine de Kumba (Fig. 1(b)) fait partie de la série de grabens qui alternent avec les horsts de la ligne du Cameroun. Elle s’étend entre le mont Cameroun et les monts Rumpi et est encadrée par les fleuves Memé et Moungo [6]. La plaine est surmontée par 47 cônes volcaniques formant des reliefs de 20 à 700 m de haut. La plaine est également caractérisée par quatre lacs d’origine volcanique (Barombi Mbo, Barombi Koto, Mbwandong, Disoni), ainsi que par des coulées anciennes, de type pahoehoe, et récentes, de type cheires. L’activité volcanique dans cette région a probablement débuté à l’Éocène [7] et s’est achevée il y a moins de 1 Ma [4,8]. Trois événements volcaniques ont été identifiés dans la plaine de Kumba [13]. Le premier, d’âge supérieur à 10 Ma, a donné naissance à des basaltes de plateau, ou basaltes anciens. Le second, d’âge compris entre 1 et 10 Ma, est responsable de la formation des appareils stromboliens et phréatomagmatiques. Enfin, le troisième, d’âge inférieur à 1 Ma, qualifié de terminal, est responsable de courtes coulées généralement vacuolaires et bien représentées au nord du lac de Kumba. Les formations volcaniques de la plaine de Kumba reposent sur le socle Panafricain. Ce socle, daté à Ngondo vers l’est de la plaine à 657 Ma (âge Rb/Sr) [25], est granito-gneissique, et comporte parfois des niveaux d’amphibolites et de quartzites [27].
Des nodules de péridotites, accidentellement remontés par les laves basaltiques, sont associés aux projections du cône volcanique de Ngongondja, du maar Barombi Mbo ou du lac de Kumba, ainsi que dans les coulées massives de Baduma (route de Mamfé). Les péridotites en enclaves dans les coulées sont généralement de dimensions (taille moyenne : 4,5 × 1,5 à 3,5 × 0,5 cm) réduites par rapport aux nodules enchâssés dans les projections du lac de Kumba et du cône Ngongondja (taille moyenne de 6 à 18 cm de long).
3 Nature des enclaves
Les compositions en éléments majeurs et traces des phases minérales de neuf échantillons ont été analysées respectivement à la microsonde électronique (Camebax SX 50) et à l’ICP-MS (PerkinElmer Elan 6000) couplé à un système d’ablation laser (266 nm Cetak) de l’UMR 5563 de l’observatoire Midi-Pyrénées de Toulouse. Les compositions en éléments majeurs et traces sur roche totale de quatre échantillons ont été analysées respectivement par fluorescence X (École des mines de Saint-Étienne) et par solution ICP-MS (UMR 5563, OMP, Toulouse). Les compositions modales ont été obtenues par comptage de points au microscope, analyse d’image et, dans le cas des échantillons analysés sur roche totale, en utilisant les compositions en éléments majeurs (roche totale et minéraux) et le programme de mélange PETMIX [31] suivant le modèle de base [15].
Les échantillons que nous avons étudiés sont tous constitués uniquement de quatre phases minérales, à savoir : olivine, orthopyroxène, clinopyroxène et spinelle. Les textures observées dans les péridotites de Kumba correspondent aux types protogranulaire et porphyroclastique, avec une dominance des textures protogranulaires (65 % échantillonnage) à gros grains (>1 cm) ou à grains fins (<6 mm). Les compositions modales des échantillons de péridotites de Kumba permettent de mettre en évidence, dans le diagramme triangulaire Ol–Opx–Cpx [24], un seul et unique type de roche mantellique : des lherzolites (Fig. 2). Dans ces lherzolites, le péridot dépasse toujours 55 % de la composition modale. Les pyroxènes (ortho et clinopyroxène) n’excèdent pas 40 % du volume total de la roche. À ces phases essentielles s’ajoutent, de façon constante, mais en faible quantité (≤5 %), du spinelle brun foncé à marron. Les proportions modales sont variables, avec 58–69 % d’olivine, 14–26 % d’orthopyroxène, 11–17 % de clinopyroxène et 1–5 % de spinelle.
4 Composition en éléments majeurs des lherzolites et de leurs minéraux constitutifs
Les quatre lherzolites analysées se caractérisent par des compositions en éléments majeurs homogènes et typiques de lherzolites mantelliques, seulement peu ou pas appauvries en éléments majeurs magmatophiles, donc peu affectées par des processus de fusion partielle (Al2O3 : 3,37–3,85 ; CaO : 2,87–3,37 ; TiO2 : 0,135–0,16). Les rapports Mg* (100 × Mg/[Mg + Fetotal]) varient entre 89,2 et 90,15, et s’intègrent donc dans l’intervalle estimé pour le manteau primitif (88,7–90,1 ; voir le site internet GERM : http://www.earthref.org).
Olivine, enstatite et diopside forment la paragenèse minérale des péridotites de Kumba, qui est complétée par du spinelle. Les compositions chimiques des olivines sont homogènes dans les lherzolites de Kumba. Les pourcentages molaires de forstérite, oscillant entre 89,4 et 90,3, sont typiques des enclaves mantelliques. Les porphyroclastes et les néoblastes d’olivine ont des compositions comparables. Les orthopyroxènes montrent de très fines lamelles d’exsolutions de clinopyroxènes, essentiellement au centre des porphyroblastes, puisque les néoblastes en sont généralement dépourvus. Les orthopyroxènes sont très magnésiens et proches du pôle enstatite (En89,60–88,90). Leurs rapports Mg* (=100 × Mg/[Mg + Fetotal]) varient très peu et sont compris entre 90 et 91.
Le clinopyroxène apparaît toujours en faible quantité (≤17 %). Les clinopyroxènes des péridotites de Kumba, relativement riches en Cr2O3 (0,65–1,70 %), sont des diopsides (En49,45–47,25Fs6,20–4,55–Wo47,90–44,68), avec des valeurs des rapports AlIV/AlVI (0,6–0,8) et des teneurs en molécules Ca-Tschermark (8 %) et jadéite (0,1 %) faibles, suggérant une équilibration à des pressions compatibles avec celles d’équilibre des pyroxènes du manteau supérieur subcontinental [20]. Les teneurs en Ti (0,01–0,02 afu) et Na (0,06–0,18 afu) sont très différentes de celles des diopsides des péridotites ophiolitiques (Ti : 0,06–0,15 ; Na : 0,02–0,05). De plus, le rapport AlVI/AlIV, supérieur à 1 (1,3–1,6), est semblable à celui des clinopyroxènes des péridotites du manteau supérieur subcontinental, en particulier à celui des péridotites de l’Adamaoua [5] et du Canada [21]. Les rapports Mg* (Mg* : 89–91) ne varient pas de façon significative. Certains clinopyroxènes des lherzolites de Kumba sont légèrement plus enrichis en Ca par rapport à celles des lherzolites de Nyos (Fig. 3) et inversement pour les teneurs en Al (Fig. 4). Toutefois, les compositions en éléments majeurs des clinopyroxènes des péridotites de Kumba sont globalement comparables à celles des enclaves de quelques péridotites de la ligne du Cameroun, notamment à celles des péridotites des lacs Nyos et Nji, dans la région d’Oku [14,22], à ceux des lherzolites à spinelle et plagioclase du volcan de Dibi dans l’Adamaoua [5], ou à ceux des péridotites de Sao Tomé [3] dans le secteur océanique de la ligne du Cameroun.
Le spinelle est ubiquiste dans les enclaves de lherzolites de Kumba. Il a une couleur brune et n’est pas très abondant dans la roche. Il est parfois fragmenté sous forme de petites sections globuleuses dispersées dans les silicates. Les rapports Mg* (=100 × Mg/[Mg + Fe2+]) et Cr* (=100 × Cr/[Cr + Al]) de ces spinelles oscillent entre 74 et 78 et entre 8,85 et 14,10, respectivement. La lherzolite KN09 a le spinelle le plus riche en chrome (Cr* = 14,10) et est considérée comme une péridotite intermédiaire par rapport aux autres qui sont fertiles (Cr* < 13). Toutefois, les rapports Cr* des spinelles sont toujours faibles et correspondent à celui des « spinelles alumineux » (Cr* < 25), qui sont classiquement interprétés comme témoignant de niveaux peu résiduels du manteau supérieur [2]. Les spinelles des péridotites de Kumba sont des chromites magnésiennes et alumineuses, et font donc partie des spinelles chromifères mantelliques. Le spinelle n’est pas en inclusion dans les autres phases minérales de la roche, ce qui signifie que les textures protogranulaires observées ne sont pas secondaires, mais primaires. Les bordures des cristaux sont en général moins alumineuses et plus chromifères que les cœurs.
5 Composition en éléments traces des lherzolites de Kumba et de leurs clinopyroxènes
Les spectres des terres rares des roches totales des lherzolites sont homogènes en ce qui concerne les terres rares intermédiaires (MREE) et lourdes (HREE), mais différents au niveau des terres rares légères (LREE), avec des spectres, soit appauvris en LREE (échantillon KN08), soit presque plats et proches de la composition du manteau primitif théorique (échantillon KN02), ou alors encore légèrement enrichis en LREE par rapport aux MREE et HREE (échantillon KN01 et, dans une moindre mesure, KN03) (Fig. 5).
Les clinopyroxènes sont les hôtes majeurs des éléments en traces incompatibles (comme les REE) dans les lherzolites de la plaine volcanique de Kumba, comme dans tous systèmes basaltiques et assimilés (manteau) dépourvus de minéraux contenant des éléments volatils (amphibole, phlogopite, apatite…). Les compositions en éléments traces des clinopyroxènes des péridotites sont enrichies en terres rares par rapport aux estimations du manteau primitif [17]. Leurs spectres de terres rares (Fig. 6) montrent des profils enrichis en terres rares légères et terres rares intermédiaires par rapport aux terres rares lourdes [La/Sm]N : 1,34–3,01 ; [Sm/Yb]N : 1,04–1,73 et [La /Yb]N : 1,47–5,20. Les teneurs en terres rares lourdes sont homogènes et bien différentes de celles des clinopyroxènes des laves hôtes qui présentent des spectres de terres rares dits « convexes » et typiques de clinopyroxène parfaitement en équilibre avec des magmas alcalins ([La /Sm]N : 1,20–1,29 ; [Sm /Yb]N : 1,6–1,9 et [La /Yb]N : 1,98–2,34).
6 Discussions et conclusion
Les enclaves de lherzolites remontées par les laves alcalines de la plaine de Kumba ont été équilibrées dans le domaine de péridotites mantelliques à spinelle et correspondent à des témoins du manteau supérieur subcontinental à l’aplomb de la ligne du Cameroun. Aucune harzburgite n’a été observée. Les lherzolites de Kumba se caractérisent par une grande homogénéité des paragenèses minérales, uniquement à olivine + orthopyroxène + clinopyroxène + spinelle et sans minéraux hydroxylés (amphibole ou phlogopite), mais aussi par une grande homogénéité des compositions en éléments majeurs et traces, aussi bien dans les minéraux que dans les roches totales. Globalement, le champ des spectres de terres rares des péridotites et de leurs clinopyroxènes sont peu variables et se rapprochent parfois de ceux des estimations du manteau primitif (échantillon KN02), ce qui est également vrai pour les compositions en éléments majeurs magmatophiles des quatre lherzolites analysées.
Les spectres de terres rares des lherzolites de Kumba et des clinopyroxènes qu’elles contiennent ont des allures presque identiques (Fig. 5), pour des niveaux de concentrations différents. Ceci signifie (i) qu’il n’y a pas (ou que peu) eu de contamination par les basaltes porteurs au cours de la remontée des enclaves et (ii) que le clinopyroxène peut expliquer à lui seul le budget en terres rares des lherzolites de Kumba et donc que ces xénolites n’ont pas ou que peu été perturbées depuis la dernière phase d’équilibration des clinopyroxènes [1]. Le léger appauvrissement en terres rares légères par rapport aux autres terres rares observé pour la lherzolite KN08 témoigne d’un épisode de fusion partielle, alors que les enrichissements en terres rares légères observées pour d’autres échantillons (KN01, KN03) sont significatifs d’un métasomatisme cryptique [9]. L’absence de fractionnement chimique au niveau des terres rares lourdes indique que l’épisode de fusion partielle s’est produit dans le faciès des lherzolites à spinelle. Ceci est en accord avec les températures estimées (885–1030 °C) avec le géothermomètre pyroxénique de Wells [30].
Les spectres de terres rares des clinopyroxènes des péridotites, d’une part, et des laves hôtes d’autre part sont différents (Fig. 6). Par conséquent, les clinopyroxènes des lherzolites de Kumba n’ont pas été totalement équilibrés avec (ou ne sont pas de purs cristallisats) des magmas similaires aux laves hôtes, ce qui ne signifie pas, cependant, qu’ils n’aient pas été enrichis en terres rares légères par réaction avec ce type de magmas. Dans ce cas, il faut envisager des réactions avec de faibles volumes de magma et des processus du type « effet chromatographique » [12,20].
Toutes ces caractéristiques font que le manteau subcontinental à l’aplomb de la plaine de Kumba apparaît très différent de celui à l’aplomb de la plaine de Nyos, qui n’est pourtant distante que d’environ 250 km. En effet, au vu des résultats des études [19,27,29], il apparaît que le manteau sous Nyos est beaucoup plus hétérogène, aussi bien pétrographiquement (lherzolites, harzburgites et wehrlites, mais aussi pyroxénites) que minéralogiquement (présence d’amphibole et de phlogopite) et chimiquement (spectres de terres rares beaucoup plus variés notamment, voir par exemple la Fig. 7). Le manteau de Nyos a localement davantage fondu et a été ensuite affecté par des processus de métasomatisme cryptique (enrichissement chimique seul) et modal (enrichissement chimique plus apparition de nouvelles phases minérales), alors que le métasomatisme est beaucoup plus limité et seulement cryptique dans le cas de Kumba (Fig. 7).
Le manteau supérieur à spinelle, à l’aplomb de la plaine de Kumba, est donc essentiellement constitué de lherzolites. Ce manteau a très peu fondu avant d’être légèrement enrichi, notamment en terres rares légères (léger métasomatisme cryptique). Malgré cet enrichissement, ce manteau est peu modifié par rapport à celui de Nyos, mais aussi moins réfractaire. Le manteau à l’aplomb de la plaine de Kumba pourrait ainsi représenter une lithosphère subcontinentale peu ou pas modifiée. Il est homogène par rapport à celui de Nyos, hétérogène et beaucoup plus affecté par le métasomatisme [29] et par rapport à celui remonté sous forme d’enclaves au niveau du volcan de Dibi, situé dans la région de l’Adamaoua. Le manteau supérieur de Dibi a été défini comme « anormal » par Dautria et Girod [5], car il montre deux phases minérales (spinelle et plagioclase) théoriquement issues de différents domaines de stabilité. Nous proposons de relier toutes ces caractéristiques à la présence de diapirs mantelliques translithosphériques hétérogènes le long de la ligne du Cameroun, un diapirisme particulièrement bien exprimé au niveau des plaines continentales de cette ligne [27]. Le modèle de polydiapirisme proposé pour expliquer l’origine de la ligne du Cameroun [19,27] est ainsi soutenu par notre étude.
Remerciements
Ce travail a été réalisé grâce à une bourse du Gouvernement français, dans le cadre d’une convention avec l’IRGM du Cameroun. P. de Parseval, F. Candaudap et C. Boucayrand sont remerciés pour leur aide à l’acquisition des données analytiques et S. Petitjean pour sa collaboration. Les auteurs remercient C. Jaupart et J. Touret pour leur travail de révision.