Abridged version
Lower Cambrian Saint Petersburg blue clays are a part of a detrital sedimentary series, made of alternating clays, silts, and sandstones overlying the plutonic Archean Baltic Shield. This series is dated from Proterozoic to Lower Cambrian, inclusively. It is almost horizontal, dipping gently 2 to 4° towards the Moscow syneclise. Despite its age, it is not affected by any orogenic deformation or metamorphism.
At the upper part, Lower Cambrian (dated 533±8 Ma) ‘Saint Petersburg blue clays’ (Lontova Formation) are up to 116-m thick. In the Saint Petersburg area, they outcrop below Quaternary moraines. Southwards clays are covered by Ordovician limestones.
The ‘blue clays’ derive from marine muds. No Trilobites are reported in the Lontova Formation; only primitive Protozoars and Acritarchs can be found. They are quite homogeneous, without noticeable sedimentation differences. They are silty clays, with dominant (more than 50%) clay particles (<2 μm) and about 30% silt (2–60 μm) particles.
The main clay minerals are illite, with subordinate chlorite and kaolinite. Mixed layers illite/smectite are dominant in the <0.1-μm or even <0.06-μm granulometric fractions. Main minor minerals are glauconite, quartz, and pyrite.
With a plasticity index of 19, they correspond to plastic (and soft) clays. Their natural water content is 16–17%, porosity around 31% and void ratio 0.43–0.49 (Table 3).
Propriétés pétrophysiques d'argiles bleues, d'après Lomtadze [8] et Fursa [4].
Geotechnical properties of blue clays, after Lomtadze [8] and Fursa [4].
Valeurs : min–(moyenne)–max | ||
Lomtadze [8] | Fursa [4] | |
Teneur en eau naturelle (%) | 10,0–(16,6)–28,0 | (19,5) |
Densité (g cm−3) | 1,96–(2,20)–2,31 | (2,10) |
Indice des vides | 0,43–0,49 | (0,58) |
Porosité (%) | 24,0–(31,5)–45,0 | (36,7) |
Indice de plasticité IP | 14,0–(19,0)–22,0 | (19,2) |
Consistance | (0,24) |
Besides their absence of metamorphism and of any trace of orogenic deformation, despite their old age, their most remarkable characteristic is a prominent discontinuity network easy to observe in quarries. However, these joints are very difficult to see on drill cores or in underground works. In the Saint Petersburg subway, it was found that joints are closed up, due to natural stresses, at the exception of rare non-lined up sections, where they may reopen by drying.
Photographs in Figs. 1–3 show how joints are fresh, neither filled by any material nor cemented. The vertical joints are particularly – and unexpectedly – developed. Some of them show traces of oxidation, probably due to water circulation. The volume of the blocks does not go much over 1 m3. The matrix is massive when fresh. It rapidly turns to horizontally laminated by weathering (drying, freezing/thawing).
It is likely that this discontinuity network has played a major role in the drainage of the water content of the initial mud, which should have been more than 50 times the present water content of the clays.
The salinity of the present pore water has been found [1] to be much lower than marine water, hence the hypothesis of dilution by infiltration of fresh water at geologically known periods of emersion.
Even if the causes and the epochs remain hypothetical important, water migrations have occurred through the clay formation.
As a conclusion, Saint Petersburg Lower Cambrian blue clays represent an analogue of an early stage of consolidated and lithified claystones and siltstones, a type of rocks in which storage of nuclear waste are envisaged in France.
1 Introduction
Une série détritique terrigène argilo-silto-gréseuse recouvre le craton cristallin du Bouclier balte. Avec des lacunes, elle va du Protérozoı̈que au Cambrien inférieur inclus. Vient ensuite un recouvrement calcaire ordovicien. Cette série sédimentaire ne montre aucune trace de métamorphisme ou de mouvements orogéniques. Les formations sont concordantes et subhorizontales. Un pendage de 2 à 4° est dirigé vers la synéclise de Moscou.
Au sein de cet ensemble, la formation des « argiles bleues de Saint-Pétersbourg », homogène, atteignant 116 m d'épaisseur, est assez remarquable. Elle affleure – sous le recouvrement morainique quaternaire – du rivage sud de la Baltique jusqu'à une trentaine de kilomètres au sud de Saint-Pétersbourg. Au-delà, vers le sud, elle est recouverte par les calcaires ordoviciens. D'ouest en est, elle affleure de l'Estonie incluse à la limite orientale du lac Ladoga.
Gignoux [5] mentionnait déjà, en 1936 et 1943, l'existence de ces argiles cambriennes et soulignait leur exceptionnelle absence de transformations, malgré leur âge. Il comparait leur fraı̂cheur à celle des argiles oligocènes du bassin de Paris.
À l'heure du creusement, en France, d'un laboratoire souterrain pour l'étude du stockage des déchets radioactifs dans des argilites silteuses consolidées du Callovo-Oxfordien de Bure, dans la Haute-Marne, il est utile de décrire les argiles silteuses de Saint-Pétersbourg, car elles représentent un modèle géologique de l'état initial d'une telle formation, notamment du point de vue de la fissuration.
2 Stratigraphie
Selon la carte géologique de l'URSS de 1987–1988, le Cambrien est représenté par l'étage Lontova, daté du Cambrien inférieur. Le Cambrien moyen et supérieur est lacunaire. Lontova est constitué de deux séries : Lomonossov, à la base, 10 à 15 m de grès et argiles ; Siversk, au-dessus, série des argiles bleues de Saint-Pétersbourg. Lontova repose sur le Vendien Protérozoı̈que supérieur par la formation argilo-gréseuse Rovno.
2.1 Origine
Les argiles bleues sont d'origine marine [9]. Elles dérivent de vases déposées dans des conditions réductrices, propices à la formation de sulfures, notamment dans leur partie orientale. Vers l'ouest, vers la mer ouverte, elles renferment des Platysolénites, tubes porcelanés blancs attribués à des Protozoaires et des Achritarches ; aucun Trilobite n'a été décrit dans Lontova, considéré de ce fait comme pré-Trilobite.
Sur toute leur extension et leur épaisseur, l'absence de stratification nette et l'homogénéité de la composition granulométrique témoignent de conditions de dépôt très calmes des points de vue tectonique et probablement climatique.
2.2 Datation
Gorokhov et al. [6] ont fait des mesures par la méthode Rb Sr sur des échantillons provenant du sondage de Kostovo, à environ 50 km au sud-est de Saint-Pétersbourg, qui a traversé les agiles bleues sur 112 m, entre les profondeurs 126 et 238,7 m. Le résultat est 533±8 Ma pour des illites bien cristallisées, jugées représentatives de l'âge du dépôt.
3 Lithologie
À l'affleurement, les argiles bleues de Saint-Pétersbourg sont effectivement d'un joli bleu clair. En revanche, elles sont verdâtres en carrière. Hormis le réseau de fracturation qui les affecte, elles sont peu fissiles. Ce sont bien des argiles au sens minéralogique et granulométrique.
3.1 Composition minéralogique
Trois échantillons ont été prélevés dans la carrière de Krasny Bor (30 km au sud-est de Saint-Pétersbourg, exploitée pour une briqueterie jusqu'à 40 m de profondeur), à 7,5, 12 et 20 m de profondeur, respectivement. Identifiés par diffraction de rayons X au Centre de géologie de l'ingénieur, sur lames de roche totale sédimentées sans séparation granulométrique, ils ont donné des résultats similaires : illite dominante (environ 60%) et chlorite (environ 40%). C'est aussi la composition donnée par l'exploitant (avec parfois présence de kaolinite).
La fraction granulométrique <0,1 μm étudiée par Gorokhov [6] sur des échantillons du sondage de Kostovo prélevés entre 8 et 34 m de profondeur au sein de la formation des argiles bleues révèle en outre 85 à 90% d'interstratifiés illite–montmorillonite, avec 10 à 15% de chlorite. Ces argiles bleues sont d'ailleurs très adsorbantes [7]. Enfin, des nodules de glauconite sont également présents localement.
Les minéraux autres que ceux des argiles sont essentiellement quartz (74%) et feldspaths (15%), dans la fraction légère, et pyrite (96%) dans la fraction lourde, avec zircon, épidote, hornblende, apatite et tourmaline [2].
3.2 Composition granulométrique
Une compilation inédite de I. Ivanov, portant sur la partie des argiles bleues qui affleure sous la couverture morainique, donne les résultats reportés dans le Tableau 1.
Composition granulométrique (%).
Particle size distribution (%).
Profondeur | % Fractions granulométriques | ||||
<1 μm | 1–2 μm | 2–10 μm | 10–50 μm | >50 μm | |
15–10 m | 30–48% | 20–25% | 7–15% | 24–33% | 0–2% |
>10 m | 28–48% | 19–26% | 5–12% | 22–32% | 0–1% |
Des résultats globaux inédits provenant de la carrière Krasny Bor, exploitée par la société Knauf sont rapportés dans le Tableau 2. Ils concernent la production de l'année 1992. La production actuelle est de 20 à 24 000 t/mois.
Composition granulométrique (%). Carrière de Krasny Bor (société Knauf).
Particle size distribution Krasny Bor quarry (company Knauf).
Année | % Fractions granulométriques | ||||
<1 μm | 1–10 μm | 10–100 μm | 100–200 μm | >200 μm | |
1992 | 26,8% | 48,5% | 24,2% | 1,2% | traces |
On peut en conclure que la fraction argileuse – au sens granulométrique – inférieure à 2 μm, dépasse 50% du total.
On note que la fraction silteuse (2 ou 4 à 62 μm), bien que non exactement identifiée, mais de l'ordre de 30%, est suffisante pour définir des argiles silteuses. On note aussi l'importance de la phase très fine inférieure à 1 μm.
3.3 Propriétés pétrophysiques
Elles sont résumées dans le Tableau 3.
Plus récemment, Dashko et Plechkova [3] ont montré que les propriétés des argiles bleues de la carrière Nikolski proche de celle de Krasny Bor évoluent de la surface à la profondeur maximale de la carrière (40 m). Sur les 17 premiers mètres, la teneur en eau naturelle et la densité sont variables : 21,4 à 16% pour la teneur en eau, 1,95 à 2,22 pour la densité. Au-delà de 17 m, elles sont quasi constantes : 15 à 18% pour la teneur en eau, 2,15 à 2,22 pour la densité.
En conclusion, les argiles bleues de Saint-Pétersbourg sont donc des argiles silteuses plastiques (15<IP<40), molles à très molles (consistance <0,25).
4 Réseau de discontinuités
Les argiles sont parfois considérées comme des milieux continus, réputés être le propre des « sols » des mécaniciens, par opposition aux « roches », milieux discontinus.
Les argiles bleues de Saint-Pétersbourg offrent un remarquable exemple de réseau de fissuration, bien observable en carrière. Les photographies des Figs. 1–3 ont été prises dans la carrière de Krasny Bor. Elles montrent la fraı̂cheur des joints, sans remplissage ni cimentation. Les plans verticaux sont particulièrement développés.
Les blocs délimités par les fissures ne dépassent guère 1 m3. Dashlo et Plechkova [3] donnent une évolution de la taille des blocs avec la profondeur (Tableau 4) mesurée à la carrière Nikolski, proche de celle de Krasny Bor et tout à fait analogue.
Évolution de la taille des blocs in situ en fonction de la profondeur. Carrière Nikolski, d'après Dashko et Plechkova [3].
Evolution of the size of blocks, in situ, with depth, after Dashko and Plechkova [3].
Profondeur à partir du toit | Taille des blocs entre |
des argiles (m) | les fissures (m) |
0–3 | 0,1–0,2 |
3–8 | 0,2–0,3 |
8–17 | 0,3–0,4 |
17–26 | 0,5–0,6 |
26–40 | 0,6–0,7 |
>40 | 1–1,2 |
La matrice des blocs paraı̂t massive. Cependant, l'altération fait rapidement apparaı̂tre un fin litage.
Des traces d'oxydation nettement visibles, notamment sur les joints verticaux, témoignent de circulations d'eau. Il est vraisemblable que le réseau de fracturation a servi au drainage de l'eau des vases initiales, dont la teneur en eau devait être de l'ordre de 50 fois supérieure à la teneur en eau actuelle. Bityukova et al. [1] indiquent que l'eau des pores des argiles bleues a une salinité très inférieure à celle de l'eau de mer et suspectent une dilution par infiltration d'eau douce à partir de la surface. Quelles qu'en soient les causes et les époques, il y a eu migration d'eau dans la masse des argiles bleues.
Ajoutons que, si le réseau de fracturation est partiellement ouvert en carrière et à proximité de la surface du sol, il est fermé en profondeur. Les parties du métro de Saint-Pétersbourg creusées dans les argiles bleues n'ont aucune venue d'eau. Cependant, il arrive que des variations de température ou d'hygrométrie provoquent sa réouverture locale, ainsi qu'on l'observe sur des portions de galeries non revêtues.
5 Conclusion
Les argiles bleues de Saint-Pétersbourg, remarquablement exemptes de métamorphisme et de déformation – malgré leur âge Cambrien inférieur –, silteuses, plastiques, offrent un bel exemple de réseau de discontinuités affectant une formation argileuse et ayant permis la migration de l'eau dans sa masse.
Elles constituent un « analogue naturel » de l'état presque initial de formations similaires ayant subi des transformations plus avancées comme, par exemple, les argilites silteuses du Callovo-Oxfordien de Bure (Haute-Marne, France), dans lesquelles un laboratoire souterrain est en cours de creusement.
Remerciements
Les auteurs remercient l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire pour son soutien scientifique et financier, ainsi que les Professeurs B. Haguenauer, J.-P. Piguet et J. Touret pour leurs revues constructives.