1 Crise politique et culturelle
Rappelons d’abord, sur le plan politique et culturel, que la conférence parisienne de 1974 eut lieu alors que vibraient encore, de part et d’autre de l’Atlantique, les effets de la guerre du Vietnam et des grandes contestations étudiantes de 1968, ainsi que les échos du festival de musique de Woodstock qui se tint du 15 au 17 août 1969 – Neil Armstrong (1930–2012) ayant par ailleurs fait son premier pas sur la lune le 21 juillet 1969. Pour le dire autrement, à cette époque, la « révolte contre toutes les formes du pouvoir », dont celui de la science, fit alors fortune. Aux yeux d’Anne Fagot-Largeault, l’originalité de la crise politique des années 1960–1970 fut moins d’avoir lancé des idées « réellement neuves » que d’avoir fait éclater ces idées au sein d’un « large public ». Ainsi, selon elle, la génération des années 1960–1970 prit conscience, entre autres, des « responsabilités de la collectivité » face aux dommages qu’une puissante « machine de recherche » pouvait faire subir à la société civile et à l’environnement [1] (pp. 12–13).
2 Essor de la biologie
Du côté des scientifiques, les années 1970 ont connu d’importantes percées dans le domaine de la recherche biologique. Comme l’a rappelé Fagot-Largeault, les recherches menées en 1972–1973 par les microbiologistes Hamilton O. Smith (1931) et Daniel Nathans (1928–1999) ont ouvert l’ère du « bricolage des gènes ». Certes, fait-elle remarquer, à cette époque, il y avait encore de la distance entre la manipulation des génomes bactériens et celle du génome humain. Mais ces nouvelles expériences ne manquèrent pas d’inquiéter. Et l’on s’interrogea sur les conséquences potentielles de ces travaux novateurs. Ainsi, en 1974 – à l’époque de la conférence parisienne « Biology and the future of man » – le biochimiste américain Paul Berg (1926) proposa à ses collègues biologistes un moratoire sur certaines manipulations en génétique. Cette démarche déboucha sur la conférence d’Asilomar, en Californie, en février 1975. On y débattit des risques et des moyens de contrôler certaines recherches biologiques.
Durant ces mêmes années, on s’est également interrogé sur la contraception et l’avortement ainsi que sur la fertilisation in vitro. Ainsi, en France – où se tint en septembre 1974 la conférence « Biology and the future of man » – Simone Veil (1927), alors ministre de la Santé, présenta le 26 novembre 1974 son projet de loi sur l’avortement devant les députés français. Et la « loi Veil », qui légalisait l’interruption volontaire de grossesse, fut ensuite promulguée le 17 janvier 1975. Quant à la fertilisation in vitro, elle allait être mise en avant dans le grand public, quelques années après la conférence parisienne, par la naissance en 1978 au Royaume-Uni du premier « bébé-éprouvette », du nom de Louise Brown2.
De fameuses controverses allaient également attirer l’attention du grand public sur les disciplines biomédicales. Ce fut le cas, juste après la conférence de Paris, de l’affaire Karen Ann Quinlan (1954–1985), qui débuta en 1975 aux États-Unis et qui y ouvrit un intense débat sur la question de la réanimation, de la définition de la mort et de l’euthanasie.
3 Scandales en recherche clinique
Au cours des années 1960 et 1970, aux États-Unis, plusieurs scandales liés à la recherche clinique déclenchèrent également une prise de conscience du grand public quant au non-respect du principe du « consentement » du sujet humain dans le milieu médical.
En 1963, ce fut le scandale du Jewish Chronic Disease Hospital, où des cellules cancéreuses furent transplantées sur vingt patients très âgés. Il y eut ensuite l’affaire de la Willowbrook State School en 1964, où près de huit cents enfants retardés mentaux furent délibérément infectés par le virus de l’hépatite. Deux ans après, en 1966, l’anesthésiste Henry K. Beecher (1904–1976) publiait un article intitulé « Ethics and Medical Research » dans le New England Journal of Medicine. Il y démontrait, preuves à l’appui, que certains chercheurs américains les plus reconnus poursuivaient des expériences similaires à celles qui avaient été condamnées par le tribunal de Nuremberg, suite à la seconde guerre mondiale. Cet article engagea un large débat national.
4 Naissance de la bioéthique
C’est en 1970 que le terme anglais bioethics fut forgé. Bioethics figurerait, pour la première fois, dans un article signé par un chercheur oncologiste de l’université du Wisconsin – Potter Van Rensselaer (1911–2001) – intitulé Bioethics, the science of survival (1970). Le terme apparut ensuite, chez le même auteur, en 1971, dans son livre Bioethics: Bridge to the future.
En 1972, deux ans avant la conférence parisienne « Biology and the future of man », un nouveau scandale retentissant survint aux États-Unis : la Tuskegee Syphilis Study (1932–1972). On apprit que des médecins américains, avec l’accord du département de la Santé, avaient étudié les effets de la syphilis, en ne soignant délibérément pas plusieurs centaines de patients noirs et pauvres de l’Alabama, alors que la pénicilline avait été découverte en 1928 et qu’elle avait été introduite dans la thérapeutique au début des années 1940.
C’est toujours à la même époque, en 1974 – l’année de la conférence parisienne – que le Congrès américain créa la National Commission for the Protection of Human Subjects of Biomedical and Behavioral Research, qui siégea de 1974 à 1978. Cette commission étudia les principes fondamentaux devant guider la recherche et les conditions du consentement chez les enfants, les prisonniers et les personnes handicapées mentalement. Pour ne citer que lui, le philosophe américain Tom Beauchamp (1939) a participé à cette commission. Beauchamp fut ensuite l’auteur en 1979 de Principles of Biomedical Ethics avec le philosophe américain James Childress (1940).
À la même époque, un autre groupe pluridisciplinaire se mit également à réfléchir sur le thème « The foundations of ethics and its relationship to science ». Ces travaux furent publiés en quatre volumes entre 1976 et 1980 par les philosophes américains Hugh Tristram Engelhardt (1941) et Daniel Callahan (1930). Par ailleurs, la publication en 1978, sous la direction de Warren T. Reich, des quatre volumes de l’Encyclopedia of Bioethics officialisait le nouveau champ de recherches qu’était devenu la « bioéthique ».
5 Accidents, érosion de la planète, épuisement des ressources naturelles
Dans la nébuleuse de faits marquants des années 1960–1970, des accidents et des conséquences néfastes liés à des activités militaires ou civiles aiguisèrent une conscience environnementale naissante. Ainsi, comme le signale Fagot-Largeault, à la suite des essais atomiques effectués par les États-Unis entre 1951 et 1962 dans le désert du Nevada, 375 cas de cancers furent révélés. Quant à l’atoll de Bikini en Océanie, qui avait été pollué par les essais de la bombe H américaine, il fut repeuplé en 1963 avant d’être à nouveau évacué en 1978. Fagot-Largeault rappelle également qu’au moins trois satellites américains porteurs de matériaux nucléaires étaient retombés au sol en 1964, en 1968 et en 1970 [1] (pp. 20–21). Ajoutons que deux autres accidents majeurs ont encadré la conférence mise sur pied en 1974 à Paris. En 1967, ce fut la marée noire du Torrey Canyon. En 1978, ce fut le désastre de l’Amoco Cadiz, du nom du pétrolier affrété par la compagnie américaine Amoco transport, qui fit naufrage au large des côtes bretonnes.
À côté de ces accidents, dans ces mêmes années 1960 et 1970, on prit aussi conscience de problèmes environnementaux dus à l’impact massif des activités humaines sur la biosphère. Et l’on dénonça dès lors la mise à mal de la planète et l’épuisement des ressources naturelles. Ainsi, ce qui s’appelait alors le World Wildlife Fund (WWF) ou Fonds mondial pour la vie sauvage fut fondé en 1961. En 1962, aux États-Unis, la biologiste américaine Rachel Carson (1907–1964) publiait Silent Spring. Un ouvrage qui dénonçait l’usage des pesticides et la mort des insectes et des oiseaux. Comme le souligne le philosophe Dominique Bourg, ce livre toucha « pour la première fois le grand public et à l’échelle internationale ». Et il a contribué à la création ultérieure de l’Environmental Protection Agency et à l’adoption des premières grandes lois antipollution.
En France, en 1965, paraissait le livre du zoologiste français Jean Dorst (1924–2001) : Avant que nature meure. Aux yeux de Bourg, ce livre a également joué un « rôle international significatif » [2] (p. 95). Toujours en France, une des premières contributions aux critiques de la croissance y fut l’œuvre de l’agronome René Dumont (1904–2001) [2] (p. 96) – auteur, entre autres, de Nous allons à la famine en 1966 et de L’Agronome de la faim en 1974. Notons que Jean Dorst – alors professeur de zoologie au Muséum national d’histoire naturelle – et René Dumont – alors professeur d’agronomie à l’Institut national agronomique (Paris-Grignon) – participèrent tous deux, en 1974, à la conférence « Biology and the future of man ».
À la même époque, en 1972, deux ans avant la conférence parisienne, deux importants rapports sur l’environnement virent le jour. Le rapport Meadows fut rédigé par une équipe du Massachusetts Institute of Technology (MIT). Il s’intitulait en français Halte à la croissance ? et faisait suite à une demande du Club de Rome – un groupe de réflexion fondé à Rome en 1968 afin de réfléchir aux problèmes auxquels devaient alors faire face les sociétés tant industrialisées qu’en développement.
Le second rapport fut rédigé par le microbiologiste René J. Dubos (1901–1982) et l’économiste Barbara Ward (1914–1981). Son titre français était Nous n’avons qu’une terre et il faisait suite à une demande de l’ONU afin de préparer la United Nations Conference on the Human Environment, qui se tint à Stockholm du 5 au 16 juin 1972.
6 Naissance de l’éthique environnementale
Précisons que l’« écologie » est entendue comme la science ayant pour objet les relations des êtres vivants (animaux, végétaux, micro-organismes) avec leur environnement. Elle est le domaine de l’écologue ou de l’ingénieur écologue. L’« écologisme » désigne, lui, un courant de pensée (idéologique et politique) qui se veut respectueux des équilibres naturels, mais qui défend aussi certaines valeurs. C’est le domaine des écologistes. Quant à l’« éthique environnementale » – ou « écoéthique » ou encore « éco-philosophie » – elle s’est développée sous l’impulsion d’écologistes et de philosophes de manière significative au début des années 1970.
L’« éthique environnementale » connaît plusieurs courants de pensée. Pour le « zoocentrisme », la communauté morale doit englober les animaux. Ainsi, en 1975, soit un an après la conférence parisienne, paraissait l’ouvrage Animal liberation–A new ethics for our treatment of animals. Une approche utilitariste du thème de la souffrance des animaux qui était due au philosophe d’origine australienne Peter Singer (1946).
Pour le « biocentrisme », les théories morales doivent être étendues jusqu’au vivant non humain et non animal – les plantes, par exemple. C’est ce que tenta d’argumenter, en 1978, le philosophe américain Kenneth E. Goodpaster dans le Journal of Philosophy, avec un article intitulé « On being Morally Considerable ».
Quant à l’écocentrisme et l’écologie profonde (deep ecology), ils insistent sur les liens moraux existant entre le vivant et le non-vivant. Ainsi, à l’époque de la conférence parisienne de 1974, un autre philosophe américain, Holmes Rolston (1932) publia en 1975 dans la revue Ethics un texte intitulé « Is there an ecological ethic? ». Il s’y interrogeait sur la possibilité d’inclure dans l’éthique la faune, la flore, les paysages terrestres et marins.
L’expression deep ecology – « écologie profonde » – est, quant à elle, apparue un an avant la conférence parisienne, en 1973, dans un article en anglais de la revue Inquiry et intitulé « The shallow and the deep, long-range ecology movement. A summary ». Cette notion de deep ecology était due au philosophe norvégien Arne Naess (1912–2009). Son ouvrage de référence fut publié, d’abord en norvégien, sous le titre : Økologi, samfunn og livsstil. Utkast til en økosofi – Ecologie, communauté et style de vie. Esquisse d’une écosophie – dans la première partie des années 19703, soit à l’époque même où se tenait la conférence parisienne « Biology and the future of man ».
7 Réponses des institutions gouvernementales et universitaires
C’est dans ce contexte général fait d’interrogations éthiques pluridisciplinaires que se produisirent alors les premières réponses émanant d’institutions gouvernementales ou universitaires. Sans exhaustivité à nouveau, en 1968, une première conférence intergouvernementale portant sur l’utilisation et la conservation de la biosphère fut organisée par l’Unesco. En 1972 – nous l’avons évoqué plus haut – eut lieu à Stockholm la Conférence des Nations unies sur l’environnement humain. Par ailleurs, la « bioéthique » naissante commença à se doter d’instituts. Comme le fait remarquer Fagot-Largeault, ce fut alors « principalement en Amérique du Nord ».
Le Hastings Center fut fondé en 1969 par le philosophe Daniel Callahan (1930) et le professeur de psychiatrie Willard Gaylin. En 1971, on fonda le Joseph and Rose Kennedy Institute for the Study of Human Reproduction and Bioethics, dirigé par le médecin d’origine hollandaise André E. Hellegers (1926–1979). En 1976, ce fut la fondation, par David J. Roy, docteur en théologie, du Centre de bioéthique de l’Institut de recherches cliniques à Montréal. Comme le suggère Fagot-Largeault, par comparaison, dans les années 1970, « l’Europe occidentale suit, avec peut-être moins d’enthousiasme, ou … des ressources financières plus modestes » [1] (p. 14).
Cela étant, nous pouvons néanmoins mettre en avant en Europe, non pas des créations de centres de recherches équivalents au Kennedy Institute for the Study of Human Reproduction and Bioethics, mais la tenue de plusieurs colloques ou séminaires. Ainsi, en suivant toujours Fagot-Largeault, le colloque « Science et société » fut organisé en juin 1972 en France, à Saint-Paul-de-Vence, par la Délégation générale à la recherche scientifique et technique. En septembre 1974, « Biology and the future of man » fut donc organisé à Paris par Charles Galperin, à l’initiative du recteur de l’Académie de Paris Robert Mallet (1915–2002). Un an après, un colloque, réuni en 1975 par l’Unesco à Varna (Bulgarie), pointait toujours les carences de la réflexion morale face aux problèmes posés par le développement de la biologie moléculaire.
Comme le résume Fagot-Largeault, on y appela donc « les philosophes à engager le dialogue avec les hommes de science » pour qu’une « éthique appropriée à l’acquisition, l’usage et l’enseignement des connaissances sur le vivant » s’élabore dans une « recherche commune » [1]. Bref, à la fin des années 1970, « l’éthique est à la mode » et « on embauche des philosophes » [1] (p. 15) pour qu’une réflexion sur les fondements de l’éthique s’engage dans un cadre pluridisciplinaire.
8 La conférence parisienne de 1974
C’est dans ce contexte général de questions éthiques inédites et de premières tentatives de réponses institutionnelles que la conférence internationale « Biology and the future of man » eut donc lieu à Paris du 18 au 24 septembre 1974. Les tables rondes y furent au nombre de douze. Elles furent réparties sur quatre journées. Elles se tinrent dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne.
Il y eut 187 « participants », qui vinrent du monde entier4. Comme l’a signalé en 1974 le secrétaire général de la conférence, Charles Galperin, le choix avait été fait de privilégier les scientifiques et les médecins : « The project consisted in inviting […] some representative figures from the scientific and medical world […] ». Ainsi, « the choice of biology and medicine […] showed clearly that the context would be a priviledged domain […] ». Et comme l’écrivait Galperin, « the organizing committee appealed to all those in different regions of the world who wished and were able to join us, in view of their abilities, experiences and concern » [3], p. VIII & IX.
De fait, la liste des participants5 fut constituée à une écrasante majorité de scientifiques et de médecins6. Parmi ceux-ci, plusieurs prix Nobel :
- • André Cournand (1895–1988), médecin et physiologiste d’origine française, qui était alors professeur honoraire de médecine à l’université Columbia et qui avait reçu le prix Nobel de médecine en 1956 ;
- • Daniel Bovet (1907–1992), pharmacologiste d’origine suisse, qui était alors professeur à la faculté des sciences de l’université de Rome et qui avait reçu le prix Nobel de médecine en 1957 ;
- • François Jacob (1920–2013), biologiste français, qui était alors professeur au Collège de France, chef du département de biologie moléculaire de l’Institut Pasteur à Paris et qui avait reçu le prix Nobel de médecine en 1965 ;
- • Jacques Monod (1910–1976), biologiste français, qui était alors professeur honoraire au Collège de France, directeur de l’Institut Pasteur à Paris et qui avait également reçu le prix Nobel de médecine en 1965 ;
- • Alfred-Kastler (1902–1984), physicien, qui était alors professeur honoraire à la faculté des sciences de Paris et qui avait reçu le prix Nobel de Physique en 19667.
Notons que plusieurs participants à la conférence « Biology and the future of man » de 1974 furent ensuite membres du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé qui allait être créé en France en 1983 :
- • Jean Bernard (1907–2006), docteur en médecine, qui était, à l’époque de la conférence parisienne, professeur à l’université Paris-7 et directeur de l’Institut de recherche sur la leucémie et les maladies du sang. Présent à la Sorbonne en 1974, il fut le premier président du Comité consultatif national de bioéthique de France de 1983 à 1993 ;
- • Henri Atlan (1931), autre participant à la conférence parisienne, alors professeur de biophysique au Polymer Department du Weizmann Institute à Rehovot, fut membre du Comité consultatif national de bioéthique de France de l’époque de sa création à 2000 ;
- • Albert Jacquard (1925–2013), participant à la conférence de 1974, alors professeur à l’Institut d’anthropologie de l’université de Genève et chef du département de génétique de population de l’Institut national d’études démographiques (INED) ; il fut membre du Comité consultatif national de bioéthique de 1983 à 1988 ;
- • Yves Agid (1940), autre participant à la conférence de 1974, docteur en médecine, travaillant alors au service de neurologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, a été nommé au Comité consultatif national de bioéthique en 2009.
Parmi les 187 participants choisis délibérément au sein du monde scientifique et médical, soulignons la présence d’une dizaine de philosophes. On ne disait sans doute pas encore d’eux qu’il s’agissait d’« éthiciens ». Et peut-être n’auraient-ils d’ailleurs pas accepté cette étiquette. Mais eu égard à l’histoire européenne de ce que l’on appelle désormais la « bioéthique », la présence en 1974 de cette dizaine de philosophes à la conférence « Biology and the future of man » mérite d’être soulignée8.
Il s’agissait des philosophes français :
- • Georges Canguilhem (1904–1995) – alors professeur honoraire des universités (université Panthéon-Sorbonne, Paris-1), directeur honoraire de l’Institut d’histoire des sciences et des techniques de Paris et membre du comité organisateur de la conférence. Spécialiste d’épistémologie et d’histoire des sciences, Canguilhem avait une double formation de philosophe et de médecin9 ;
- • François Dagognet (1924), alors Professeur de philosophie à l’Université Jean-Moulin (Lyon-3). Spécialiste d’épistémologie et d’esthétique, Dagognet fut l’élève de Canguilhem. Et il avait aussi une double formation de philosophe et de médecin10 ;
- • Jean-Jacques Salomon (1929–2008), alors professeur au Conservatoire national des arts et métiers (sociopolitique de la science) et chef de la division de la politique de l’Organisation de coopération et de développement (Paris). Spécialiste de sciences et de technologie, détenteur d’un doctorat d’État en philosophie et histoire des sciences, Salomon11 fut également l’élève de Canguilhem ;
- • Charles Galperin (1929), secrétaire général de la conférence « Biology and the future of man ». Agrégé de l’Université (philosophie) en 1967, Galperin enseignait la philosophie et l’histoire des sciences à l’université Lille-3. Galperin fut de même marqué par l’enseignement de Canguilhem12.
À côté de Canguilhem et de ses proches, un autre philosophe français fut également présent :
- • Michel Philibert (1920–1991), alors professeur de philosophie à l’université des sciences sociales de Grenoble-2, et qui s’intéressait, entre autres, aux questions de gérontologie13.
Deux philosophes de la République démocratique allemande et un philosophe de la République fédérale d’Allemagne participèrent aussi à la conférence :
- • Herbert Hörz (1933), alors professeur à l’Akademie der Wissenschaften der Zentralinstitut für Philosophie de Berlin, qui s’intéressait à la philosophie de la nature, à l’histoire et à la théorie de la science14 ;
- • Rolf Löther, alors professeur à la Sektion Philosophie und Wissenschaftstheorie in der Medizin, Akademie für Arztliche Forbildung der DDR de Berlin, et dont l’intérêt pour la philosophie de la nature recoupait celui de son collègue Hörz15 ;
- • Georg Picht (1913–1982), philosophe et théologien, alors professeur à l’université de Heidelberg16.
Un philosophe sénégalais s’était de même rendu à Paris, Alassane N’Daw (1922–2013), alors professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar et directeur de son département de philosophie17. Il fut doyen de la faculté de 1976 à 1982.
En résumé, en 1974, la conférence parisienne « Biologie et devenir de l’homme » fut une rencontre internationale de scientifiques, de médecins et quasiment d’eux seuls. On ne peut donc qu’y remarquer un petit groupe de philosophes18, dont les Français présentaient, pour la plupart, la particularité de graviter ou d’avoir gravité autour de Canguilhem.
Quant aux thèmes de la conférence, ils furent en adéquation avec bon nombre des problématiques naissantes de l’« éthique environnementale » et de la « bioéthique ». Au cours des douze tables rondes de 1974, dans la commission « Interventions et équilibres », on traita des sept thèmes suivants :
- • « transplantations d’organes » ;
- • « problèmes posés par les essais thérapeutiques chez l’homme » ;
- • « fondements biologiques des comportements » ;
- • « écotoxicologie et protection de l’environnement » ;
- • « recyclage des déchets et sauvegarde des cycles biologiques » ;
- • « maintien des équilibres marins » ;
- • « intervention de la science dans l’augmentation des rendements en agriculture ».
Dans la commission « La variation et le nombre », on traita des deux thèmes suivants :
- • « variabilité génétique de l’homme : effet des comportements » ;
- • « classes d’âge, équilibre démographique, devenir social ».
Dans la commission « Qualité de la vie, dignité de la mort », on traita des trois thèmes suivants :
- • « responsabilité et décision dans l’orientation et le contrôle génétique de la procréation humaine » ;
- • « handicapés dans la société : droits des individus et devoirs de la collectivité » ;
- • « le droit à la mort peut-il être reconnu par la médecine [3], p. V-VI » ?
9 Conclusion de la conférence parisienne
C’est Canguilhem qui fit le « rapport final » de la commission « Qualité de la vie, dignité de la mort ». Ce fut aussi pour lui l’occasion de conclure sur la thématique générale de la conférence parisienne. Comme disait en 1974 Canguilhem, il existait alors des expériences qui pouvaient fournir des indications théoriques « à la rigueur applicables », mais qui comportaient aussi des « risques non mesurables ». Et c’était, poursuivait-il, le « vif sentiment de cette sorte de risques » qui rendait le biologiste hésitant entre, d’une part, « consentir à une limitation de la liberté de recherche (n’importe quoi ne peut être fait n’importe où) » et, d’autre part, « ne se soumettre à aucune sorte d’interdit en matière d’heuristique » [4] (p. 527). Aussi, selon Canguilhem, l’objet de la conférence parisienne, « Nouveaux pouvoirs de la science, nouveaux devoirs de l’homme », se transformait-il finalement en celui-ci : « Nouveaux devoirs des hommes de science quant à l’exercice de leur pouvoir ».
Canguilhem s’interrogeait dès lors : « Biologistes et médecins estiment-ils être, à leur manière, des hommes de pouvoir ? » Et « reconnaissant leurs pouvoirs, veulent-ils les exercer ? » Mais « avec quels autres pouvoirs veulent-ils coopérer ? » Le moment n’était-il donc pas venu pour les scientifiques, se demandait Canguilhem en 1974, de convenir que « le discours scientifique est insuffisant pour résoudre les problèmes dont leur science leur donne la conscience lucide, mais qui les concernent eux-mêmes, en tant qu’ils sont des hommes, comme tous les hommes, nés et encore à naître. » Des hommes qui étaient nés, ajoutait Canguilhem, « sans certificat de parfaite correction génétique, sans garantie d’intégrité fonctionnelle permanente, et déjà promis à la mort » [4] (p. 532).
Aussi, au terme de ces journées à la Sorbonne, fut-il décidé, le 24 septembre 1974, de créer un « Mouvement universel de la responsabilité scientifique » [4] (pp. 543–544). Comme le résuma Robert Mallet – qui en fut le premier Président – « la conscience d’une responsabilité individuelle et collective » allait rapprocher les différents participants à ce mouvement. Mallet précisait qu’ainsi, « on ne mettra pas en doute que la science procède d’expériences et de constats sans référence à la morale. » Mais, expliquait-il, « on étudiera ses implications, qui conditionnent inévitablement la vie spirituelle et sociale de l’homme » [4] (p. 541)19.
10 Épilogue
Dès 1974, avec le savoir scientifique, médical et éthique de son temps, la conférence parisienne fut sensible à de nombreux thèmes éthiques devenus aujourd’hui incontournables. Aussi, quarante ans après la tenue de cette conférence pionnière, des scientifiques et des philosophes ont-ils décidé de revenir, à Bruxelles, sur certains thèmes débattus à la Sorbonne en 1974. Au terme de ces quatre décennies, les « devoirs des hommes de science quant à l’exercice de leur pouvoir » demeurent-ils en effet les mêmes ? C’est une des questions que le colloque bruxellois de 2014 entend traiter de manière pluridisciplinaire sur le thème actualisé « Biologie et devenir technologique de l’homme ».
Déclaration d’intérêts
L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
1 Les deux journées du colloque international bruxellois de 2014 – Biologie et devenir technologique de l’homme – sont centrées sur la biologie et l’homme. Quarante ans plus tôt, la conférence parisienne fit aussi une place significative à la question de l’environnement. Aussi, nous rappelons l’émergence, au sein des préoccupations sociétales des années 1960 et 1970, de ces deux thèmes dès lors centraux : la biologie et le sujet humain (dont la « bioéthique ») et l’environnement (dont l’« éthique environnementale »). Afin de situer la contemporanéité et la prémonition de la conférence parisienne de 1974, nous rapportons des faits qui l’ont précédée et d’autres qui l’ont suivie de peu.
2 À propos d’interruption volontaire de grossesse et de fertilisation in vitro, notons la présence conjointe à la conférence parisienne de 1974 du médecin français Jérôme Lejeune (1926–1994) et du physiologiste britannique Robert G. Edwards (1925–2013). Lejeune était lié à la découverte, avec Marthe Gautier et Raymond Turpin (1895–1988), de l’anomalie chromosomique responsable de la trisomie 21. Il était un farouche opposant à l’avortement. Edwards (1925–2013) était un pionnier, avec l’obstétricien et gynécologue britannique Patrick Steptoe (1913–1988), de la médecine reproductive et de la fertilisation in vitro – des recherches, qui débouchèrent sur la naissance de Louise Brown le 25 juillet 1978. Edwards a obtenu le prix Nobel de médecine en 2010.
3 La datation précise de Økologi, samfunn og livsstil. Utkast til en økosofi est complexe. D’après Charles Ruelle (2008), Naess a couché les premières idées de son « écosophie » en « 1971 » dans un « polycopié » rédigé en norvégien et intitulé Om økologi og Filosofi. Naess « publiera » ensuite une « version révisée de ce polycopié en 1972 ». D’après Ruelle, « quatre nouvelles éditions suivront, puis une cinquième en 1976 sous un titre différent Økologi, samfunn og livsstil. » Il fallut ensuite attendre « 1989 » pour qu’une nouvelle édition en langue anglaise, cette fois, paraisse (voir C. Ruelle, « Introduction à l’édition française » dans Naess A., Écologie, communauté et style de vie, traduction de l’américain et introduction de Charles Ruelle, postface de Hicham-Stéphane Afeissa, [Paris], Éditions Dehors, 2013, p. 15). Pour information, La Nasjonalbiblioteket à Oslo donne, entre autres, comme référence pour l’ouvrage de Arne Naess : « Økologi, samfunn og livsstil. Utkast til en økosofi, 4. utg, Oslo, Universitetsforl., 1974 […] ».
4 Sans exhaustivité, les participants vinrent de France, Syrie, États-Unis, Israël, Italie, Algérie, Maroc, Autriche, Tunisie, Belgique, Suisse, Brésil, U.R.S.S. Chili, Kenya, Pays-Bas, Cameroun, Grande-Bretagne, Suède, Canada, République sud-africaine, République fédérale d’Allemagne, République démocratique allemande, Australie, Portugal, Liban, Japon, Sénégal, Argentine, Norvège, Finlande, Pologne, Mexique, Bulgarie.
5 Des scientifiques avaient marqué leur adhésion au projet parisien mais ne purent pas s’y rendre. Parmi eux, le « professor P. Berg » qui, comme nous l’avons évoqué, avait proposé en 1974 un moratoire sur certaines manipulations en génétique. Paul Berg allait obtenir le prix Nobel de Chimie en 1980. Autre absent : le « Doctor Gaylin », un des fondateurs en 1969 du Hastings Center que nous avons également évoqué (voir Galpérine [sic] Ch. (ed.), Proceedings of the international conference Biology and the future of man, op. cit, p. X).
6 Sans exhaustivité, il s’agissait de représentants des domaines suivants : neurologie, psychiatrie, physiologie, océanographie, génétique humaine, endocrinologie, agronomie, démographie, géographie humaine, immunologie, zoologie, biologie marine, santé et environnement, écologie humaine, médecine, ingénierie générale du génie rural des eaux et des forêts, biologie moléculaire, gérontologie, génétique de population, neurophysiologie, anthropologie tropicale, microbiologie, immunologie, etc. L’Université libre de Bruxelles commémorant par l’entremise de ce colloque les 40 ans de la conférence de 1974, signalons qu’un de ses enseignants fit partie des « participants » à la conférence Biology and the future of man : Paul Bordet (1906–1987), docteur en médecine, chirurgie et accouchements de l’Université libre de Bruxelles en 1930 et qui était alors professeur à la faculté de médecine et de pharmacie de l’Université libre de Bruxelles.
7 Alfred Kastler fut aussi président de 1979 à 1984 de la « Ligue française des droits de l’animal » (LFDA), qui fut créée en septembre 1977, et qui devint la « Fondation Droit animal, Éthique et Sciences ». Depuis 1984, cette fondation attribue le prix de biologie Alfred-Kastler, destiné à encourager la recherche et l’application de méthodes évitant l’« utilisation expérimentale traumatisante de l’animal ». En 1981, Alfred Kastler a cosigné, avec Michel Damien et Jean-Claude Nouet, un ouvrage intitulé Le grand massacre, qui portait sur l’élevage intensif.
8 Redisons sur ce point, comme l’a justifié en 1974 le secrétaire général de la conférence, que « the project consisted in inviting […] some representative figures from the scientific and medical world […] » et qu’ainsi, « the choice of biology and medicine […] showed clearly that the context would be a priviledged domain […] ». Reste qu’il serait instructif de confronter sur le thème « Biologie et devenir de l’homme » les positions défendues en la matière, à partir des années 1960–1970, par de grandes figures de la philosophie française de l’époque qui, au vu de leurs travaux, auraient pu être intéressées par la thème de la conférence parisienne de 1974 mais qui ne figurent pas sur la liste des « participants ». En effet, pour ne prendre que trois exemples de philosophes français, remarquons qu’avant et après Biology and the future of man de 1974, Gilles Deleuze (1925–1995) et Félix Guattari (1930–1992) ont publié L’Anti-Œdipe en 1972 et Mille plateaux en 1980. Outre des thématiques communes – dont les analyses par des philosophes et par des scientifiques seraient donc à comparer – on constate que Deleuze et Guattari se référaient explicitement à l’ouvrage de Jacques Monod (1910–1976) Le hasard et la nécessité. Essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne (1970), au livre de Jean Bernard (1920-2013) La logique du vivant. Une histoire de l’hérédité (1970), ainsi qu’au livre Le normal et le pathologique (1966) de Georges Canguilhem (voir les références à Monod, pages 343 et 392, dans Deleuze G. & Guattari F., Capitalisme et schizophrénie. L’Anti-Œdipe, « Critique », Paris, Éditions de Minuit, 1972 ; les références à Monod et Jacob, pages 56, 57, 70, 77, 81, 413 et les références à Canguilhem, pages 64, 298 & ssq., dans Deleuze G. & Guattari F., Capitalisme et schizophrénie. Mille plateaux, « Critique », Paris, Éditions de Minuit, 1980). Troisième exemple : trois mois après la conférence Biology and the future of man – qui se tint du 18 au 24 septembre 1974 – Michel Foucault entamait le 8 janvier 1975 ses cours au Collège de France sur la « grande famille indéfinie et confuse des “anormaux” » dont le « monstre humain » (cours du 22 janvier 1975). Notons également une référence explicite à la seconde édition de Le normal et le pathologique (1966) de Canguilhem (cours du 15 janvier 1975). Foucault disait en effet y avoir trouvé un « lot d’idées […] historiquement et méthodologiquement fécondes » sur la question de la « norme » et la « normalisation », Aussi, expliquait Foucault, « c’est cet ensemble d’idées que je voudrais essayer de mettre en œuvre historiquement, cette conception à la fois positive, technique et politique de la normalisation en l’appliquant au domaine de la sexualité » (Foucault M., Les anormaux. Cours au Collège de France, 1974–1975, édition établie par François Ewald et Alessandro Fontana, par Valerio Marchetti et Antonella Salomoni, « Hautes Études », Gallimard Le Seuil, 1999, p. 45–46, 51, 307).
9 De Georges Canguilhem, voir, entre autres : Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique, Clermont-Ferrand, Imprimerie « La Montagne », 1943, réédition (augmentée) : Le normal et le pathologique, « Galien », Paris, PUF, 1966 ; La Connaissance de la vie, Paris, Hachette, 1952 ; Études d’histoire et de philosophie des sciences concernant les vivants et la vie, J. Vrin, Paris, 1968.
10 De François Dagognet, voir, entre autres : La Raison et les Remèdes, « Galien », Paris, PUF, 1964 ; Le catalogue de la vie. Étude méthodologique sur la taxinomie, « Galien », Paris, PUF, 1970 ; Le Vivant, Paris, Bordas, 1988 ; Georges Canguilhem, philosophie de la vie, Les Empêcheurs de penser en rond, Le Plessis-Robinson, 1997.
11 De Jean-Jacques Salomon, voir, entre autres : Science et politique, Paris, Le Seuil, 1970 ; Prométhée empêtré. La résistance au changement technique, « Futuribles », Pergamon Press, Paris, Oxford, New York, 1982 ; Les scientifiques. Entre savoir et pouvoir, Paris, Albin Michel, 2006.
12 De Charles Galperin, voir, entre autres : Proceedings of the international conference Biology and the future of man at the Sorbonne, Paris, New York, Londres […], Ediscience, McGraw Hill, 1976 ; « Génétique et microbiologie, les problèmes de la lysogénie (1925–1950) », dans Jean-Louis Fischer et William H. Schneider (dir.), Histoire de la génétique. Pratiques, techniques et théories, Paris, ARPEM 1990 ; (ed. avec Scott F. Gilbert & Brigitte Hoppe), Fundamental changes in cellular biology in the 20th century. Biology of development, chemistry and physics in the life sciences. Proceedings of the XXth International congress of history of science, Liège, 20–26 July 1997, Turnhout, Brepols, 1999.
13 De Michel Philibert, voir : Les échelles d’âge dans la philosophie, la science et la société. De leur renversement et des conditions de leur redressement, Paris, Le Seuil, 1968. Henri Péquignot (1914–2003), alors professeur de clinique médicale à la faculté de médecine Cochin-Port-Royal de l’université René-Descartes et médecin à l’hôpital Cochin à Paris, fit également partie des « participants » à la conférence, ainsi que de son comité d’organisation. Canguilhem a préfacé en 1981 le livre de Péquignot Vieillir et être vieux (J. Vrin, Paris, 1981).
14 De Herbert Hörz, voir, entre autres : Philosophie und Naturwissenschaft. Neue Aspekte im Verhälnis von Naturwissenschaft und marxistisch-leninistischer Philosophie, erläutert am Raum-Zeit-Problem, Berlin, Dietz, 1968 ; (Herausgegeben von Herbert Hörz, Rolf Löther und Siegfried Wollgast), Naturphilosophie, von der Spekulation zur Wissenschaft, Berlin, Akademie-Verlag, 1969 ; Marxistische Philosophie und Naturwissenschaften, Berlin, Akademie-Verlag, 1976.
15 De Rolf Löther, voir, entre autres : (Herausgegeben von Hermann Ley und Rolf Löther), Mikrokosmos, Makrokosmos. Philosophisch-theoretische Probleme der Naturwissenschaft, Technik und Medizin, Berlin, Akademie Verlag, 1966 ; (Herausgegeben von Herbert Hörz, Rolf Löther und Siegfried Wollgast), Naturphilosophie, von der Spekulation zur Wissenschaft, Berlin, Akademie-Verlag, 1969 ; Mit der Natur in die Zukunft. Die natürlichen Bedingungen des gesellschaftlichen Lebens, « Philosophische Positionen », Berlin, Dietz, 1985.
16 De Georg Picht, voir, entre autres : Wahrheit, Vernunft, Verantwortung. Philosophische Studien, Stuttgart, E. Klett, [1969] ; Hier und jetzt. Philosophieren nach Auschwitz und Hiroshima, Stuttgart, Klett-Cotta, 1980 ; Der Begriff der Natur und seine Geschichte, Stuttgart, Klett-Cotta, 1989.
17 De Allasane N’Daw, voir, entre autres : La pensée africaine. Recherches sur les fondements de la pensée négro-africaine, Dakar, Nouvelles éditions africaines, 1983. Autre représentant des sciences humaines sur le continent africain et « participant » à la conférence de 1974 : Abdelwahab Bouhdiba (1932), alors Maître de conférence de sociologie à la Faculté des lettres de Tunis et qui avait suivi en France, à la Sorbonne, des études philosophiques et littéraires qui avaient débouché en 1959 sur l’Agrégation de philosophie et en 1972 sur un Doctorat d’Etat avec une thèse principale sur « La sexualité en islam ».
18 Signalons également la présence de représentants français des sciences humaines à la conférence de 1974 – certains étaient parfois dotés d’une formation philosophique : entre autres, les historiens Philippe Ariès (1914–1984), François Furet (1927–1997) ; les sociologues Anne-Marie Guillemard et Alain Girard (1914–1996). Le sociologue et philosophe Raymond Aron (1905–1983), qui était alors Professeur de sociologie au Collège de France, fit partie du Comité organisateur de la conférence parisienne de 1974 avec, entre autres, Jean Bernard, François Jacob, Jacques Monod, Georges Canguilhem, etc.
19 À propos du Mouvement universel de la responsabilité scientifique, rappelons que cinq ans après le colloque parisien qui vit donc naître ce mouvement, le philosophe allemand Hans Jonas (1903–1993) publiait en 1979 Le principe responsabilité. Une éthique pour une civilisation technologique.