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Comptes Rendus

Biologie et devenir technologique de l’homme / Biology and the technological future of man
La naissance de la conférence internationale « Biologie et devenir de l’homme », Paris, 18–24 septembre 1974
Comptes Rendus. Biologies, Volume 338 (2015) no. 8-9, pp. 523-526.

Résumés

En 1974 était organisé à Paris un colloque intitulé « Biologie et devenir de l’homme ». Il avait pour thème central l’analyse des « nouveaux pouvoirs de la science et des nouveaux devoirs de l’homme » dans le domaine des procréations médicalement assistées, de l’agriculture, de la démographie ou des questions environnementales. Ce petit texte introductif commence par décrire les circonstances qui ont mené à l’organisation de ce colloque prestigieux. Ensuite, pour ne pas en rester au cadre muet de la présentation des différents thèmes, il s’attardera sur le rapport du Dr Robert Edwards concernant les procréations médicalement assistées, réveillera le souvenir du duel entre Jacques Monod et Jérôme Lejeune sur l’avortement, laissera la place aux médecins avec Jean Bernard et Alexandre Minkowski au sujet du droit à la mort et, enfin, rappellera la conclusion de la conférence avec Georges Canguilhem.

In 1974, a symposium was organized in Paris entitled “Biology and the future of man”. It was focused on the analysis of “new powers of science and new duties of man” in the field of medically assisted procreation, agriculture, demography, and environmental issues. This small introductory text begins by describing the circumstances that led to the organization of this prestigious conference. Then, in order to go further than the silent framework of the presentation of the themes, we will focus on the report of Dr. Robert Edwards on medically assisted procreation, we will recall the duel between Jacques Monod and Jérôme Lejeune on abortion, then we will give center stage to physicians like Jean Bernard and Alexandre Minkowski about the right to die, and finally we will remind the conclusion brought to the conference by Georges Canguilhem.

Métadonnées
Publié le :
DOI : 10.1016/j.crvi.2015.06.007
Mot clés : Nouveaux pouvoirs des sciences biologiques et médicales, Problèmes moraux et juridiques, 1974–2014
Keywords: New powers of biological and medical sciences, Moral and legal issues, 1974–2014
Charles Galperin 1

1 IHPST (Paris), 33, rue Croulebarbe, 75013 Paris, France
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Version originale du texte intégral

Lorsque scientifiques et médecins se réunirent en octobre 1974 dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne pour réfléchir ensemble sur les nouveaux horizons que l’on pouvait apercevoir dans les sciences biologiques, les nouvelles connaissances et pratiques médicales au début des années 1970, ils ne furent pas les seuls à s’interroger et même à agir.

Ainsi les aperçus et les recommandations de la conférence d’Asilomar, réunie par Paul Berg au sujet des ADN recombinants, en sont un exemple. La conférence répondait à des inquiétudes et aux recommandations d’une commission de l’Académie des sciences des États-Unis d’Amérique qui demandaient en 1974 une pause dans certaines recherches [1].

Asilomar avait donc deux objectifs : marquer fortement les promesses du futur tout en réfléchissant sur les conditions qui devaient permettre au moratoire de prendre fin. Comment le travail scientifique pouvait s’exercer avec le minimum de risques dans les laboratoires et, plus généralement, pour les vivants partageant notre écosystème ?

Cependant, malgré son retentissement, la conférence d’Asilomar qui réunissait autour de Paul Berg, David Baltimore, Sydney Brenner, Richard Roblin et Maxime Singer, parmi d’autres collègues, n’était pas la première en date à se préoccuper de la nouvelle situation.

Les nouveaux horizons qui apparaissaient avaient retenu l’attention de Conrad Waddington qui avait réuni un colloque en 1969, publié en 1972 sous le beau titre Biology and the History of the Future.

Waddington avait invité en 1969, au Mexique, au nom de l’Union internationale des sciences biologiques, quelques participants, entre les deux mondes disait-il, celui de l’industrialisation… et l’autre. J’ai relevé parmi eux Margaret Mead, anthropologue, et John Cage, musicien.

« J’ai organisé ce meeting, écrivait Waddington, au nom de la biologie, la “Cendrillon” des sciences de la nature, qui doit maintenant prendre la suite de sa sœur aînée la physique, en offrant le cadre philosophique où l’homme présente le tableau de sa propre nature et ce qui, dans le monde extérieur, importe le plus pour étendre ses possibilités… et ce, en relation avec les problèmes posés. » [2]. Parmi ces problèmes, Waddington évoque les questions de bio-engineering. C’est dans ce contexte que quelques amis se réunirent assez régulièrement dans le cadre de la chaire de physique théorique, celle d’André Lichnerowicz au Collège de France, pour tenter librement de dessiner un tableau de l’état des sciences en 1970.

J’ai eu l’honneur et le bonheur d’y participer, en toute innocence, à peine élu à l’université de Lille pour y enseigner l’histoire et la philosophie des sciences. Autour d’André Lichnerowicz, j’y rencontrais Jacques Monod, Georges Canguilhem, Marcel-Paul Schutzenberger, Henri Péquignot…

Je voudrais rendre ici hommage à un ami très cher, qui ne connaissait rien aux sciences, mais qui leur accordait un immense prestige et une importance décisive dans l’histoire du monde dans lequel nous vivons. Robert Mallet, romancier et poète, professeur de littérature, fondateur de l’université de Madagascar, organisateur de la vie étudiante et recteur de l’université d’Amiens, fut nommé recteur-chancelier de l’université de Paris et, par suite des événements politiques du moment, chargé par le Président de la République, Georges Pompidou, de diviser l’université de Paris en treize universités.

Fils de notaire, il se mit au travail et commença l’inventaire. Il m’appela un jour de 1972 pour me dire qu’il lui restait une somme d’argent non négligeable et qu’il n’était pas sage de la partager en treize. Les nouvelles connaissances dans les sciences biomédicales, les questions déjà « écologiques » l’avaient tant frappé qu’il me proposa cette somme, reliquat de l’université, pour organiser à Paris une conférence mondiale chargée de réfléchir à ce futur qui agitait à juste titre les esprits. J’allai trouver mon maître en philosophie, Georges Canguilhem, que j’ai dû intriguer, amusé qu’il était par les remous de 1968, et qui voyait bien que je n’avais d’autre prétention que de lui donner carte blanche de la part du recteur. Une seconde visite fut pour Jacques Monod, directeur de l’Institut Pasteur, qui fut assez vite séduit à la pensée de présenter la biologie moléculaire, la génétique et ses promesses à la vieille Sorbonne. Je profitai d’un voyage familial aux États-Unis pour inviter d’éminents collègues américains ; nombreux furent les amis de Jacques Monod.

Dans le comité d’organisation, je vis Raymond Aron, Jean Bernard, Georges Canguilhem, François Jacob, Maurice-Marie Janot, Jacques Monod, Henri Péquignot.

Il y eut plus d’un an de préparation. Trois thèmes avec des titres généraux furent retenus, comprenant un rapport introductif et une table ronde :

  • • thème 1 : intervention et équilibres :
    • ∘ les transplantations d’organes,
    • ∘ les problèmes posés par les essais thérapeutiques chez l’homme,
    • ∘ les fondements biologiques des comportements,
    • ∘ écotoxicologie et protection de l’environnement,
    • ∘ recyclage des déchets et sauvegarde des cycles biologiques,
    • ∘ le maintien des équilibres marins,
    • ∘ l’intervention de la science dans l’augmentation des rendements en agriculture ;
  • • thème 2 : la variation et le nombre :
    • ∘ la variabilité génétique de l’homme, effet des comportements,
    • ∘ les classes d’âge, équilibre démographique, devenir social ;
  • • thème 3 : qualité de la vie dignité de la mort :
    • ∘ responsabilité et décision dans l’orientation et le contrôle génétique de la procréation humaine,
    • ∘ les handicapés dans la société : droits des individus et devoirs de la collectivité,
    • ∘ le droit à la mort peut-il être reconnu par la médecine ?

Comme on peut le remarquer, le nombre des tables rondes qui se placent sous les différents thèmes est inégal. Le premier thème a vu les sujets, pour ainsi dire, s’élargir aux niveaux économiques et surtout écologiques de la planète. Comme le soulignait G. Canguilhem, la température des discussions s’est élevée en allant vers le troisième thème lorsqu’on eut touché à la première question sur le contrôle de la procréation et à la dernière sur le droit à la mort.

Pour ne pas en rester au cadre muet de la présentation d’un tableau, je vais donc suivre la courbe ascendante de la température, m’arrêter sur le rapport du Dr Robert Edwards, réveiller le souvenir du duel entre Jacques Monod et Jérôme Lejeune, laisser la place aux médecins, avec Jean Bernard et Alexandre Minkowski, et enfin rappeler la conclusion de la conférence avec Georges Canguilhem [3].

Le rapport de Robert Edwards, qui est une excellente « revue », s’attache aux discussions en cours, aux nouveaux progrès, c’est-à-dire à la fertilisation des ovocytes humains in vitro et leur réimplantation comme embryons adhérents dans l’utérus de la mère.

En 1971, en tant que scientifique engagé à poursuivre la recherche en science et dans ses applications cliniques, il devait souligner ce que nous savions, tant pour la culture que pour la croissance des embryons chez l’animal et chez l’homme. Ces connaissances, ainsi que les possibilités ouvertes à la médecine de la reproduction, devaient être suivies par des considérations sociales, morales et légales. Nous dirons juste quelques mots sur le contrôle de la pré-implantation chez les mammifères autres que l’homme. Dans son rappel historique, Edwards cita le premier transfert effectué chez les lapins en 1890 (Heape, en 1890). La recherche sur le développement précoce chez les mammifères était réduite à peu d’ovocytes. Elle devint plus efficace avec la connaissance du rôle des gonadotrophines dans l’ovulation (Fowler et Edwards, 1957–1972). Les études sur la pré-implantation et le développement furent facilitées par la réussite de la fertilisation in vitro couramment obtenue dans les années 1970, suivie par un transfert chez la souris avec une réussite proche de ce qui se produit dans la nature.

L’exposé était suivi par une description précise des méthodes de culture et de réimplantation de jeunes embryons chez la mère. En 1973–1974, on approchait du but. « Avec le contrôle de l’ovulation et de la fertilisation, l’adhésion des embryons humains est maintenant disponible, écrivait le Dr Edwards, plusieurs groupes de physiologistes et de médecins y travaillent. » La période aux alentours de 1974 n’était pas facile pour les recherches d’Edwards et du Dr Steptoe, les controverses vives, les condamnations abruptes. En France, on était proche de la discussion de la loi Veil sur l’avortement. Un duel froidement courtois entre Jacques Monod et Jérôme Lejeune en laisse le témoignage. François Jacob, qui avait suscité l’invitation de Robert Edwards, s’attendait à ces remous. Pour conclure, saluons la naissance de Louise Brown, fruit de ces recherches, en 1978. En recevant Robert Edwards, les membres du prix Albert-Lasker, décerné en 2001, reconnaissaient qu’à chaque pas de sa recherche il se heurtait à des entraves. En 2010, le prix Nobel couronnait enfin ses travaux.

Sous le titre problématique « Le droit à la mort peut-il être retenu par la médecine ? », la discussion prit un tour où l’inquiétude était manifeste. Nous ferons appel ici à des médecins et à leur expérience, sans oublier que le philosophe Georges Canguilhem était aussi médecin. Le premier que nous souhaitions interroger fut Jean Bernard.

« Je ne citerai qu’un seul exemple, qui tient à ma spécialité. Je pense à une très grave leucémie à promyélocytes et qui, jusqu’à il y a sept ans, était mortelle en vingt-neuf jours. Actuellement, elle guérit en un certain nombre de cas, la vie peut souvent être prolongée de plusieurs années.

Vous imaginez comment ont pu se faire, comment se font, comment se feront les échanges entre le médecin et ses malades au fur et à mesure que venaient ou viendront des changements thérapeutiques qui étaient tels que, quand nous commencions le traitement, nous ne savions pas du tout à quoi nous allions arriver. »

Le critère de la famille paraissait incertain ; quant au critère légal, il pouvait soulever un jugement acerbe. « Voit-on une loi disant dans quel cas vous laissez mourir, dans tel autre vous ne laisserez pas mourir. De même qu’il y a des lois, d’ailleurs contestées, fixant la liste des maladies de longue durée… si bien que, finalement, et en l’état actuel, la seule personne qui puisse prendre la décision, c’est le médecin. Naturellement, ironisait Jean Bernard, on peut beaucoup le regretter, on peut très bien concevoir d’autres systèmes… et d’évoquer une société où l’on tirerait des ordinateurs des décisions que l’on communiquerait aux malades, décisions que l’on exécuterait… ».

Nous avons également retenu le témoignage d’un pédiatre, Alexandre Minkowski.

« Je voulais vous dire, pour avoir vécu ce qui se passait dans un service de soins intensifs de nouveau-nés, avec des enfants qui, selon les cas, vont mourir, vont guérir complètement sans séquelles cérébrales ou mentales, ou malheureusement, pour un grand nombre, resteront handicapés. Je voudrais vous dire que cela fait intervenir une nouvelle dimension.

Si l’on arrive à une situation de ce genre, dans le dernier cas, la responsabilité morale se trouve modifiée. C’est parfaitement discutable et il faut le laisser à la conscience de chacun.

Dans ces problèmes du respect de la vie et de la mort, certains font passer le respect de la personne avant le respect de la vie elle-même. J’en suis ; mais je ne suis pas sûr d’avoir raison. »

1 Conclusion de la conférence. Le rapport de Georges Canguilhem

Dès le premier jour de ces entretiens, la première question abordée lors de la table ronde sur « la transplantation d’organes » était celle de la mort cérébrale. Est-ce trop dire, écrivait G. Canguilhem, que de relever comment tous ces échanges de vues convergeaient vers ce qui a été l’objet des travaux de la troisième commission : « Qualité de la vie, dignité de la mort ».

Les organisateurs de la conférence avaient, dès le début, le souci de rechercher ce qui paraît maintenant avoir été obtenu, un ordre – sinon une somme – des questions sur la vie qui fut, à sa façon, aussi cohérent dans sa diversité que l’est la vie elle-même, au prix et au moyen de la mort.

Rappelons seulement quelques points essentiels de cette conclusion, fermes mais aussi marqués par de nettes nuances.

« On n’a peut-être pas assez fait remarquer que les techniques sont autant de l’ordre du savoir-faire que du savoir. La relation inévitable entre technique et éthique, entre moyen et fin, s’est imposée à l’attention dans la session sur l’orientation et le contrôle génétique de la procréation humaine.

La génétique a été présente ici pour “l’ancrage” des questions.

On a montré, pour la première fois, soulignait Canguilhem, comment la génétique a permis de séparer les deux concepts de procréation et de reproduction et de fonder l’individuation, la singularité du vivant humain sur l’unicité de la combinaison de ses composants héréditaires. Si le philosophe voyait que la génétique pouvait fonder une casuistique à l’intention d’une déontologie médicale, elle n’était pas en mesure de lui imposer une technique systématique d’assurance contre tous les risques liés au fait de naître. »

D’où ses derniers mots :

« Le moment n’est-il pas venu, pour les scientifiques, où le discours scientifique est insuffisant pour résoudre les problèmes dont leur science leur donne la conscience lucide, mais qui les concernent eux-mêmes en tant qu’ils sont des hommes, comme tous les hommes nés et encore à naître, nés sans certificat de parfaite correction génétique, sans garantie d’intégrité fonctionnelle permanente et déjà promis à la mort. »

Sur ces mots d’un philosophe et d’un moraliste s’achevait cette grande conférence internationale, dont l’étendue et la pluralité des questions qui y étaient discutées pour la première fois est à remarquer, à charge pour nous d’en vérifier les interrogations et les leçons à quarante ans de distance.

Déclaration d’intérêts

L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.


Bibliographie

[1] P. Berg; D. Baltimore; S. Brenner; R.O. Roblin; M.F. Singer Summary statement of the Asilomar conference on recombinant DNA molecules, Proc. Natl. Acad. Sci. USA, Volume 72 (1975) no. 6, pp. 1981-1984

[2] Biology and the history of the future (C.H. Waddington, ed.), Edinburgh University Press, Edinburgh, 1972

[3] Biologie et devenir de l’homme/Biology and the future of man (Proceedings of the international conference, Universités de Paris, 1974) (C. Galperin, ed.), Ediscience, Mc Graw Hill, 1976


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