1 Introduction
La fréquence des principales affections cardiovasculaires, l’insuffisance coronarienne, l’hypertension artérielle et l’insuffisance cardiaque croissent avec l’âge. L’âge facilite en effet l’émergence de la composante génétique d’affections multigéniques à pénétrance faible, mais l’âge prolonge aussi le contact avec des facteurs de risque comme le tabac, la surnutrition, l’hyperglycémie et les hyperlipidémies. L’âge enfin est associé à un ralentissement de l’activité physique, qui est un facteur de risque indépendant bien identifié 〚1〛.
Rares sont les études, comme celle du groupe de Baltimore 〚2〛, faites chez des sujets âgés à coronarographie et à pression artérielle normales ; elles seules permettent de connaître la norme, elles seules permettent d’écrire le chapitre « physiologie cardiaque du sujet âgé ». Il y a maintenant un grand nombre d’arguments cliniques et expérimentaux qui permettent d’affirmer qu’avec l’âge et en dehors de toute affection, le débit cardiaque reste normal à l’effort et au repos, bien que le myocarde soit profondément modifié sur un plan fonctionnel et structural. Le vieillissement cardiaque reflète à la fois le processus général du vieillissement, le vieillissement endocrinien et le vieillissement du système artériel.
L’un des acquis récents les plus intéressants de la biologie contemporaine réside dans la constatation du fait que le nombre de gènes dont l’expression est modifiée par l’âge, tout au moins dans le muscle d’origine squelettique, est extrêmement limité (moins de 2% 〚3〛), ce qui rend donc ce dernier potentiellement accessible à la thérapie. Un bon nombre, pas tous, des changements observés dans la structure du myocarde et de son réseau coronaire est comparable à ceux obtenus dans les surcharges de pression et sont, comme ceux-ci, compensés pendant longtemps, à la fois au niveau myocardique et au niveau périphérique. Ces changements phénotypiques ont la particularité d’être localisés dans le ventricule gauche, ils sont secondaires à l’augmentation de l’impédance aortique caractéristique, laquelle est la vraie post-charge du ventricule gauche. L’âge modifie en effet très spécifiquement les gros vaisseaux, l’aorte mais aussi les vaisseaux coronaires. De ce fait, la réserve coronaire est réduite et le cœur sénescent est plus sensible à l’ischémie que le cœur du sujet plus jeune.
La biologie moléculaire du myocarde humain normal repose essentiellement sur des données fournies par des prélèvements effectués sur des donneurs mal calibrés ; ces donneurs étant, par définition, des sujets jeunes, il n’y a pas, pour cette raison, de données disponibles sur le myocarde humain âgé. C’est la raison pour laquelle on a fait fréquemment état ici des données expérimentales, sans lesquelles ce qui a été observé chez l’homme est difficile à interpréter. La très grande majorité des données expérimentales proviennent du rat de 24 mois, Fischer 〚4〛 ou Wistar 〚5〛. Les études sur la souris sont plus rares, celles sur de plus grosses espèces sont exceptionnelles du fait de leur coût élevé.
2 Données structurales
2.1 Cœur
Le poids du cœur humain augmente d’environ 1 à 1,5 g par an entre 30 et 90 ans, il diminue légèrement après 90 ans. L’augmentation est parallèle au poids du corps et le rapport poids du cœur/poids du corps ne s’élève que discrètement pendant cette période. Des études échocardiographiques montrent que, si la paroi postérieure s’épaissit avec l’âge, ceci reste toujours dans les limites de la normale et disparaît lorsque les résultats sont indexés par rapport à la surface corporelle. Avec l’âge, le nombre de myocytes diminue ; il diminue plus vite chez l’homme que chez la femme 〚6〛. Chez l’homme, il a été impossible de mettre en évidence une augmentation du pourcentage des cellules apoptotiques avec l’âge, le pourcentage de cellules myocardiques TUNEL positives restant autour de 0 à 0,04%, quel que soit l’âge 〚7〛.
Les données sont comparables chez l’animal, mais il existe, chez le rat, d’importantes différences d’une lignée à l’autre 〚4, 5〛. Par contre, chez le rat Fischer, la mort cellulaire associe apoptose et mort accidentelle, avec une nette prédominance pour l’ischémie et la mort cellulaire non apoptotique 〚4〛.
Une analyse plus détaillée des données structurales a été faite sur les modèles expérimentaux. La perte de myocytes s’accompagne d’une hypertrophie des myocytes restants, et cette hypertrophie compense à la fois la perte cellulaire, au milligramme prêt, et la surcharge mécanique secondaire due à l’augmentation de l’impédance caractéristique de l’aorte ; de fait, elle prédomine donc à gauche. Le volume moyen des cardiocytes passe ainsi de 15 à 30×10–3 mm3 dans le ventricule gauche 〚4〛.
Cette perte cellulaire s’accompagne de fibrose, laquelle a été observée chez l’animal et chez l’homme. La fibrose, tout au moins chez le rat, est en partie réparatrice, mais en partie seulement, car elle s’accompagne d’une diminution de l’activité des collagénases (métalloprotéinases), qui semble être liée au processus de vieillissement lui-même 〚8〛. De plus, l’augmentation de la concentration en collagène va de pair, paradoxalement, avec une réduction de la concentration des ARN messagers correspondants, indiquant la complexité de la régulation, qui n’est sûrement pas transcriptionnelle 〚9〛. Cette fibrose est le principal déterminant des anomalies du remplissage ventriculaire et des arythmies.
2.2 Vaisseaux
Chez l’homme, au cours du vieillissement, l’aspect morphologique des artères, surtout élastiques, change : (i) le diamètre (de 6,9 cm entre 19 et 44 ans à 8,5 cm après 65 ans pour la crosse aortique) et la longueur (les artères deviennent tortueuses) augmentent ; (ii) l’intima (de 200 à 680 μm) et la media des parois s’épaississent ; (iii) les artères deviennent plus rigides et leur contenu en élastine diminue (alors que dans l’hypertension les changements de compliance artérielle sont dus à une augmentation du collagène) 〚10〛. En revanche, les résistances périphériques et la pression artérielle ne sont pas modifiées par l’âge (la pression artérielle systolique dans l’étude Baltimore est en moyenne de 115 mm Hg à 30 ans et de 130 mm Hg à 75 ans). L’hypertension systolique et diastolique reste une maladie et doit être traitée comme telle chez les sujets âgés ; ce n’est pas une des propriétés de l’âge. L’hypertension systolique pure s’observe chez 10% des sujets âgés, et s’accompagne d’une hypertrophie ventriculaire gauche 〚11〛, mais, par définition, ce type de sujets a été exclu de l’étude de Baltimore.
3 Physiologie vasculaire
L’impédance caractéristique de l’aorte passe de 50 dyn s cm5 à 30 ans à 90 dyn s cm5 à 70 ans. Cette élévation est due à la combinaison de plusieurs facteurs. L’impédance est aux pressions et débits pulsatiles ce que la résistance est à un écoulement continu ; c’est, en fait, la véritable charge du ventricule gauche. Elle exprime la relation entre pression et débit pulsatiles enregistrés en un même point d’un vaisseau et dépend, bien entendu, des résistances périphériques (l’impédance augmente dans l’hypertension), mais également de l’inertance, de la compliance du vaisseau et des différentes ondes pulsatiles « en retour » 〚2, 10〛. Ce sont ces deux derniers paramètres qui sont modifiés avec l’âge.
L’augmentation de l’impédance aortique crée une surcharge ventriculaire gauche qui n’est pas due à un changement des résistances périphériques, mais aux augmentations du diamètre et de la rigidité artérielle et les modifications des ondes en retour. Le cœur gauche, ou pour être plus précis les myocytes du ventricule gauche, sont hypertrophié et plusieurs données expérimentales montre l’existence d’une surcharge mécanique asymétrique 〚12〛. Les mêmes altérations se retrouvent au niveau des coronaires. Elles rendent compte à la fois de la diminution de la réserve coronaire et de l’augmentation de la sensibilité du myocarde à l’ischémie qui sont tous deux des constantes du cœur sénescent aussi bien chez l’homme que chez l’animal.
La compliance artérielle centrale peut être déterminée de façon non invasive par imagerie ultrasonore et tonométrie 〚13〛 (Tableau 1). La compliance artérielle est significativement de 30% plus faible chez les sujets âgés d’une soixantaine d’années physiquement entraînés que chez les sujets sédentaires. Par ailleurs, la marche sur tapis roulant 40 min par jour, cinq jours sur sept pendant 13 semaines augmente de 25% la compliance artérielle de sujets d’âge moyen, qui rejoint alors le niveau de celle des sujets jeunes. L’exercice régulier atténue les méfaits de l’âge sur la compliance artérielle centrale.
Compliance artérielle carotidienne moyenne (en 〚mm2/mm Hg〛 × 10–2) au cours de la sénescence. Effets de l’exercice physique (recalculé d’après 〚13〛).
Classe d’âge | 18–37 ans | 38–57 ans | 58–77 ans |
Sédentaires | |||
N | 15 | 26 | 13 |
Compliance | 2,05 ± 0,6 | 1,20 ± 0,2* | 1,10 ± 0,3* |
Sédentaires entraînés pendant 13 semaines | |||
N | 20 | ||
Compliance | 1,50 ± 0,2* | ||
Actifs épisodiquement | |||
N | 12 | 16 | 17 |
Compliance | 1,80 ± 0,2 | 1,35 ± 1,35* | 1,20 ± 0,3* |
Très entraînés (de façon régulière) | |||
N | 19 | 18 | 15 |
Compliance | 2,12 ± 0,15 | 1,50 ± 0,15*§ | 1,51 ± 0,13*§# |
Avec le temps les propriétés du collagène et de l’élastine sont modifiées par glycation par le glucose circulant qui réagit chimiquement avec les –NH2 terminaux des protéines, ce qui rend les fibres du collagène moins facilement dégradable. Chez le rat, le produit de la réaction, les advanced glycation end-products, ou AGE, joue un rôle important dans le déterminisme des modifications de la compliance artérielle liées à l’âge, lesquelles sont très significativement améliorées par un traitement au long court par l’aminoguanidine 〚14〛.
L’âge modifie à la fois la production par l’endothelium de substance vasoactives comme les prostacyclines, l’angio II et l’endothéline, et la réactivité vasculaire. La capacité des vaisseaux à produire du NO en réponse à divers stimuli et de réagir au NO est réduite. Les récepteurs beta2-adrénergiques sont moins abondants, la densité des récepteurs à l’angiotensine II est augmentée en réponse à une baisse de l’activité du système rénine–angiotensine, SRA, circulant ; par compensation, l’activité des SRA tissulaires est augmentée 〚15, 16〛.
4 Fonction cardiaque au repos
4.1 Débit cardiaque
Les résultats concernant les variations du débit cardiaque, indexé ou non, avec l’âge sont maintenant clairs. L’étude de Baltimore 〚2〛 a montré que l’index cardiaque au repos ne diminue pas avec l’âge (il est de 3,8 L min–1 m–2 à 20 ans et de 3,6 L min–1 m–2 à 85 ans). Les composantes du débit, à savoir fréquence et volume éjecté sont peu modifiés ; il y a seulement une discrète bradycardie et une modeste augmentation du volume éjecté. La fraction d’éjection, tout comme la fraction de raccourcissement et la vitesse de raccourcissement circonférentiel en échocardiographie sont également normaux ou subnormaux. In vivo, si les performances du cœur de rat âgé sont normales, les performances de ces mêmes cœurs isolés ou celles du muscle papillaire sont, en revanche, fortement modifiées, ce qui témoigne d’une adaptation deux niveaux 〚1〛.
Sur un plan physiologique, le ventricule gauche est un ventricule surchargé mécaniquement (Tableau 2) 〚17〛. Les données expérimentales chez le rat ont montré qu’il se contracte et se relaxe moins vite, et surtout que le cycle contractile est plus économique au sens thermodynamique du terme, puisque la courbure de la relations de Hill est moins prononcée 〚5〛.
Énergétique myocardique durant la sénescence chez le rat (d’après 〚5〛).
Paramètre mesuré | Rat jeune | Rat âgé |
Contraction isométrique et relaxation | ||
Vitesse de raccourcissement maximale | 2,38 ± 0,06 | 1,99 ± 0,08 ** |
Vc max, Lmax (s–1) | ||
Vitesse de raccourcissement maximale à charge nulle | 3,20 ± 0,06 | 2,81 ± 0,10* |
Vmax, Lmax (s–1) | ||
Vitesse maximale d’allongement | 3,25 ± 0,1 | 2,75 ± 0,09** |
Vr max, Lmax (s–1) | ||
Force active par unité de surface (mN mm–2) | 55 ± 2 | 45 ± 2* |
Énergétique | ||
Emax (mN Lmax s–1 mm2) | 30 ± 1 | 20 ± 1** |
Courbe G de l’hyperbole de Hill | 1,6 ± 0,07 | 1,93 ± 0,13* |
Biologiquement parlant, le cœur, le cœur gauche, présente tous les signes d’une surcharge de pression au niveau cellulaire. Le cycle contractile est ralenti à tous les niveaux : durée du potentiel d’action et de l’intervalle QT sont prolongés, ainsi que la durée de la transition calcium et la durée de la contraction 〚2〛. Ce ralentissement est un processus adaptatif bien connu qui se retrouve dans toutes les surcharges mécaniques, chez l’homme et dans toutes les espèces animales et permet au muscle soumis à de nouvelles conditions de travail de maintenir une tension active normale aux dépens de la vitesse à laquelle cette tension se développe. Chez l’homme, ce changement est dû à un ralentissement de l’échangeur Na+/Ca2+, principal responsable de l’extrusion normale du Ca2+ hors de la cellule et à une réduction de la capacité du réticulum sarcoplasmique à repomper le calcium. Le ralentissement de la phase active de la relaxation trouve ici une explication, puisque les deux composantes biologiques de la relaxation sont altérées (cf. revue in 〚18〛). Les anomalies de la phase active de la relaxation sont corrigées chez le rat sénescent par le transfert du gène codant pour l’ATPase du réticulum sarcoplasmique 〚19〛.
4.2 Fonction diastolique
La durée de la phase isovolumique de la relaxation est augmentée ; ceci est en partie dû à une prolongation de l’activation des myofilaments par le calcium. Mais le paramètre le plus caractéristique du cœur sénescent est la diminution, de près de 50%, du rapport entre les vitesses des remplissages passifs et actifs de la cavité (ondes E et A en écho Doppler) : le remplissage précoce, passif, du ventricule gauche est réduit, ce qui reflète à la fois les anomalies de la relaxation active et la présence de fibrose ; néanmoins, le volume télédiastolique reste normal, car le remplissage ventriculaire est maintenu normal, grâce à une augmentation de la contribution des oreillettes. La fonction diastolique globale reste donc normale au repos, mais le cœur âgé se remplit plus du fait de la contraction auriculaire que de par ses propriétés passives d’élasticité, contrairement à ce qui se passe chez le sujet jeune, ce qui facilite le passage en fibrillation auriculaire 〚2〛.
5 Fonction cardiaque à l’effort
Les performances physiques d’un individu diminuent avec l’âge. La qui est le produit du débit cardiaque par la différence systémique artério-veineuse en oxygène, diminue de 5 à 10% par décade entre 25 et 75 ans, la relation négative est linéaire et parfaitement établie. Comme il paraît bien établi que le débit cardiaque maximal n’est pas altéré par l’âge, l’anomalie de la semble donc plus périphérique que centrale – tout comme dans le cas de l’insuffisance cardiaque.
L’augmentation du débit cardiaque à l’effort est peu modifiée avec l’âge. Néanmoins, alors qu’un sujet jeune augmente son débit en accélérant le rythme cardiaque, le sujet âgé normal, à l’exercice, augmente son index cardiaque, mais cette augmentation est essentiellement due à une augmentation des volumes. En d’autres termes, à l’effort le sujet âgé se conduit comme un sujet jeune sous bêta-bloquants 〚2, 20〛. Sur un plan énergétique, ce mécanisme est néanmoins plus coûteux que la tachycardie. L’une des caractéristiques de cette population est également la relative hétérogénéité des réponses ; cette hétérogénéité à l’effort résulte probablement de l’existence d’insuffisances coronariennes occultes non détectables par les examens, même invasifs.
La réactivité à l’effort dépend de l’activité du système nerveux autonome. L’un des moyens qui permette une exploration globale de ce système est la mesure de la variabilité du rythme sinusal. Cette variabilité est diminuée, la diminution est globale ; elle porte sur les oscillations de basse et de haute fréquence, chez l’homme et chez l’animal, ce qui laisse a priori à penser que les modifications de ce système portent à la fois sur le sympathique et sur le vague 〚21〛. Par ailleurs, il est maintenant bien établi que la densité des récepteurs bêta-adrénergiques et surtout muscariniques est réduite avec l’âge chez le rat, la régulation se faisant différemment dans chacun des deux systèmes 〚22–24〛 ; il faut d’ailleurs noter que, contrairement à ce qui se passe pour le système adrénergique, les anomalies du système muscarinique dans la sénescence se retrouvent dans presque tous les organes et, en particulier, dans le système nerveux central. Cette réduction est accompagnée d’une diminution de la concentration de la protéine de transduction Gαs ; contrairement à ce qui se passe dans l’insuffisance cardiaque, la densité de Gαi2 est inchangée 〚22〛.
6 Rythme cardiaque
La majorité des sujets âgés ont des arythmies 〚25〛, généralement bénignes, les troubles du rythme les plus fréquents étant les extrasystoles supraventriculaires ou ventriculaires isolées ou groupées, et les blocs de conduction. Ces arythmies apparaissent à l’effort, même au cours des épreuves d’effort courtes. Cette prévalence a été confirmée dans l’étude de Framingham. L’espace PR est un peu augmenté, mais il reste inférieur à 20 ms.
Cette fréquence des arythmies se retrouve également chez le rat sénescent. Le nœud sinusal du rat âgé est fragmenté, les cellules du pace-maker sont désorganisées par de la fibrose. De plus, des mesures faites directement sur une zone atriale droite enrichie en nœud sinusal ont montré que les concentrations en récepteur muscarinique étaient diminuées, alors que celles du récepteur adrénergique étaient inchangées, ce qui induit un déséquilibre à ce niveau très sensible 〚26〛.
7 Système rénine–angiotensine–aldostérone, SRAA
Le SRAA circulant est beaucoup moins actif chez le sujet âgé que chez le sujet jeune, et les concentrations plasmatiques en angiotensine II et en aldostérone sont corrélées négativement avec l’âge, en clinique en particulier (Tableau 3). La synthèse hépatique d’angiotensinogène est diminuée et la concentration en ARNm y est plus faible que chez l’animal jeune.
Système rénine–angiotensine–aldostérone et facteur atrial natriurétique chez le rat âgé (d’après 〚15〛).
Rat jeune | Rat âgé | |
Système rénine-angiotensine-aldostérone circulant et principales hormones plasmatiques | ||
Activité rénine (ngangio I ml h) | 38 ± 5 | 6 ± 1*** |
Angiotensine I (ng ml–1) | 6 ± 1 | 1,7 ± 0,2*** |
Aldostérone (fmol ml–1) | 844 ± 99 | 715 ± 85 |
Cortisol (nmol ml–1) | 42 ± 3 | 68 ± 9* |
Thyroxine libre (pg ml–1) | 29 ± 2 | 12 ± 2*** |
3-iodothyronine libre (pg ml–1) | 3,1 ± 0,2 | 2,6 ± 0,2 |
Facteur atrial natriurétique (pmol l–1) | 21 ± 8 | 52 ± 10* |
ARN messagers du ventricule gauche | ||
Angiotensinogéne (fg μg-1ARN) | 31 ± 4 | 160 ± 50** |
Enzyme de conversion (fg μg-1ARN) | 574 ± 58 | 1356 ± 245** |
Facteur atrial natriurétique (D.O. normalisée) | 0,03 ± 0,001 | 0,23 ± 0,005*** |
ARN messagers du ventricule droit | ||
Angiotensinogéne (fg μg-1ARN) 373 ± 92 | 314 ± 72 | |
Enzyme de conversion (fg μg-1ARN) 21,800 ± 2,400 | 22,700 ± 2,300 | |
Facteur atrial natriurétique (D.O. normalisée) | 0,04 ± 0,005 | 0,03 ± 0,005 |
Cette anomalie est, partiellement corrigée par une activation des SRAA tissulaires, myocardiques 〚15〛 en particulier, et par une augmentation de la densité des récepteurs à l’angiotensine II 〚16〛, ce qui explique pourquoi les sujets âgés restent sensibles aux inhibiteurs de l’enzyme de conversion, IEC. L’efficacité et la tolérance des IEC chez les personnes âgées sont maintenant bien démontrées. Dans trois larges communautés nord-américaines (sujets âgés de 65 ans et plus), le déclin des diurétiques au profit des IEC a permis de maintenir un contrôle efficace et bien toléré de la pression artérielle, réserve faite de l’hypotension orthostatique, qui semble plus fréquente pour des raisons pharmacocinétiques et justifie une approche plus prudente que chez le sujet jeune 〚27〛. Enfin, il est démontré que les effets trophiques bénéfiques des IEC existent également chez les sujets âgés 〚28〛.
8 Réponse au stress
Cliniquement, les sujets âgés sont plus sensibles à l’ischémie myocardique que les sujets jeunes, et l’incidence de l’insuffisance cardiaque d’origine ischémique croît avec l’âge. Le tonus vasculaire, les fonctions endothéliales et la densité du lit vasculaire sont réduits avec l’âge, la réserve coronaire est altérée et, à réduction de débit coronaire égale, les performances du cœur sénescent sont plus fortement modifiées que celles du cœur du sujet jeune. Expérimentalement, chez l’animal âgé, une réduction du débit coronaire de 70% provoque une altération de la tension active comparable à celle obtenue chez l’animal jeune en réponse à une réduction de 85% du débit coronaire 〚29〛. L’ischémie, même brève, induit l’activation de systèmes de réparation, probablement par l’intermédiaire d’un facteur de transcription sensible à l’ischémie. Elle active les gènes codant pour les principales protéines régulant le calcium intracellulaire. Cette activation survient pour des réductions du débit coronaire plus faibles chez le sujet âgé, ce qui confirme la sensibilité du myocarde âgé aux effets du stress ischémique 〚29〛.
La plus grande vulnérabilité du cœur sénescent à l’ischémie s’explique, en partie, par le fait que le réseau coronaire du sujet sénescent répond à l’ischémie par une vasoconstriction. Ceci a été montré chez l’homme au cours de l’ischémie induite par stimulation électrique 〚30〛 et dans l’angor instable 〚31〛. Deux types d’explication au moins ont été proposés : une augmentation de la sensibilité endothéliale à l’endothéline 〚32〛 ou une augmentation de la densité des récepteurs à l’angiotensine II 〚15〛; une diminution de la concentration en NO synthase et une altération des réponses vasodilatatrices au NO 〚33〛. Cette vulnérabilité est probablement accessible à la thérapeutique, et il est possible que la molsidomine soit plus efficace chez le sujet âgé que chez le sujet jeune au décours d’une ischémie aiguë.
Comme on l’a vu, le cœur sénescent est normalement soumis à une surcharge mécanique. Conserve-t-il malgré cela la capacité de s’hypertrophier en réponse à une hypertension ou à un infarctus 〚12〛 ? Le vieillissement est accompagné par une réduction des capacités de l’organisme à se régénérer et plusieurs travaux ont suggéré que la capacité du cœur âgé à s’hypertrophier était atténuée. En fait, des études mieux calibrées ont montré que le cœur sénescent était encore capable de s’hypertrophier, quoique plus lentement 〚9〛.
Au cours de la sénescence le système cardiovasculaire est modifié de façon importante, mais globalement la fonction cardiaque reste normale, du fait de la mise en jeu d’un certain nombre de mécanismes de compensation. L’élément le plus déterminant du système cardiovasculaire du sujet âgé est l’élévation de l’impédance caractéristique des gros vaisseaux.
Abridged version
1 Introduction
The incidence of most of the cardiovascular diseases increases with ageing, because ageing enhances the emergence of the genetic components that have low penetrance, it prolongs the contact with risk factors as glycemia, tobacco compounds, hyperlipaemias, overnutrition, and finally ageing is also associated with a diminished physical activity. Studies on aged persons with normal coronarography and normal blood pressure are quite rare. Up to now, on the basis of experimental designs and clinical settings, there is evidence that unaffected aged persons have a normal cardiac output at rest and during exercising. Nevertheless, the senescent heart is far for being normal as compared to adults, reflecting together the general process of senescence, the senescent endocrine system and, above all, the senescence of the big vessels.
2 Structure of the aged myocardium and vessels
Both in human and animal species, the heart weight increases with ageing in proportion to body weight. Such an augmentation is accompanied by a paradoxical loss of cardiocytes, which is unlikely to be caused by apoptosis and has probably an ischemic origin, and both a compensatory hypertrophy of the remaining cardiocytes and fibrosis, which is the predominant determinant of the senescent cardiac function. Senescent myocardial fibrosis is post-transcriptionally-regulated and principally caused by a depressed collagenase activity. The senescent arteries are both larger and stiffer, the arterial wall is thickened and the elastin/collagen ratio diminishes commensurate to ageing.
3 Vascular physiology
The characteristic impedance of aorta goes from 50 dyn s cm5 at 30 years up to 90 at 70 years; such an augmentation is, in part, reversible with exercising and results from the increased arterial compliance that causes an enhanced pulse wave velocity and a prolonged reflected wave that is superimposed to the direct pressure wave. The aortic impedance is the true load of the heart, then, the senescent left ventricle is overloaded. The enhanced coronary arteries impedance is responsible for a diminished coronary reserve and an increased sensitivity to ischemia. During ageing, the collagen and elastin properties are modified by glycation, and the advanced glycation end-products are major determinants of aortic compliance. Finally, ageing modifies endothelium and endothelial production of vasoactive substances.
4 Cardiac function at rest
The Baltimore study has demonstrated that cardiac output is unchanged with ageing, with unmodified ejection fraction. Nevertheless, experimental approaches in vitro have shown that, despite a normal function in vivo, the performances of the papillary muscle were depressed, which means that there is an adaptation. The adaptation process exists at the organ level – the shortening velocity is slower and the cardiac cycle is more economical – and at the molecular level – the action potential and calcium transient durations are longer. In human beings, such an adaptation is caused by several changes in genetic expression at the level of calcium regulating proteins. The isovolumic phase of relaxation is prolonged, but the most characteristic component of the senescent heart is a @50% diminution of the echocardiographically determined E/A ratio that results from both a reduced early filling of the ventricle and increased atrial filling. Such a normal diastolic dysfunction is an important parameter that clinician has to take into account.
5 Cardiac function during exercising
The physical performances and diminish with ageing; nevertheless, the maximal cardiac output remains unchanged, which means that the abnormality has a peripheral origin. During exercising, in young volunteers, the increase in cardiac output is mainly caused by tachycardia. In contrast, in aged persons, the adrenergic system is blunted, the pulse rate is poorly modified, and the augmentation of the cardiac output is principally due to an increased ejection volume. Global analysis of the autonomous nervous system, using time and/or frequency domain methods, has evidenced a pronounced blunting of heart rate variability. Molecular analyses have evidenced a down-regulation of both adrenergic and muscarinic receptors, especially in the sinus node, and a diminution of Gαs.
6 Cardiac rhythm
Most of the aged persons have benign arrhythmias with slight increase in PR interval. Aged rats are equally arrhythmic, which represents an interesting experimental model, with a pronounced disorganisation of their sinus node, which becomes highly fibrotic.
7 Renin angiotensin aldosterone system, RAS
Normal aged persons have pronounced diminution of their plasma concentrations in both angiotensin II and aldosterone, and augmentation of plasma concentrations in atrial natriuretic factor and cortisol. The reduced angiotensin II level is compensated by an activation of the tissue RAS and an enhanced myocardial angiotensin II receptor density that explains why converting enzyme inhibition, CEI, is still highly efficient to treat both heart failure and essential hypertension in patients aged over 65 years. CEI has well-documented trophic effects that also exist in aged persons.
8 Stress response
Aged subjects are more sensitive to myocardial ischemia and the incidence of heart failure due to coronary ischemia is much higher in old than in young patients. Normal ageing is accompanied with a significant reduction in vascular tone, endothelial functions, coronary reserve and vascular bed density. Experimental settings have evidenced that, in an isolated heart, for the same reduction in coronary flow, the depression in myocardial function is more pronounced in senescent rats than in adult animals. In addition, molecular studies have demonstrated that the ischemia-induced activation of genetic expression occurs for a smaller reduction in the coronary flow in aged animals. In clinical conditions, myocardial ischemia frequently occurs during electrical pacing or unstable angina. It was shown that, in these conditions, aged patients react with a coronary vasoconstriction, in contrast with adults who usually react with a coronary vasodilatation; such an observation has therapeutic consequences.
The aged myocardium is permanently overloaded by the increased aortic impedance. When another mechanical stress, such as hypertension or valve disease, is added, the senescent heart still have the capacity to hypertrophy and to develop the various changes in genetic expression that are currently observed in adults; nevertheless, there are experimental evidences that such an adaptation process needs more time to be efficient.