Abridged English version
To develop the primary or secondary prevention of Alzheimer's disease is necessary because of the increase in the number of cases and the unavailability of a curative treatment. The existence of reserve capacities seems to be one of the most promising ways in this domain. Several cohort studies have analysed the relationships between leisure activities collected at baseline and dementia, but the duration of the follow-up was not sufficient to exclude a reverse causality. From the data of the prospective cohort PAQUID, a study of normal and pathological ageing, we studied the risk of dementia according to leisure activities and to the age of cessation of professional activity, with a follow-up period of fifteen years.
The PAQUID cohort was investigated in 1998–1999 in 3777 community dwelling elderly people, randomly chosen in 75 parishes of South Western France. Leisure activities were collected at baseline and the subjects were followed-up every two years for 15 years. During this follow-up of the cohort, 659 subjects developed an incident of dementia. The age of cessation of occupational activities was collected for 1744 subjects, at the 5th year of follow-up.
In a multivariate Cox model taking into account sociodemographic factors, the comorbities and the baseline cognitive performances, the practice of a sport and reading decreased by 25% the risk of dementia during 15 years. On the other hand, the age of cessation of occupational activity was not associated with the risk of dementia.
An active life seems to be a possible way to help in the prevention of dementia.
1 Introduction
La maladie d'Alzheimer et les syndromes apparentés sont devenus une priorité de Santé Publique avec la présentation du plan Alzheimer 2008–2012 du Président de la République Française. Il y aurait en France actuellement 860 000 cas de démences. Ce chiffre devrait passer à 1 200 000 en 2020 et 2 100 000 en 2040 si l'incidence et la durée de la maladie ne changent pas d'ici là [1]. En l'absence de perspective de traitement curatif à court terme, il est nécessaire de développer une prévention primaire ou secondaire si l'on souhaite contenir le phénomène et limiter le nombre de cas incidents. L'existence de capacités de réserve cérébrale est certainement une des voies les plus prometteuses de la prévention [2]. Chez le rat adulte, un séjour d'un mois en environnement enrichi contribue à développer de nouvelles synapses et donc de nouveaux réseaux neuronaux susceptibles de compenser une atteinte neurodégénérative [3]. Chez l'homme, nous avons déjà montré avec l'étude PAQUID qu'un niveau d'études élevé [4] et des activités de loisirs à la retraite [5] étaient associés à un risque moindre de démence et de maladie d'Alzheimer. Cependant ce premier travail sur les loisirs concernait le risque de démence trois ans après l'évaluation de la pratique des loisirs. Or nous savons maintenant que les troubles cognitifs précèdent le stade clinique de démence dans la maladie d'Alzheimer notamment, de plusieurs années [6]. Il n'est donc pas possible avec un suivi à court terme d'une cohorte de trancher entre effet protecteur causal des loisirs ou conséquence d'une interruption des loisirs en raison de troubles cognitifs débutants. De plus, à notre connaissance, aucune étude ne s'est intéressée spécifiquement à l'âge de cessation d'activités professionnelles. La poursuite d'une activité professionnelle chez le sujet âgé représente avec les activités de loisirs une autre possibilité de maintien voire de développement des capacités de réserve.
L'objectif de notre travail est d'étudier le risque de démence à long terme (à 15 ans) en fonction des activités de loisirs recueillies initialement et d'étudier ce même risque (à 10 ans) en fonction de l'âge de cessation de l'activité professionnelle dont le recueil a été réalisé lors du suivi à cinq ans de la cohorte.
2 Méthodes
PAQUID (Personnes Agées Quid) est une étude épidémiologique en population générale. Il s'agit d'une cohorte prospective dont l'objectif principal est d'étudier le vieillissement cérébral normal et pathologique après 65 ans. L'échantillon étudié a été constitué en 1987. Des personnes âgées de 65 ans et plus vivant à domicile ont été tirées au sort sur les listes électorales de 75 communes (37 communes en Gironde et 38 en Dordogne). Un total de 3777 sujets (69% des sujets sélectionnés) a été inclus ; ces sujets étaient représentatifs de la population générale âgée vivant à domicile en Gironde et en Dordogne en terme de structure d'âge et de sexe [4].
2.1 Recueil des données
Les sujets ont été vus initialement en 1988–1989 par une enquêtrice psychologue préalablement formée aux entrevues à domicile et à la démence. Les principales variables recueillies à l'aide d'un questionnaire standardisé concernaient les facteurs socio-démographiques, l'environnement social, le logement, les activités et le mode de vie, l'état de santé, les antécédents médicaux, les médicaments consommés, la symptomatologie dépressive et les déficits neuro-sensoriels. Une batterie de tests psychométriques dont le MMSE (Mini-Mental-State Examination) de Folstein [7], qui évalue les fonctions cognitives de façon globale a été administrée aux sujets.
Les sujets ont ensuite été revus toujours à leur lieu de résidence, trois, cinq, huit, dix, treize et quinze ans après. Une description plus complète de la méthodologie de la cohorte PAQUID a déjà été exposée dans les publications antérieures [4]. Pour cette étude, nous avons exclu les sujets initialement déments, présentant des déficiences auditives et visuelles majeures, présentant une maladie de parkinson ou étant grabataires car ces déficiences interfèrent de manière évidente soit avec la pratique d'activités de loisirs soit avec le risque ultérieur de démence.
2.2 Diagnostic de la démence
Une recherche active de la démence a été réalisée lors de la visite initiale et à chaque suivi. A l'issue de l'entretien à domicile, la psychologue complétait les critères DSM III-R de démence [8]. Dans un second temps, les sujets qui remplissaient ces critères de démence étaient revus à leur domicile par un neurologue, qui validait le diagnostic de démence sur les critères DSM III-R et en précisait l'étiologie : maladie d'Alzheimer probable ou possible sur les critères NINCDS-ADRDA [9], démence vasculaire sur l'échelle d'Hachinski [10] et autres types de démence. Afin de mieux prendre en compte le déclin cognitif, à partir du suivi à 5 ans, en plus de la sélection par la psychologue sur les critères DSM III-R de la démence, les sujets présentant une baisse de 3 points ou plus au test du MMSE ont également été revus par le neurologue. Cette baisse de 3 points a été évaluée par rapport au score maximum obtenu à ce test lors des suivis précédents. Après cette consultation du neurologue, chaque cas a été rediscuté par un comité de validation afin d'établir le diagnostic.
2.3 Variables utilisées
Parmi les caractéristiques socio-démographiques des sujets, nous avons retenu le sexe, l'âge, le niveau d'études en deux classes (pas de Certificat d'études primaires (CEP) versus au moins le CEP). Les activités de loisirs ont été recueillies par entretien standardisé lors du bilan initial. Seules les activités pratiquées régulièrement, c'est-à-dire au moins une fois par semaine (sauf pour les voyages au moins une fois par an) ont été cotées 1. Si elles n'étaient pas pratiquées régulièrement elles étaient cotées 0. Dix activités ont été ainsi recueillies : lecture, télévision, activités sportives, garde des enfants, visite dans la famille ou chez des amis, jeux de société, jardinage, bricolage ou tricotage, voyage, activité de groupe ou associative. Un score additif d'activités de 0 à 10 a ainsi été calculé.
L'âge de cessation d'activité professionnelle a été recueilli lors du suivi à cinq ans de la cohorte. La variable a été classée en quartiles définissant ainsi des sujets ayant arrêté de travailler tardivement (quartile supérieur), ayant arrêté de travailler tôt (quartile inférieur) et un groupe intermédiaire (deux quartiles médians).
2.4 Analyses statistiques
Pour estimer l'association entre les différentes activités et le risque de démence à 15 ans, nous avons utilisé un modèle de Cox avec comme variable délai le temps passé depuis l'entrée dans la cohorte. Afin de prendre en compte d'éventuels biais de confusion, tous nos modèles ont été ajustés sur l'âge, le sexe, le niveau d'études, la présence de comorbidités (maladie thyroïdienne, symptomatologie dépressive (évaluée par la CES-D), diabète, cardiopathie ischémique (angine de poitrine, antécédents d'infarctus), crampes dans le mollet, et séquelles d'accident vasculaire cérébral). Un ajustement complémentaire a été réalisé sur le niveau de performances cognitives initial mesuré par le MMSE. Nous avons évalué l'association de chacune des activités prises séparément, puis toutes les activités ont été introduites simultanément dans un même modèle afin de préciser la part respective de chaque activité dans la réduction du risque de démence. Nous avons pour cela utilisé la méthode pas à pas descendante avec un seuil à 5%. Les résultats sont présentés à l'aide de l' « hazard ratio » (HR) et de son intervalle de confiance à 95%.
Pour estimer l'association entre l'âge de cessation d'activité (recueilli au suivi à 5 ans) et le risque de démence 10 ans après, nous avons utilisé la méthode de Kaplan–Meier puis un modèle de Cox à entrée retardée ajusté sur le sexe et le niveau d'études.
3 Résultats
3.1 Description de l'échantillon et des activités de loisirs
L'analyse des données a porté sur 3470 personnes parmi les 3777 incluses initialement dans PAQUID (91,9%). Parmi les 307 sujets exclus de l'échantillon, 102 sujets étaient déments lors du bilan initial, 23 avaient des problèmes de vue importants, 151 avaient des problèmes auditifs majeurs, 15 étaient grabataires, 38 avaient une maladie de Parkinson et 14 n'avaient pas complété le questionnaire sur les activités.
L'échantillon est composé de 1451 (41,8%) hommes et de 2019 (58,2%) femmes, d'âge moyen 75,0 (écart-type (ET) : 6,6) ans. Mille cent quatre-vingt sept personnes (34,2%) n'avaient pas validé le niveau d'éducation primaire.
Regarder la télévision (95,2%), rendre visite à de la famille ou des amis (83,7%) et lire (83,6%) étaient initialement les activités les plus fréquentes (Tableau 1). Moins de 30% des sujets pratiquaient régulièrement une activité sportive, des activités associatives ou de groupe, ou gardaient des enfants. En moyenne, un sujet pratiquait 5,2 (ET : 2,0) activités parmi les 10 présentées.
Activités sociales et de loisirs. PAQUID (n = 3470).
Activités | Effectif | Proportion (%) |
Regarder la télévision | 3303 | 95,2 |
Visites dans la famille, chez des amis, des voisins | 2905 | 83,7 |
Lecture | 2901 | 83,6 |
Tricotage / Bricolage | 2178 | 62,8 |
Jardinage | 1925 | 55,5 |
Voyages | 1531 | 44,1 |
Jouer à des jeux de société | 1135 | 32,7 |
Activités en groupe dans un club ou une association | 819 | 23,6 |
Garde de jeunes enfants | 738 | 21,3 |
Sport ou gymnastique | 730 | 21,0 |
3.2 Activités de loisirs et risque de démence
Le risque de démence a été analysé pour chaque activité prise individuellement avec ajustement sur les facteurs socio-démographiques et les principales comorbidités. Cinq activités sont significativement associées au risque de démence (sport, voyage, lecture, tricotage ou bricolage et jeux de société), toutes dans le sens protecteur, dans un modèle incluant facteurs socio-démographiques et comorbidités (Tableau 2). Après ajustement additionnel sur les performances cognitives initiales mesurées par le MMSE, seules la pratique d'un sport et la lecture restent associées à un risque moindre de démence à 15 ans (Tableau 2). La pratique d'un sport est associée à un risque de démence diminué de 25% (Hazard Ratio (HR) = 0,75 []), comme la lecture (HR = 0,75 []). Parmi les autres activités, presque toutes ont un HR inférieur à un (donc en faveur d'un effet protecteur) mais de manière non significative. Seules les activités de groupe, notamment dans un club du troisième âge et les visites à des personnes connues ont un HR supérieur à un (non significatif).
Hazard Ratio (HR) et intervalle de confiance à 95% (IC 95%) du risque de démence à 15 ans en fonction des différentes activités et du nombre d'activités pratiquées. Modèles séparés pour chaque activité, ajustés sur les facteurs socio-démographiques et les comorbidités.
Activités | Sans ajustement sur le MMSE | Avec ajustement sur le MMSE | ||
HR | IC 95% | HR | IC 95% | |
Sport ou gymnastique | 0,73 | 0,59–0,90⁎⁎ | 0,75 | 0,60–0,93⁎⁎ |
Activités en groupe dans un club ou une association | 1,04 | 0,86–1,25 | 1,09 | 0,90–1,31 |
Voyages | 0,81 | 0,68–0,97⁎ | 0,87 | 0,73–1,04 |
Visites dans la famille, chez des amis, des voisins | 0,86 | 0,68–1,08 | 1,04 | 0,82–1,31 |
Garde de jeunes enfants | 0,90 | 0,73–1,11 | 0,97 | 0,78–1,20 |
Lecture | 0,66 | 0,53–0,81⁎⁎⁎ | 0,75 | 0,60–0,92⁎⁎ |
Regarder la télévision | 0,92 | 0,63–1,33 | 0,89 | 0,60–1,31 |
Tricotage / Bricolage | 0,84 | 0,70–0,99⁎ | 0,88 | 0,74–1,05 |
Jouer à des jeux de société | 0,82 | 0,68–0,99⁎ | 0,90 | 0,75–1,08 |
Jardinage | 0,89 | 0,75–1,05 | 0,96 | 0,80–1,14 |
Score d'activités | 0,91 | 0,86–0,95⁎⁎⁎ | 0,94 | 0,90–0,99⁎ |
⁎ ;
⁎⁎ ;
⁎⁎⁎ .
Après introduction simultanée de l'ensemble des activités dans le modèle, la lecture et la pratique du sport restent significativement associées à un risque moindre de démence pratiquement sans modification des HR (sport : HR = 0,76 [], et lecture : HR = 0,78 [], ).
Si on considère le score cumulatif des activités pratiquées, une fois ajusté sur les facteurs socio-démographiques et les comorbidités, plus le nombre d'activités pratiquées est important et plus le risque de démence est significativement faible (HR = 0,91 [] par activité supplémentaire). Après ajustement supplémentaire sur le MMSE initial, le HR lié à un point de plus du score d'activités reste significatif (HR = 0,94 [], ).
3.3 Age de cessation d'activité
L'analyse a porté sur 1744 personnes non démentes, 963 (55,2%) femmes et 781 (44,8%) hommes vus au suivi à cinq ans de la cohorte et ayant eu une activité professionnelle. L'âge de cessation d'activité était en moyenne de 57,0 (ET : 13,3) ans. La limite du premier quartile de la distribution des âges de cessation d'activités professionnelles est à 55 ans et celle du dernier quartile à 65 ans. Graphiquement, l'âge de cessation d'activité ne semble pas lié au risque de démence 10 ans plus tard (Fig. 1).
Après ajustement sur le sexe et le niveau d'études, les résultats sont similaires : le risque de démence pour le groupe ayant cessé toute activité professionnelle avant 55 ans versus ceux ayant cessé entre 55 et 65 ans est de 1,15 [] ; il est de 1,07 [] pour le groupe ayant cessé à plus de 65 ans par rapport au groupe entre 55 et 65 ans. Il n'y a donc pas de différence significative selon le groupe d'âge de cessation d'activités.
4 Discussion
Nous avons montré que la pratique d'activités de loisirs après 65 ans était associée à un risque moindre de démence, alors que l'âge de cessation d'activités professionnelles ne semble pas lié à ce risque. Cette association est observée pour l'activité lecture et pour l'activité physique, elle est aussi observée quand le nombre d'activités déclarées augmente. Il est intéressant de noter que les deux activités (lecture et sport) qui sont associées à un risque moindre de démence, le sont de manière cumulative et probablement par des mécanismes différents puisque les HR ne varient pas après ajustement mutuel. Il n'y a pas de colinéarité entre les deux activités en relation avec le risque de démence.
L'absence de relation avec l'âge de la retraite dans cet échantillon est en contradiction avec la relation activités-démence. Si l'hypothèse de l'entretien des capacités de réserves cérébrales par les activités dites « stimulantes » est vraie, une activité professionnelle plus prolongée devrait entraîner une diminution du risque de démence au même titre que les activités de loisirs. Cependant, une différence fondamentale entre ces deux approches est que les activités de loisirs sont le plus souvent choisies par les sujets âgés alors que la retraite est plutôt imposée à un âge donné ou après une période déterminée d'emploi professionnel. C'est donc peut-être le libre choix des activités et la motivation avec laquelle elles sont réalisées qui compteraient pour renforcer ou préserver les capacités de réserve.
Pour les activités professionnelles, nous n'avons pris en compte que l'âge de cessation d'activité et pas le type d'activité professionnelle. Cependant, dans un travail précédent nous n'avions pas trouvé de liaison significative entre la profession principale exercée et le risque de démence à 10 ans, dans une population de 65 ans et plus, hormis chez les agriculteurs pour lesquels le risque de démence associé à la maladie de Parkinson était majoré [11].
Parmi les activités de loisirs recueillis, la lecture et le sport apparaissent comme protecteurs du risque de démence à long terme. Cette association persiste alors que les performances cognitives mesurées par le MMSE au moment du recueil des données ont été prises en compte. Bien sûr, il s'agit seulement d'une étude d'observation, et on ne peut exclure le risque de biais de confusion résiduel lié à des facteurs non pris en compte dans l'analyse. C'est le cas par exemple de certains facteurs socio-démographiques comme les revenus qui n'ont pas été pris en compte. D'autres limites de notre étude proviennent de la méthode utilisée pour recueillir les activités de loisirs. Seules certaines activités ont été considérées et la fréquence de ces activités ne prenait en compte que leur caractère habituel ou non. Enfin pour la lecture, le type de lecture (roman, essais ou journal quotidien, par exemple) n'était pas précisé, ni le type d'émission regardée pour la télévision, ce qui limite notre interprétation quant à la part de stimulation intellectuelle apportée par ces activités. Nous n'avons pas pris en compte dans l'analyse de ces résultats les éventuelles incapacités sensorielles légères ou mal corrigées (vue et audition) qui peuvent limiter ces activités.
Quoiqu'il en soit ces résultats sont d'autant plus intéressants que les activités prédictrices sont peu onéreuses et modulables en fonction des désirs et des habitudes des personnes âgées.
Une revue de la littérature publiée en 2004 [12] indique que, pour les trois composantes de vie explorées (sociales, mentales et physiques), un effet bénéfique sur la cognition et un effet protecteur vis-à-vis de la démence sont généralement rapportés par une quinzaine de publications sur des données longitudinales avec un recul moyen de 5–6 ans entre l'évaluation des activités et la survenue d'une démence ou d'un déclin cognitif.
Pour l'activité physique, différentes modalités de définition de l'activité sont rapportées dans les sept publications antérieures à 2004 qui portent sur des sujets âgés : elles incluent aussi bien des activités sportives que la marche ou le nombre d'étages. Depuis cette date ont été publiés des résultats issus de la Nurses' Health Study [13] avec une évaluation téléphonique cognitive chez plus de 18 000 femmes qui montrent un effet protecteur de l'activité physique régulière à long terme (incluant la marche) sur le déclin des fonctions cognitives. Une étude prospective italienne [14] vient de montrer un effet protecteur de l'activité physique (évaluée quantitativement en terme d'énergie calorique dépensée) pour la démence vasculaire mais pas pour la maladie d'Alzheimer. Les activités physiques de loisirs en « midlife », pratiquées au moins deux fois par semaine, sont aussi associées à une diminution du risque de démence et de maladie d'Alzheimer dans une population suédoise suivie 21 ans [15], cet effet à long terme a été exploré avec des modèles multivariés très complets, ce qui n'a pas toujours été le cas des études les plus anciennes.
Pour les activités physiques, deux mécanismes principaux non exclusifs sont évoqués : soit un bénéfice sur les facteurs de risque vasculaires et sur le vieillissement du cœur et des artères, notamment cérébrales, soit un bénéfice sur la motricité elle-même, facilitant les déplacements, les rencontres, l'échange et diminuant le risque de chutes. La lecture a été spécifiquement très peu étudiée comme activité de loisirs en relation avec le risque de démence. A Graves et al dans le Kame project [16] ont montré que le fait de continuer à lire le Japonais pour des Japonais ayant immigré aux Etats-Unis, était également associé à un risque moindre de démence. Mais ces auteurs n'ont pas pris en compte la lecture en tant qu'activité de loisirs. Le plus souvent la lecture a été incluse dans un score cumulatif d'activités stimulantes, lui-même associé quand il est élevé à un risque moindre de déclin cognitif ou de démence [17–20].
Les mécanismes possibles de protection par la lecture et par le sport ne seraient donc pas les mêmes et pourraient être complémentaires. Des études plus précises et des essais de prévention sont nécessaires pour confirmer ces hypothèses, mais une vie active est certainement une voie crédible dans la prévention de la démence.