Abridged English version
Deep ice coring in Antarctica and Greenland provides unique archives of the climate and atmosphere of our planet. The Antarctic ice sheet contains the oldest records, covering potentially one million of years or more, and the most reliable record of atmospheric CO2. The longest available records are those of the Dome Fuji and Vostok ice cores, which cover, respectively, the last 300 000 years (300 ka) and 420 ka. The new EPICA DC core recovered in 2003 should extend the record to the last 800 ka. In Greenland, three cores cover the last 100 ka or slightly more. The north–south climatic connection during the last glacial–interglacial cycle can be investigated through the comparison between Antarctic and Greenland records.
Ice cores taken in high accumulation area also enable us to sample with appropriate resolution more recent periods, as the Holocene and the last millennium.
After stressing the specificity of the palaeoclimatic ice record (Section 2), the paper reviews the information carried by the ice record on the forcing role of greenhouse gases on climate (Section 3), addresses new perspectives that should arise from the recent time extension of the record to the last 800 ka (Section 4), and concludes on the ice contribution to the understanding of the climatic system (Section 5).
The polar ice records atmospheric properties of past climatic changes and thus complements the information obtained from marine and continental sediments. It provides, in particular, the only reliable palaeoarchive that directly records atmospheric composition in the form of trapped air bubbles, and allows the reconstruction of the past evolution of important greenhouse trace gases (CO2, CH4 and N2O).
It took nearly one century before the ice record [7,10] confirms the Arrhenius prediction [2] that the cooling corresponding to the establishment of the last ice age could result from a decrease of about 40% of the atmospheric CO2 concentrations. Since these pioneering works, the Vostok ice record demonstrated that this conclusion was valid for the last four glacial–interglacial cycles [27]. The Vostok record highlights the fact that CO2 and CH4 are highly correlated to these climatic cycles [3,9,27], which are modulated by the orbital periodicities (100, 40, 20 ka). Various proxies recorded in the Antarctic ice also allow us to investigate the phase relationship between different radiative forcings, like greenhouse gases or northern hemisphere ice sheet changes. They indicate that, during the climatic transitions [26,27] and at the 100-ka period [31], the variations of the greenhouse gases (CO2 and CH4) precede those of the northern ice sheets by several thousands of years. Furthermore, the ice record indicates that the Antarctic glacial–interglacial warming precedes the increase in greenhouse trace gases by a few hundred years [8,12,25], and the major Greenland warming by a few thousands of years [26,27]. These evidences, combined with the efforts made for quantifying the different perturbations to the energy balance of the planet during a glacial–interglacial transition ([14], [16 (and references herein)], [17,22]), lead to the conclusion that the increase in greenhouse trace gases, and especially in CO2, first, and then the shrinkage of the northern ice sheets, played a major role in amplifying the weak initial forcing due to the orbital eccentricity.
The recent extension of the ice record (800 ka expected from the EPICA DC core) open new perspectives concerning the behaviour of atmospheric CO2 under different conditions of the Quaternary climate, in particular during a period when the 40-ka cycle was predominant instead of the 100-ka cycle. It will also allow, for the first time, to investigate the complete atmospheric record of marine isotopic stage 11 (MIS 11), which should provide a pertinent evaluation of our capacity to predict the evolution of the Holocene in the absence of any anthropogenic perturbation.
Finally, the ice record also carries information on more recent time scales, which suggests a marked link between the anthropogenic increase in greenhouse gases and the secular warming. The palaeoapproach described above should provide an appropriate test of the capacity of the GCMs (General Circulation Models) to simulate the past climatic changes and thus to verify how reliable they are to simulate future climate. In particular, the palaeosimulations can be used for evaluating the climate sensitivity of a variation in CO2, CH4 or N2O.
1 Introduction
Les calottes de glace des régions polaires, et en premier lieu l'Antarctique et le Groenland, constituent des archives uniques de notre planète. Pour échantillonner ces archives sur de longues échelles de temps, des carottages de plusieurs milliers de mètres sont nécessaires et constituent souvent encore aujourd'hui de véritables challenges technologiques. C'est ainsi que, dès les années 1960, les premiers forages profonds effectués à Camp Century, au Groenland, et Byrd, en Antarctique, ont initié une ère nouvelle dans l'étude du Climat et de l'Environnement de notre planète.
L'Antarctique contient les archives les plus vieilles, remontant potentiellement au-delà du million d'années (Fig. 1). La carotte de Dôme Fuji couvre les derniers 300 000 ans (300 ka), celle de Vostok les derniers 420 ka, et la nouvelle carotte DC EPICA devrait couvrir les derniers 800 ka. Ces carottes permettent de reconstruire des caractéristiques fondamentales de l'évolution du climat et de la composition de l'atmosphère sur plusieurs cycles climatiques glaciaires–interglaciaires.
Au centre du Groenland, trois carottages profonds – GRIP, GISP2 et NGRIP – permettent aujourd'hui d'avoir un précieux enregistrement continu provenant des latitudes boréales sur le dernier cycle glaciaire–interglaciaire, c'est-à-dire en gros sur les derniers 100 ka. En revanche, pour le CO2, l'enregistrement antarctique est le plus fiable [28], en raison du contenu relativement élevé en impuretés de la glace du Groenland qui peut conduire à une production de CO2 in situ, dans la glace, par interactions carbonate–acide ou par oxydation de matière organique [1,11,15].
Des carottes prélevées en des sites présentant des taux d'accumulation de la neige suffisamment élevés permettent d'obtenir, sur des périodes plus courtes et en particulier sur l'Holocène, des enregistrements climatiques à plus haute résolution.
Les archives glaciaires permettent aussi de documenter l'ère industrielle et donc de faire le lien entre l'enregistrement climatique à long terme avec l'enregistrement instrumental mesuré directement dans l'atmosphère et qui s'est largement développé au cours du XXe siècle.
Une revue exhaustive des informations provenant des carottes de glace est hors de portée de ce numéro spécial des Comptes rendus Geoscience. Cependant, parmi les découvertes révélées par l'étude des archives glaciaires, il en est deux qui contribuent de façon tout à fait unique à la compréhension du système climatique :
- – la reconstruction de l'évolution des traces gazeuses à effet de serre au cours du Quaternaire récent, rendue possible par l'échantillonnage quasi-direct de l'atmosphère à travers le piégeage des bulles d'air par la glace ;
- – la découverte de changements abrupts du climat au cours du passé, les événements Dansgaard–Oeschger, et de leur réponse bipolaire, obtenue grâce à la synchronisation possible des carottes groenlandaises et antarctiques. Cette dernière perspective fait l'objet de l'article de Labeyrie et Jouzel dans le présent numéro.
Pour nous limiter au premier point, nous exposons d'abord les raisons pour lesquelles la glace offre des archives uniques. Puis nous analysons les informations apportées par la glace en ce qui concerne le rôle des gaz à effet de serre dans le forçage climatique des cycles glaciaires–interglaciaires (Section 2). Dans une troisième section, nous abordons les nouvelles perspectives que devrait offrir l'extension de l'enregistrement glaciaire à quatre cycles glaciaires–interglaciaires supplémentaires. Enfin, la conclusion (Section 4) porte sur l'apport des archives glaciaires à la compréhension du système climatique et donc à notre capacité de le modéliser en vue de simuler l'évolution du climat futur.
2 Pourquoi la glace constitue-t-elle des archives uniques du climat ?
Les glaciers et particulièrement les calottes de glace situées dans les régions polaires constituent des archives paléoclimatiques et environnementales de notre planète. Ceci est dû à la capacité de la neige nourricière d'échantillonner les poussières et aérosols de l'atmosphère, d'enregistrer la température à laquelle elle s'est formée, et de se transformer en un solide étanche, la glace, qui incorpore des bulles d'air atmosphérique.
Cet archivage se fait essentiellement en deux temps. La neige, en se déposant à la surface, échantillonne par lessivage les poussières et les aérosols atmosphériques, et sa composition isotopique en oxygène 18 ou en deutérium enregistre la température de condensation des nuages qui reflète la température du site de dépôt [21]. Puis, comme indiqué sur la Fig. 2, la neige va progressivement se transformer en un matériau à porosité fermée : la glace avec ses bulles qui, au moment de leur fermeture, vont échantillonner l'air ambiant. Cette transformation dure de quelques dizaines à quelques milliers d'années suivant les sites et donc l'âge de l'air piégé dans la glace est plus jeune que la glace elle-même et que son contenu en poussières et aérosols.
La glace des calottes polaires va ainsi archiver, de façon unique, les conditions climatiques des très hautes latitudes. Ceci est particulièrement important du fait de la forte sensibilité de ces régions aux changements climatiques. Mais surtout la glace est le seul milieu connu qui permet d'échantillonner au cours du temps, et de façon quasi-directe, une parcelle d'air représentative de l'atmosphère globale, en particulier en Antarctique, ouvrant ainsi la voie à la reconstruction de l'évolution passée des traces gazeuses contribuant à l'effet de serre, telles que le CO2, le CH4 et le N2O.
De plus, la composition isotopique de l'oxygène de l'air contenu dans la glace (δ18Oair) reflète à la fois les changements de la composition isotopique de l'eau de mer, qui dépend essentiellement de la quantité de glace stockée sur les continents, et les modifications de la biosphère continentale et du cycle hydrologique aux basses latitudes [5,6,23,24]. En s'affranchissant de l'influence de l'insolation aux basses latitudes, on peut alors avoir accès, à partir de la mesure dans la glace de la composition isotopique de l'oxygène de l'air, aux variations du volume des glaces au cours du passé [26,31].
Les archives glaciaires peuvent ainsi fournir, d'une part la signature de forçages climatiques fondamentaux : volume des glaces, gaz à effet de serre, aérosols, et d'autre part la réponse climatique aux hautes latitudes (Fig. 4).
De façon sommaire, la datation de la glace s'effectue par comptage des couches annuelles (sur les derniers dix mille ans dans le cas des sites les plus favorables), en utilisant des horizons repères – volcaniques ou autres – bien datés par ailleurs, ou en modélisant l'écoulement de la glace. Dans ce dernier cas, il faut disposer notamment de données sur l'accumulation de la neige et la vitesse de déplacement de la glace. Les âges ainsi obtenus peuvent être, pour certains événements climatiques caractéristiques, ajustés avec les datations obtenues sur les sédiments marins.
3 Les cycles glaciaires–interglaciaires : forçage climatique des gaz à effet de serre
Les oscillations orbitales de notre planète autour du soleil modulent l'énergie solaire reçue à sa surface, ainsi que sa répartition. L'effet majeur de ces changements d'oscillations a été l'établissement de cycles glaciaires–interglaciaires durant lesquels le climat a varié entre de longues périodes froides, pendant lesquelles de vastes calottes de glace s'établissaient dans l'hémisphère nord et des périodes chaudes plus courtes et consécutives à la fonte de ces mêmes calottes. L'étude des archives glaciaires a contribué de façon majeure à la description et à la compréhension de la variabilité climatique caractéristique de ces cycles.
À la fin du XIXe siècle s'établit un débat important concernant les causes de l'existence des âges de glace, qui avaient été révélés par les empreintes géologiques laissées par les retraits des glaciers dans les Alpes. Arrhenius entreprit alors des calculs, qu'il qualifia d'ennuyeux, pour évaluer la variation de température moyenne en fonction de la saison et de la latitude pour différentes teneurs atmosphériques en CO2 et pour démontrer que les refroidissements correspondant à l'établissement des âges de glace pouvaient s'expliquer par une décroissance de l'ordre de 40 % des teneurs en CO2 [2]. La quantification de l'effet de serre était née, mais ce n'est que presque un siècle plus tard que les glaces de l'Antarctique confirmèrent la prédiction d'Arrhénius en révélant pour la première fois les faibles teneurs en CO2 de l'air datant du dernier maximum glaciaire [7,10]. Cette découverte a été magistralement confirmée par l'analyse de la carotte de Vostok. Elle indique, de façon plus générale, que CO2 et CH4 sont fortement corrélés aux grandes variations climatiques des quatre derniers cycles glaciaires–interglaciaires [3,9,27] (Fig. 3), qui sont modulées par les fréquences orbitales caractéristiques (100, 40, 20 ka).
S'agissant du forçage radiatif des traces gazeuses à effet de serre, le CO2 joue un rôle majeur [27]. Le lien entre CO2 et climat, mis en évidence par les archives glaciaires, a permis de lever, au moins partiellement, le paradoxe du cycle de 100 ka posé par la théorie astronomique de l'évolution du climat au cours du Quaternaire récent. En effet, un cycle dominant d'environ 100 ka est présent dans l'ensemble des paléo-enregistrements du dernier million d'années, mais l'amplitude de l'insolation à cette fréquence, qui correspond à l'oscillation de l'excentricité de l'orbite terrestre autour du soleil, est très faible et donc le système climatique doit répondre de façon non linéaire aux changements orbitaux. La non-linéarité de la réponse climatique a été d'abord attribuée au temps de réponse des grandes calottes de l'hémisphère nord. En effet, ce dernier peut générer une oscillation marquée du volume des glaces correspondant à la période de 100 ka de l'excentricité orbitale, quand on force le système climatique par l'insolation d'été à 65° N qui est elle-même dominée par la précession [18]. Ce caractère non linéaire apparaı̂t clairement dans l'enregistrement marin en dents de scie du volume des glaces, avec des déglaciations « rapides » et des glaciations progressives et lentes (Fig. 4).
En fait l'enregistrement des gaz à effet de serre dans les carottes de glace va montrer que le rythme, de l'ordre de 100 ka, des transitions glaciaires–interglaciaires n'est pas nécessairement généré par les seules variations du volume des glaces. En effet, au cours des transitions climatiques entre époques glaciaires et interglaciaires [26,27] et pour les cycles de 100 ka [31], les variations des gaz à effet de serre (CO2 et CH4) précèdent celles du volume des glaces continentales de plusieurs milliers d'années. Par ailleurs, les enregistrements glaciaires de Vostok et d'EPICA Dome C indiquent que le réchauffement climatique au-dessus de l'Antarctique a précédé de plusieurs centaines d'années l'augmentation du CO2 au cours des transitions glaciaires–interglaciaires [8,12,25].
L'ensemble de ces résultats suggère le scénario suivant pour les grandes transitions glaciaires–interglaciaires, que la planète a connu au cours des derniers 420 ka :
- – le réchauffement sensible a d'abord lieu dans l'hémisphère sud (tout au moins aux latitudes australes), sans doute sous l'impulsion de l'insolation d'été locale, qui précède celle à 65° N de plusieurs milliers d'années ;
- – ce n'est que plusieurs milliers d'années après que le réchauffement marqué de l'hémisphère nord, tout au moins aux latitudes boréales, et la variation sensible du volume des glaces prennent place (Fig. 5).
Une des questions cruciales réside dans l'évaluation de la contribution de chacun des différents forçages climatiques intervenant pour passer d'un régime de maximum glaciaire à un mode interglaciaire. La variation de la composition de l'atmosphère en gaz à effet de serre et en aérosols est obtenue à partir des archives glaciaires ; celles des étendues des glaces continentales et des couverts végétaux sont assez bien cartographiées pour le dernier maximum glaciaire. À partir de ces paléo-données, ont peut empiriquement évaluer les différentes perturbations du budget énergétique de la Planète (forçages radiatifs) qui contribuent au forçage d'un état interglaciaire à partir des conditions du dernier maximum glaciaire [16] :
- – (3,5±1) W m−2 pour les effets conjugués du changement d'albedo (glaces continentales + végétation) ;
- – (2,6±0,5) W m−2 pour les gaz à effet de serre ;
- – (0,5±1) W m−2 pour les poussières et les aérosols.
Cette approche empirique conclut à deux amplificateurs puissants : les calottes de glace de l'hémisphère nord et les gaz à effet de serre, en particulier le CO2. Les paléo-données indiquent aussi que la réponse climatique au forçage radiatif total de 6,5 W m−2 est de l'ordre de 5 °C et que donc la sensibilité correspondante du climat est de l'ordre de 0,77 °C par W m−2.
Ces conclusions sont conformes à celles obtenues à partir de modèles de circulation générale ([14] et références incluses) et d'analyses multivariées des paléo-signaux [17,22].
Ainsi, l'augmentation des gaz à effet de serre, en particulier du CO2, d'abord, puis la disparition progressive des calottes de glace de l'hémisphère nord pendant les transitions entre maxima glaciaires et interglaciaires auraient joué un rôle majeur d'amplificateur du faible forçage initial dû à l'excentricité.
4 Extension de l'enregistrement à un autre aspect du climat du Quaternaire
Le consortium européen EPICA (European Project on Ice Coring in Antarctica), qui rassemble 10 nations, a initié en 1995 un forage profond au site de Dôme C. Le forage a atteint, en janvier 2003, la profondeur de 3200 m. Ceci va permettre d'analyser une séquence de glace qui va couvrir approximativement les derniers 800 ka, doublant ainsi l'échelle de temps fournie par la carotte de Vostok et ouvrant l'accès à quatre cycles glaciaires–interglaciaires supplémentaires. Que peut-on apprendre de nouveau de cette importante extension temporelle ?
La connaissance de l'enregistrement marin sur cette période du passé [4] indique que les cycles climatiques de type glaciaires – interglaciaires qui ont précédé les quatre derniers présentent des maxima glaciaires équivalents ou plus prononcés que les précédents, mais par contre des déglaciations et des périodes interglaciaires nettement moins marquées. Cette différence apparaı̂t dans la signature spectrale de l'enregistrement marin avec, dans le cas des 4 premiers cycles (entre −800 et −400 ka), le passage d'une période dominante de 40 ka (le monde à 40 ka) à 100 ka (monde à 100 ka). L'intérêt de prolonger l'enregistrement atmosphérique de la glace à quatre cycles supplémentaires réside dans le fait que l'on va aborder une structure différente des variations climatiques. L'enregistrement devrait permettre de savoir si la gamme de variation du CO2 au cours des quatre derniers cycles (190–300 ppmv) est aussi valable dans un monde à 40 ka.
Enfin, l'extension de l'enregistrement glaciaire devrait permettre de mieux cerner les conditions qui caractérisent l'interglaciaire qui est le nôtre : l'Holocène. Un des objectifs majeurs est d'évaluer notre capacité à prédire l'évolution de l'Holocène, en excluant la perturbation anthropogénique, à partir de l'étude de périodes interglaciaires précédentes. Une période est particulièrement à privilégier dans ce cadre : le stade isotopique marin 11 (communément désigné par MIS 11) qui se situe, il y a environ 420 ka. Il s'agit, en particulier d'une période avec des paramètres orbitaux semblables à ceux de l'Holocène et des dizaines de milliers d'années à venir. D'où l'intérêt d'associer l'enregistrement atmosphérique de la glace à celui de l'environnement marin. L'enregistrement de Vostok s'arrête précisément au stade 11 [30] et celui d'EPICA va en offrir un enregistrement complet.
5 Conclusion : le message de la glace pour le futur
Les archives glaciaires témoignent donc de la dynamique du climat et de l'atmosphère au cours des grands cycles climatiques du Quaternaire récent. Elles indiquent en particulier que les variations du CO2 ou du CH4 atmosphériques sont fortement corrélées aux oscillations caractérisant le climat glaciaire–interglaciaire, tandis que l'évaluation du rôle des différents forçages radiatifs mis en jeu révèle que le CO2 a contribué de façon majeure à l'amplitude des variations glaciaires–interglaciaires.
Mais la glace renseigne aussi sur les conditions plus récentes. Les mesures des carottes de glace ont permis d'étudier la variabilité du CO2, du CH4, et du N2O au cours de l'Holocène [13,19], et de documenter l'augmentation exponentielle de ces gaz à effet de serre au cours des deux derniers siècles (Fig. 6). Cette augmentation est essentiellement due aux émissions anthropiques et suggère un lien avec le réchauffement observé sur l'enregistrement thermométrique qui a débuté en 1861 [20]. Néanmoins, une des incertitudes majeures pour prédire le climat futur consécutif à la perturbation anthropique réside dans la connaissance de la sensibilité du climat aux variations des gaz à effet de serre.
En testant la capacité des modèles de circulation générale à simuler les changements paléoclimatiques, on espère pouvoir vérifier leur fiabilité pour simuler le climat du futur [14]. L'approche « paléo », décrite dans la Section 3, offre des avantages uniques, dont, en particulier, l'étude de changements climatiques importants entre deux états que l'on peut considérer comme à l'équilibre. En particulier ces simulations du passé peuvent être utilisées pour évaluer la sensibilité du climat à une variation des gaz à effet de serre, CO2, CH4 et N2O qui, aujourd'hui, sont essentiellement émis de façon anthropique [16].
Remerciements
Ce travail a bénéficié du soutien des programmes nationaux PNEDC et ECLIPSE et du programme européen EPICA.